Baffe cosmique… (critique de Gravity, d’Alfonso Cuaron)

Baffe cosmique… (critique de Gravity, d’Alfonso Cuaron)

Note de l'auteur

En pleine sortie dans l’espace, deux astronautes (George Clooney et Sandra Bullock) voient leur navette pulvérisée par les débris d’un satellite russe. Coupés de tout contact avec Houston, ils errent dans le vide avec pour seul objectif de trouver au plus vite une solution pour rentrer sur Terre. Magnifique odyssée de l’espace, sans aliens ni métaphysique nébuleuse, Gravity est tout simplement le meilleur film de l’année mais il est surtout bien plus. Un voyage à l’impact émotionnel et visuel sans précédent, une renaissance pour un certain cinéma d’aventure avec un cerveau, des tripes et du coeur. Un blockbuster d’auteur à hauteur d’homme. Merci Mr Cuaron !

Voilà, le jour J est arrivé… ou plutôt le jour G. Ce 23 octobre, pardon pour Luc Besson et son sinistre Malavita, mais l’événement cinéma nous vient de l’espace. Gravity, puisque c’est de ce surnaturel chef-d’oeuvre dont je parle, s’offre enfin aux foules prêtes à planer devant la plus incroyable proposition de cinéma depuis… Les Fils de l’homme tiens ! Son réalisateur Alfonso Cuaron doit lui-même flotter en apesanteur : depuis les premières projections de Gravity aux festivals de Venise et Toronto, une pluie de critiques énamourées balaie les quatre coins du globe. Vous avez dû vous même en lire déjà une palanquée. Vous savez qu’au minimum, Gravity ne vous laissera pas indifférent par son hallucinant voyage visuel, sa fête des sens dynamitant tous nos repères spatiaux en cohérence avec le cadre géographique de son action. Fin août, j’avais moi-même déjà confié lors d’une première missive mon état de choc à la sortie d’un premier visionnage du film.

Gravity, ce survival cosmique à l’échelle humaine, a depuis suscité une littérature tellement dithyrambique et créé l’événement avant même sa sortie qu’il me paraitrait fort présomptueux de vous assomer avec un long pavé décortiquant les mécanismes du génie à l’oeuvre dans ses fabuleuses 90 minutes. Il n’y a plus rien à dire sur Gravity, il n’y a plus qu’à voir. A contempler. A frissonner, s’éblouir, s’angoisser, s’émerveiller devant l’inattendue palette d’émotions que vous fait vivre l’odyssée de l’espace à la Cuaron. Parce qu’effectivement, ce qu’on n’avait pas vu venir même si l’on sait le réalisateur attentif à l’intime, c’est la capacité de Gravity à nous émouvoir aux larmes. Le personnage joué par Sandra Bullock, son destin de lutteuse, son parcours tragique transcendé par ce baptême du feu existentiel, confèrent au film une dimension universelle dévastatrice qui, forcément, touchera l’une de vos cordes pour peu que la vie vous a un peu malmené. J’ai pleuré à la fin de Gravity, submergé par tant de beauté, d’émotions, de rebondissements qui auront violenté sans pitié ma petite zone de confort.

Comme le dit son metteur en scène, Gravity est l’histoire d’une dérive, dans tous les sens du terme, et de notre capacité à l’affronter, la surmonter. Il n’est bien évidemment pas dit que tous les spectateurs se laissent autant happer par l’expérience. Peut-être vous contenterez-vous, comme certains, d’être abasourdi par la prouesse technologique et la tranquille révolution opérée par Cuaron et ses techniciens, magnifiées par une 3D rayant de la carte (presque) toutes les précédentes production sorties à ce jour dans ce format. A ce stade, Gravity ne sera pour vous qu’un terrifiant thriller en apensanteur au réalisme sidérant et ce sera déjà énorme.

Mais au cas où l’intrigue, à la fois humble et puissante, et les performances littéralement stellaires de Clooney et Bullock vous emportent également, alors Gravity sera pour vous la plus inoubliable des aventures. Une oeuvre noble et belle, humaniste et grave, généreuse et riche de mille détails esthétiques, narratifs et formels (avis aux décrypteurs de mise en scène : orgasme d’1h30 non stop en vue !). Un objet visuel non identifié, bientôt décortiqué sous toutes les coutures dans les écoles et universités. Alfonso Cuaron avait déjà livré aux années 2000 une date incontournable de la SF, c’était Les Fils de l’Homme en 2006. En 2013, épaulé par son fils Jonas au scénario et la bienveillance d’un grand studio intelligent (Warner, donc), il récidive avec Gravity et nous révèle ce qu’on n’osait plus espérer : le cinéma hollywoodien bouge encore. Communions ensemble, mes frères. Et planons, donc, très haut.

 

Gravity, d’Alfonso Cuaron. Scénario :  Alfonso Cuaron et Jonas Cuaron. Durée : 91 mn. En salles.

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