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100 badass du cinéma, épisode 20 : Harvey Keitel, Michel Constantin, Ralph Meeker, Albert Finney et Ruppert Everett

100 badass du cinéma, épisode 20 : Harvey Keitel, Michel Constantin, Ralph Meeker, Albert Finney et Ruppert Everett

Vingtième et dernier épisode de la série « 100 badass du cinéma » avec au programme, les badass 95 à 100, piochés dans Pulp Fiction, La Valise, En quatrième vitesse, Miller’s crossing et Dellamorte Dellamore. On espère que vous avez autant apprécié de suivre cette série que nous avons eu à la faire et qu’elle vous a donné envie de (re)découvrir plus d’une perle de ce 7e art du plaisir qu’on défend passionnément ici au Daily Mars. L’intégrale de liste sera publiée très vite sur le site : on en a pas fini avec nos cool guys, ça va être épique !

 

 

96. Winston Wolf (Harvey Keitel)

par Dominique Montay

FILM : Pulp Fiction, de Quentin Tarantino (1994)

« Ah donc, c’est ça, un acteur… »

On ne peut pas vraiment dire que Pulp Fiction soit un film ancré dans un réalisme absolu. On n’est pas chez Ken Loach. L’imaginaire de Quentin Tarantino ne prend pas racine dans le cinéma-vérité. Mais tout de même, quand Winston Wolfe intervient dans l’histoire, le film bascule. Tout le réalisme s’effondre, on est dans un cartoon.

Rappel des faits : Vincent Vega a explosé le crâne d’un jeune homme assis à l’arrière de la voiture. D’une à cause d’un trou dans le sol. Deux parce qu’il est assez con et qu’il discutait avec lui en agitant son arme. Du coup, il faut faire disparaître un corps et nettoyer la voiture. Partis se réfugier chez Jimmy, ils appellent Marcellus Wallace pour l’appeler à l’aide.

Il leur envoi Winston Wolfe. Interprété par Harvey Keitel, le mec débarque en trois fois moins de temps que nécessaire, arrive sur les lieux en costume-noeud pap (on est le matin, je rappelle), donne des ordres à tout le monde, envoi chier Vega qui commence à faire le malin. Wolfe ne fait rien d’autre que diriger. Natural Born Leader.

Dans ce segment, Pulp Fiction s’éloigne de son inspiration film noir pour entrer dans le burlesque. Winston Wolfe n’a rien de réaliste. Joué par un comédien d’une stature inférieure à Keitel (imaginez-le interprété par Quentin Tarantino deux secondes… douloureux, hein ?), il ne serait pas crédible et nous sortirait du film.

Au lieu de ça, on a une parenthèse de cool dans un film qui n’en est pourtant pas dénué. Wolfe marque les esprits de manière indélébile, dans un rôle de nettoyeur flamboyant et charismatique, ponctuant sa présence de phrases mémorables.

BADASS LINES : (un paquet) : “That’s thirty minutes away. I’ll be there in ten.”, “I’m Winston Wolfe. I solve problems.”, “Get it straight buster: I’m not here to say please”, “Let’s not start sucking each other’s dicks quite yet.”, “Just because you are a character doesn’t mean that you have character.”, “Now I drive real fucking fast, so keep up.”

 

 

 

97. Capitaine Augier (Michel Constantin)

par David Bianic

FILM : La Valise, de Georges Lautner (1973)

Dix ans après Les Tontons, George Lautner en a vu passer du badass de comique troupier, exploitant avec plus ou moins de bonheur cette veine des gros bras et durs à cuire à grande gueule, dont les gaffes succèdent aux baffes. Alors qu’il a perdu son plus gros argument de vente – Michel Audiard -, Lautner cherche du sang frais pour revigorer ce genre qui n’appartient qu’à lui.

En 1972, un petit jeune du nom de Francis Weber fait sa première apparition au générique de Il était une fois un flic avec Lautner derrière la caméra. Un bon choix de la part du pacha du cinéma d’action français puisque l’année suivante, Veber allait exploser en signant le scénar’ de L’Emmerdeur avec Brel et Ventura. Veber, c’est l’homme des duo, du buddy movie à la française, dont les Pignon et Perrin allaient le poursuivre tout du long de sa carrière.

Mais pour l’instant, en 1973, Veber doit composer avec les usual suspects de la bande à Lautner et se contente des “seconds couteaux” (no offense) que sont Michel Constantin et Jean-Pierre Marielle, éclipsés par la belle Mireille Darc. Veber tente un pari risqué en faisant rire autour de la question de l’état d’Israël, au plus fort de la guerre du Kippour. Si cela ne suffisait pas, le film est empreint d’une mélancolie qui le rend inclassable et la réception sera plutôt décevante pour le faiseur de blockbuster made in France qu’est Lautner.

