
Alfred Enoch à Monte-Carlo : « Murder joue sur une complexité qui rend les personnages intrigants »
Dans Murder, production de Shonda Rhimes actuellement diffusée sur M6, l’acteur britannique Alfred Enoch incarne Wes Gibbins. Il était présent lors du dernier Festival de Télévision de Monte-Carlo où il nous a parlé de la série, de l’approche de son personnage, ainsi que de son passif de petit sorcier dans la célèbre saga Harry Potter. Rencontre avec un jeune homme aimable au doux accent british.
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Comment pensez-vous que le public s’identifie aux personnages de Murder, dans la mesure où ils ne sont pas tous très sympathiques…
ALFRED ENOCH : Peut-être que c’est justement l’une des choses auxquelles les gens peuvent s’identifier ? Je ne suis pas en train de suggérer que les gens ne sont pas tous très sympathiques, mais je dirais que l’une des choses que la série fait très bien c’est d’aller au-delà des premières impressions et de montrer plusieurs facettes des personnages. On vous montre ce qu’il y a derrière leur masque et je pense que c’est ce qui fait qu’on peut s’identifier à eux. Si quelqu’un est totalement sympathique et ne fait jamais rien de mal, est-ce qu’on peut s’y identifier ? Je ne sais pas, ça serait une sorte de personnage saint impossible… Je pense qu’il ne faut pas oublier que sympathique n’est pas la même chose qu’intéressant. Regarder des personnages qui sont très désagréables peut-être tout à fait fascinant. La série joue sur une complexité qui, j’ose espérer, rend les personnages intrigants, et c’est peut-être ce qui attire les téléspectateurs.
Qu’avez-vous à dire pour la défense de Wes, votre personnage ?
A.E. : Je pense qu’il a des principes et qu’il y est dévoué. Il agit par amour et avec intégrité pour protéger quelqu’un qui compte à ses yeux. Il n’est pas juste engagé envers ses principes, il est aussi dévoué aux gens auxquels il est attaché, et je pense que c’est très admirable. Il faut reconnaître que ce qu’il fait est très extrême, mais c’est une réaction instinctive à une situation de vie ou de mort. C’est très facile de simplifier ce qu’il se passe en montrant du doigt ce qu’il a fait – attention spoiler : Wes a tué Sam. Vous pouvez tout réduire à quelque chose de simple mais il y a un contexte : Sam s’apprêtait à tuer Rebecca. La difficulté de la situation est ce qui est intéressant. Encore une fois peut-être que Wes a l’air très attaché à son sens moral, et il a l’air d’être quelqu’un de gentil, mais plus ça va et plus il commet des actes discutables au nom de ces principes et pour défendre Rebecca, et j’aime le fait de le voir ainsi naviguer en eaux troubles.
Wes est très proche d’Annalise (Viola Davis), il semble même avoir une relation mère/fils avec elle vers la fin de la première saison. Comment pensez-vous que cela va évoluer en saison 2 ?
A.E. : Il y a beaucoup de choses dans cette relation. Beaucoup de choses se sont passées entre eux au cours de la première saison et les scénaristes ont sans cesse trouvé le moyen de modifier les bases de leur relation en fonction de ce qu’il se tramait autour d’eux. Annalise est son chef, son professeur, elle est un mentor pour Wes dans ces domaines et aussi dans la manière qu’elle a de le traiter personnellement. Mais il y a aussi une autre facette de leur relation : Annalise est une adversaire et pour une bonne partie de la saison, ses actions sont moralement discutables, et Wes questionne ses agissements d’une manière qu’aucun autre personnage ne le fait. Certains d’entres eux sont très heureux de lui obéir au doigt et à l’œil, et j’aime que Wes ne soit pas comme ça. J’aime qu’il ne la suive pas aveuglement, ce qui est peut-être ironique car on pourrait dire qu’il suit quelqu’un d’autre aveuglement… Mais j’aime cette dualité, ces différentes facettes du personnage. Au fils de la saison 1, les scénaristes ont joué sur le statut de leur rapport. Annalise est le professeur, Wes est l’élève, et puis tout à coup, il a un secret qu’elle ne peut pas se permettre qu’il dévoile : elle a une relation extraconjugale, alors elle doit faire taire Wes. Et plus tard, il lui fait du chantage. Il y a toujours quelque chose qui se trame et à travers tout cela ils se rapprochent que cela soit par le conflit ou parce qu’ils doivent travailler ensemble et passer plus de temps tous les deux qu’avec les autres personnages. Cela finit par créer une sorte d’intimité entre eux, et peut-être y a-t-il d’autres raisons pour lesquelles cette intimité se développe. Les scénaristes ont tant fait évoluer leur rapport dans la saison 1 que je ne doute pas que la saison 2 sera pleine d’événements dramatiques qui viendront mettre de la tension entre eux, comme dans la première saison, et qui les rapprocheront par nécessité ou par affection.
Vous avez grandi sur le plateau d’Harry Potter, comment était-ce ?
