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A la bonne ère (critique de X-Men : Days Of Future Past, de Bryan Singer)

A la bonne ère (critique de X-Men : Days Of Future Past, de Bryan Singer)

Note de l'auteur

X-Men-Days-of-Future-Past-Affiche-France-FinaleOublions l’atroce The Amazing Spider-Man 2, faisons notre deuil de nos espoirs sur le poussif et gigantesquement frustrant Godzilla… Le premier vrai blockbuster pré-estival à pouvoir se regarder droit dans une glace sans rougir, contre toute attente, est bel et bien ce X-Men Days of Future Past des plus respectable malgré ses imperfections.

Les premiers visuels promo faisaient craindre une direction artistique aux frontières de l’épouvantable et, la déception s’avérant de plus en plus de mise avec le genre super héroïque, on pouvait légitimement redouter un ratage de plus, malgré le retour de Bryan Singer à la réalisation. Malgré aussi un script basé sur l’inoubliable arc dystopique éponyme du comic book, qui traumatisa toute une génération de lecteurs (dont l’ami Jerome Tournadre et bibi) lors de sa parution à l’aube des années 80. Malgré enfin le retour devant la caméra de l’excellent cast du non moins excellent X-Men au commencement, James McAvoy et Michael Fassbender en tête, qui éclipse les “anciens” fingers dans le pif.

Hormis l’essentiel Hugh Jackman, dont le Wolverine reste l’indestructible épine dorsale de toute la franchise X-Men, le casting “old school” (Patrick Stewart, Ian McKellen, Halle Berry, Shawn Ashmore, Famke Jansen…) est effectivement ici réduit, au mieux, au statut de second couteau, au pire à de la figuration parlée. En même temps, quel autre choix possible lorsqu’une quinzaine de mutants à l’écran doivent se partager un métrage d’à peine plus de deux heures ? Bref, les craintes laissent place à l’heureuse surprise : Singer et Simon Kinberg, unique scénariste crédité en tant que tel au générique, rendent une copie ambitieuse et divertissante, tout en maîtrisant à peu près le récit jusqu’à son terme sans trahir la logique uchronique du précédent volet.

xmenDays-of-Future-PastMagnetoDays of Future Past plante son prologue dans ce futur post-apocalyptique où ces saloperies de Sentinelles ont fait de la planète leur terrain de chasse privé anti-mutants. Traqués, parqués et/ou exécutés, coupables de leur seule existence, ces derniers agonisent dans une Manhattan en ruines filmée de nuit, où Singer ose LE plan évocateur des camps d’extermination : des cadavres déversés par dizaines dans une fosse commune. C’est furtif mais rudement gonflé pour une production de cette ampleur classée PG-13. Les X-Men survivants n’ont d’autre choix que de se replier dans un monastère au fin fond de la Mongolie pour fomenter leur plan B : à défaut de pouvoir stopper les Sentinelles dans le présent, il s’agira de le faire dans le passé, en 1973, avec pour objectif précis d’empêcher l’événement déclencheur de la fabrication des robots géants sous l’administration Nixon. Comme dans les trois premiers X-Men, c’est une fois encore Wolverine qui tire le récit et fait progresser l’action : c’est son esprit que Kitty Pride renvoie dans le passé, à l’intérieur de son corps des seventies, pour avertir les mutants du péril à venir*.

Hormis une séquence d’ouverture virtuose fonctionnant sur le même “waouh effect” que celle d’X-Men 2, les premières scènes de “réveil” de Logan en 1973 et son recrutement, façon Sept Mercenaires, de Charles and co pour tuer dans l’œuf le projet Sentinelles offrent au film ses plus belles fulgurances. La reconstitution de l’époque patte d’eph’ est aussi ludique et maligne que celle des sixties dans le précédent volet (nous faire écouter du Claude François dans un X-Men, fallait oser !) et l’implication des mutants dans l’ombre de la grande Histoire tout aussi bien gérée. Infiniment mieux dirigés (et plus compétents ?) que tout le casting du dernier Spidey, les têtes d’affiche McAvoy (totalement touchant en Professeur Xavier brisé), Fassbender (foutrement impérial en Magneto revanchard), Jackman et Lawrence font vraiment exister leurs alter ego respectifs. Sans oublier la très agréable surprise Quicksilver (Evan Peters, parfait), dont on n’est pas prêt d’oublier la démonstration de fun et de morgue dans la bluffante scène d’évasion de Magneto.

XMenquicksilver-days-of-future-pastOn sent le métier de Singer en la matière et son goût nettement plus prononcé pour les enjeux humains que pour le pugilat king size à proprement parler. Filmées à total contre courant des tendances actuelles, à savoir dans un cadre aux mouvements fluides et un montage hyper lisible, les batailles mutants/Sentinelles sont bel et bien là mais lorsque tombe le générique final, un petit sentiment persistant de frustration subsiste. C’était chouette, mais on le compte n’y est pas tout à fait, une petite louche de rab’ n’aurait pas fait de mal. Le climax, malgré l’impressionnante démonstration de force de Magneto, s’avère décevant dans l’usage même qu’il fait des Sentinelles – soudain rétrogradés au stade d’instruments pour la bonne cause que réelle menace flippante à ce point du récit. Toute l’aura destructrice des colosses telle qu’exposée dans le prologue s’en trouve sérieusement amoindrie et l’on réalise alors qu’en quelques pages (que dis-je, quelques cases) – le tandem Byrne/Claremont osait bien plus que Singer et Kinberg dans le pessimisme glaçant. On ne va pas trop faire la moue : Days of Future Past remplit amplement sa mission de divertissement épique et adulte, du moins autant que les contraintes de son genre ne le permettent. Après ce retour gagnant, croisons les doigts pour que Singer ne se rate pas sur le très casse-gueule Apocalypse, annoncé dans la (trop) courte séquence post-générique.

*Dans l’arc originel Days Of Future Past, publié en 1981 dans les numéro 141 et 142 de la revue Uncanny X-Men, c’est l’esprit d’une Kitty Pride adulte qui était renvoyé dans son « moi » du passé par la mutante télépathe Rachel. 

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