Après Il était une fois un flic l’année précédente, c’est la seconde fois que Michel Constantin tient un rôle titre et doit prouver qu’il n’est pas qu’une paire de sourcils. Quarante-ans plus tard, difficile ne pas y voir les bases du OSS 117 d’Hazanavicius. Franchouillard au possible, raciste qui s’ignore, petit fonctionnaire de la Grande Muette, ce capitaine Augier est le badass français dans toute sa petitesse. Oui, les badass ne sont pas toujours des héros implacables mon ami, ce sont aussi des ratés parfois, mais en l’occurrence des gentils ratés, touchants et qu’on a envie d’étreindre comme le fait cette Grande Sauterelle de Mireille Darc.

Car Michel Constantin, c’est un profil du cinéma comme on en fait plus. De son vrai nom Constantin Hokhlof (maman polonaise, papa russe), il entrera en apprentissage chez Renault (normal, ses parents s’installent à Billancourt) avant de monter une affaire d’aiguilles pour machines à tricoter, puis de devenir capitaine de l’équipe de France de volley-ball et journaliste sportif à L’Équipe. 

C’est sur les terrains de volley où joue son fils que le réalisateur Jacques Becker remarquera Michel Constantin et lui donnera son premier petit rôle dans Le Trou en 1960. Puis Charles Gérard (l’indécrottable comparse de Bébel dans les films de De Broca) le fera rentrer par la petite porte dans la bande des gros durs du ciné français.

S’il joue un moment les armoires à glaces et la brute au petit QI du haut de son 1m90 pour 95 kg, quelques années plus tard Lautner lui donnera l’occasion de briller davantage pour ses répliques que pour son physique dans Ne nous fâchons pas. Pour la première fois, Constantin donne du corps à son personnage de badass. Il embrassera même une éphémère carrière internationale dans le film de Terence Young (James Bond) De la part des copains aux côtés de Charles Bronson (un film rediffusé hier soir sur la TNT tiens donc).

Dans La Valise, le personnage d’Augier semble à peine un rôle de composition tant il transpire du message qu’a essayé de faire passer Constantin durant toute sa vie : “OK, je suis une grande brute maladroite mais j’ai un cœur en cristal”. Si le film n’exprime pas la quintessence du badass chez lui – pour ça (re)voyez plutôt Les grandes gueules ou Les Morfalous –, il mérite sa place dans ce top 100 pour toute la tendresse que n’ont pas su nous donner les héros de ce palmarès et je remercie le DailyMars de lui accorder ce #97.

Badass-line : “Vous savez ce qu’il vous dit l’abruti ?”

 

98. Mike Hammer (Ralph Meeker)

par David Mikanowski

FILM : En quatrième vitesse, de Robert Aldrich (Kiss me Deadly, 1955)

Nue sous sa gabardine, une jeune femme affolée court, en pleine nuit, au beau milieu d’une route déserte. À bout de souffle, elle manque de se faire écraser par un véhicule. Celui-ci freine brutalement puis dérape sur la chaussée, avant de se stabiliser. À son bord, Mike Hammer, détective de Los Angeles, est en rogne : “Vous avez failli casser ma voiture !”. Il prend toutefois la blonde en stop. Alors qu’une chanson de Nat King Cole défile à la radio, on comprend bientôt qu’elle s’est échappée d’un asile psychiatrique et que des hommes sont à ses trousses. C’est le début des gros ennuis pour le privé… mais aussi celui du générique, qui défile à l’envers à l’écran (ce qui suffit à indiquer que ce film n’est pas destiné à suivre les conventions). Lorsque Christina est assassinée, Hammer est entraîné dans une sombre affaire dont une mystérieuse boîte est la clé…

Avant de mourir, celle-ci avait en tout cas bien cerné le personnage : “Vous n’avez qu’un seul amour vrai et durable : vous-même. (…) Vous êtes de ces hommes qui ne pensent qu’à leurs vêtements, qu’à leur voiture… Je parie que vous faîtes des pompes tous les matins pour entretenir vos abdominaux. (…) Dans une relation, vous êtes le genre à prendre… mais à ne jamais rien donner en retour.” Mike Hammer est en effet un connard, un sale type, un badass sans cœur, incapable de comprendre une situation qui le dépasse complètement. Robert Aldrich n’a d’ailleurs jamais caché le peu d’estime qu’il portait au privé. On sent même un certain mépris du cinéaste pour Mickey Spillane, le père du détective (“C’est un esprit antidémocratique… fasciste.”).