A.E. : Il y a quelque chose d’étrange dans cette expérience parce que cela a été quelque chose de très régulier dans ma vie pendant 10 ans, sans pour autant être toute ma vie pendant ces 10 ans. J’avais deux vies très distinctes. On tournait les films pendant un certain temps, à un moment donné, puis je retournais auprès de mes amis à l’école, je faisais mes devoirs et vivais une vie normale. Alors ça n’a pas tout changé ; ce qui était très bien en ce qui concernait ma vie de tous les jours. Mais ça a changé les choses concernant ce que cela m’a permis de faire plus tard. Grâce à cette expérience, j’ai pu avoir un agent, j’ai été à l’université, j’ai pu travailler avec des personnes fantastiques et voir ce que c’était que de travailler sur un plateau de tournage et faire partie de quelque chose qui a eu un impact sur beaucoup de gens. J’ai adoré travailler sur ces films et je me rendais compte, même au jeune âge de 10 ou 11 ans, que ce n’était pas une mince affaire. Tout le monde dans mon école avait lu les livres et vous ne pouviez pas exagérer combien c’était populaire. Pour les autres enfants à mon école, le fait que j’étais dans Harry Potter n’était pas grand chose. Personne n’allait me traiter différemment car c’est arrivé quand j’avais à peu près 11 ans et on avait été à l’école ensemble depuis l’âge de 7 ou 8 ans, et je suis allé dans mon école suivante avec la plupart des mêmes personnes. Alors personne n’allait me traiter différemment sous prétexte que je jouais dans les films. C’était bien d’avoir cette continuité et que cela ne change pas tout dans ma vie, tout en étant exposé et faire partie de quelque chose qui était un véritable cadeau.
Propos recueillis par Marine Pérot lors d’une table ronde au 55ème Festival de Télévision de Monte-Carlo, en présence d’autres journalistes.
How do you think people relate to the show and its characters? Because they are not all very likeable…
ALFRED ENOCH: Maybe that’s one of the things that people can relate to? I’m not suggesting that people are not all very likeable but I’d say one of the things the show does well is it goes beyond the initial impressions and it gives you more to the characters it depicts than one side. It looks at what’s behind that sort of representational mask and I think that something that makes them relatable. Because for someone to be entirely likeable and never do anything wrong, is that relatable? I don’t know, you’d have this sort of impossible saint figure… And I think there is this strange issue about likeability, I don’t think likability is the same as interesting. Watching characters who are very unlikable can be fascinating. The show plays with a complexity which makes hopefully – it does for me- the characters intriguing, and maybe that’s what draws people to it.
What can you say to defend your character?
A.E.: I think he is principled and is committed to his principles. He acts out of love and with integrity to protect someone who matters to him. He is not just committed to his principles, he is committed to people who he cares for as well, and I think that’s very admirable. Admittedly what he does is very extreme, but it’s an instinctive reaction to a life threatening situation. I think it’s very easy to simplify what happens by saying “look what he did” – spoiler alert – Wes killed Sam. You can boil anything down to a simple thing but there is a context: Sam was about to kill Rebecca. The difficulty of it is what I think is interesting, again maybe Wes seems committed to his moral compass and you think he seems like a nice guy but then he starts doing more and more questionable things in defense of those principles and in defence of Rebecca, and I like that muddying of the waters.
Wes is very close to Annalise (Viola Davis), he even seems to have a mother/son relationship with her towards the end of the season. How do you think that could evolve in season 2?
A.E.: There is a lot to it, and there is a lot to it over the course of season one and the writers continuously found ways to shift the basis of that relationship with what was going on. She is his boss, she is his teacher, she is a mentor for him in those fields and also in the way she deals with him personally. And then there is another side of the relationship, she is an adversary, for a large part of the first season, she is morally questionable in her actions, and he asks those questions in a way that I don’t think all the characters do. Some of them are really happy to go along with her, and I think that’s one of the things I really like about Wes. I like that he is not a blind follower, perhaps ironically because some might say he follows someone else very blindly. But again I enjoy that duality, those facets to him. Over the course of the season, the writers played with the status of their relationship. She is the teacher, he is unprepared, and all of a sudden he has a secret, which she can’t afford for him to reveal: she’s having an extramarital affair, so she needs to keep him quiet. Then he blackmails her later on. There are constantly things going on but through it all there are brought closer together whether it is in conflict, or whether they are working together and have to deal with each other a lot more than they have to deal with the other characters. That ultimately starts to create a sort of intimacy, and maybe there are other things around why that intimacy develops and they’ve managed to do so much in season 1 that I don’t doubt that season 2 will have big, dramatic events to deal with that will put their relationship on strain as it were in season 1 and again bring them together out of necessity or maybe out of affection.
How was it to grow up on Harry Potter?
A.E.: There is a strange thing about it because it was such a regular in my life for ten years but it wasn’t my whole life for those ten years, I had two very separate existences. We’d shoot for however much, whenever it was I was a few days out of school or maybe in the summer and then I’d be back in school with my friends, doing my academic work, living a more typical life. So it didn’t change everything, which was really nice, in terms of my day to day life, but it did change things for me in terms of what it made possible for me later. Thanks to that I got an agent, I could finish university, I got to work with fantastic people and see what it was like to be on a set and be part of something which impacted so many people. I loved working on the films and I sort of knew, even precautiously at the age of 10 or 11, that this was going to be a big deal. Everyone in my school had read the books and you couldn’t overstate how big it was. For the children at my school the fact that I was in Harry Potter wasn’t a big deal, no one was going to suddenly start treating me any differently, because this happened when I was about 11 and we’ve been to school together since we’d been 7 or 8, and I went to my next school with a lot of the same people so no one was gonna treat me any different on that account. So it was nice to have that sort of continuity and not to be a big shift in everything, but yet to be exposed to something and be part of something that was a real gift.