L’intrigue du roman de Spillane tournait autour d’un simple trafic de drogue. Mais le scénariste du film, Albert Isaac Bezzerides, modifie fondamentalement l’intrigue du bouquin (“Le livre n’était rien, nous avons juste gardé le titre et jeté le reste” avoua Aldrich).

Presque entièrement nocturne, ce film aux confins du fantastique baigne d’ailleurs dans un climat de suspicion paranoïaque. Tourné en pleine guerre froide, fin 1954, Kiss me Deadly est en effet beaucoup plus qu’un simple polar. C’est une dénonciation du péril atomique. La mystérieuse boîte à l’origine de toute l’histoire contient en effet… des éléments radioactifs et du plutonium. Ce qui explique la lumière aveuglante et le bruit que l’on entend à chaque fois que l’on ouvre cette fameuse boîte métallique (un son qui est en réalité le mélange d’un moteur d’avion et de cordes vocales humaines).

Dans le magnifique ouvrage 50 ans de cinéma américain, Bertrand Tavernier et Jean-Pierre Coursodon qualifient En quatrième vitesse de “cauchemar étouffant où le personnage principal, en quête d’une clé, ne fait qu’ouvrir une série de boîtes, de coffrets enfermés les uns dans les autres, pour aboutir enfin à la boîte de Pandore qui recèle en l’occurrence une catastrophe nucléaire – peut-être la fin du monde.” Et lorsqu’une femme fatale, poussée par la cupidité, ouvre celle-ci, elle déclenche le feu du ciel et est aussitôt changée en torche vivante.

Tarantino confie : “Les gens pensent que ce film m’a influencé pour Pulp Fiction à cause du mystérieux contenu de l’attaché-case récupéré par John Travolta et Samuel L. Jackson. Mais je ne m’en suis pas rendu compte tout de suite. En revanche, le personnage de Butch joué par Bruce Willis est très inspiré de celui de Mike Hammer dans le film d’Aldrich (…) Butch est, comme lui, un putain d’enfoiré de sa mère.”

Né en 1947, Hammer a eu plusieurs visages à l’écran. Il est apparu sous les traits de Biff Elliot, Robert Bray, Mickey Spillane lui-même (dans Solo pour une blonde, en 1963) et Armand Assante dans une version contemporaine de J’aurai ta peau (I, the Jury, en 1982). Il été aussi popularisé par une série télé dont Stacey Keach est la vedette (même si dès 1954, Brian Keith interprétait le rôle dans un téléfilm de Blake Edwards).

Ralph Meeker est pourtant le meilleur des Hammer dans Kiss me Deadly. Avec sa force brute, ses paluches immenses et son cou de taureau, ce type plein d’assurance envoie des châtaignes à décorner les bœufs (jamais on avait cogné aussi fort dans un film noir !). Il faut voir son sourire sadique quand il écrase la main du médecin légiste de la morgue ou torture un témoin innocent en cassant sa collection de disques rares d’opéra. Un sauvage.

Vu dans Les sentiers de la gloire de Kubrick, Meeker a figuré ensuite parmi Les douze salopards, du même Aldrich et L’affaire Al Capone de Roger Corman.

Grâce à lui, nobody fucks with Mike Hammer !

BADASS LINE : “You Almost Wrecked my Car ! Well… ? Get in !”

 

99. Leo O’Bannion (Albert Finney)

par Sheppard

FILM : Miller’s Crossing, de Joel Coen (1990)

Faut pas faire chier Leo, t’entends ?

3 minutes et 46 secondes. Il aura fallu à Albert Finney 3 minutes et 46 secondes pour s’assurer une place parmi les 100 badass du Daily Mars. 3 minutes et 46 secondes pendant lesquels il va abattre 4 types, brûler une maison et crasher une bagnole qui ensuite va prendre feu. Tout ça en pyjama et sans dire un mot (Albert, pas la bagnole… tsss). S’il vous restait encore quelques doutes sur ce qu’est un badass au cinéma, cette scène de Miller’s Crossing devrait définitivement les combler.

Il faut bien admettre que jusque là, Leo O’Bannion passe pour un vieux caïd amoureux et passablement largué qui donne l’air en plus de s’emmerder copieusement dans sa vie de nabab. Certes on voit bien que le gars est un putain d’irlandais, à savoir fonceur, gueulard, têtu et pas très malin. Mais entre son air de papy sympathique et la mine constamment consternée de son ami et porte flingue Tom Reagan (le génial Gabriel Byrne), on se demande bien comment Leo a pu devenir un seigneur de la pègre.

Là, c’est la guerre.

3 minutes et 46 secondes plus tard, on est fixé. La badasserie d’O’Bannion crève littéralement l’écran. Le papy qui s’emmerdait, revient à la vie. Ses yeux pétillent d’impatience. Comme dirait Terry, un autre porte flingue, « The old man’s still an artist with a Thompson. ». L’artiste parle, s’exprime, exulte, explose, il défouraille, détruit et tue sur l’hymne national de l’irlandais américain, le Danny Boy de Frederic Weatherly. Et alors que la chanson arrive à son finale grandiloquent, Leo sort un cigare à demi fumé de la poche de son peignoir et contemple son œuvre, une Thompson encore fumante entre les mains.

Albert Finney n’en était pas à son premier coup d’éclat. Entre Voyage à deux, Gumshoe, Le crime de l’Orient-Express, Wolfen et surtout le magnifique Au dessous du volcan de John Huston, Finney avait fait preuve d’un talent et d’une versatilité exceptionnelle. Mais en incarnant le rôle de Leo O’Bannion dans le film des frères Coen, il accède définitivement à la notoriété. Et c’est avec une grande fierté qu’aujourd’hui le Daily Mars lui attribue une place méritée parmi les 100 icônes badass de l’histoire du cinéma.


 

100. Francesco Dellamorte (Ruppert Everett)

par David Brami

FILM : Dellamorte Dellamore, de Michele Soavi (1994)

Quoi de plus chiant que d’être dérangé sous la douche par la sonnerie du téléphone, pour
rien qui plus est ? Pire encore, quand vous décrochez le combiné, voici qu’on sonne à la porte.
Concernant Francesco Dellamorte, la sentence est sans appel : pour qui l’emmerde de la sorte, c’est
une balle dans la tête. Surtout quand l’emmerdeur en question est un mort-vivant.

Comédien et ancien assistant réalisateur, entre autres sur certains chefs d’œuvres de Dario
Argento (les classiques Ténèbres, Phénoména et Opera), Michele Soavi assure la relève de
tout un pan du cinéma horrifique transalpin en 1987 avec l’inventif Bloody Bird, un premier
long métrage dans lequel cet indéniable esthète reprend les codes du Giallo en le teintant d’une
fantasmagorique réflexion sur le métier d’acteur. Deux films plus tard, et après avoir œuvré sur Le
Baron de Munchausen de Terry Gilliam, il nous offre Dellamorte Dellamore en 1994, version toute
personnelle du comic book italien Dylan Dog. Œuvre fortement inspirée des classiques de Romero
(au point qu’une des cases du premier tome calque l’affiche de Zombie), celle-ci met en scène un
détective paranormal partant à la chasse aux non-morts avec pour seule fortune son flegme, son
assistant débile et d’irrésistibles clientes qui passent dans son lit avant de trépasser.

Avec un physique remarquablement similaire au héros dessiné, Rupert Everett, clope au bec
et abdos saillants, campe ce personnage devenu croque-mort le temps du métrage, se résignant à
envoyer une seconde fois ad-pâtres des défunts qu’il a déjà mis en bière une première fois. Scouts,
religieuses, groupe de motards, tout le monde y passe. Même la magnifique Anna Falchi dont il
tombera amoureux plus d’une fois, et à qui il donnera la mort plus d’une fois aussi. La première fois
parce qu’il l’aura crue morte, la seconde parce qu’elle se sera foutue de sa gueule. Non, Dellamorte,
faut pas le faire chier. Surtout qu’avec l’habitude, morts ou pas, avec une balle dans la tête,
finalement quelle est la différence ?

Délirant, hanté par une ambiance de fin du monde aussi morbide que poétique, Dellamorte
Dellamore s’impose comme une œuvre unique à la beauté transcendante. En son centre, Rupert livre
sa prestation la plus torturée et la plus subtile, loin des bellâtres classiques et autres poster-boys
qu’il incarnera par la suite. Pour le coup, on adorerait le re-voir endosser sa veste noire et son jean
dans la suite du film, à l’origine prévue pour un tournage début 2012. Si seulement Soavi arrêtait de
tourner pour la tété, ce n’est pas tous les jours qu’ont peut mettre en scène un gars qui, au bout du
rouleau, se paie le luxe de discuter en tête à tête avec la mort. Au figuré comme au propre.

BADASS LINE (en parlant à la mort): “You and I are both the same. We kill out of indifference, out of love sometimes, but never out of hate.”

 

 

Et voilà, les 100 Badass du cinéma c’est fini ! Si vous avez aimé, n’hésitez pas à nous le dire en commentaire, ça fait toujours plaisir 😉

 

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