Bates Motel, Modern Weirdo Family (bilan de la saison 1)

Bates Motel, Modern Weirdo Family (bilan de la saison 1)

Note de l'auteur

« Tu sais, Norman, les chambres sont vides mais c’est pas grave : on est beaucoup dans nos têtes, toi et moi ».

Avec un pilote réussi, Carlton Cuse et Kerry Ehrin avaient surpris leur petit monde. Allaient-ils réussir leur pari -raconter  l’histoire du jeune Norman Bates (personnage central de Psychose, d’Alfred Hitchcock) alors qu’il vivait avec sa mère ? La vérité, c’est qu’assez vite, le soufflet est méchamment retombé.

Dominique Montay, qui est au Daily Mars ce que Confucius est à philosophie orientale, l’a dit avant moi. Lorsqu’on aime un film, une saga ou une série, le plus sage est souvent de se dire que les préquels n’existent pas.

Avantage numéro 1 : ça vous évite de redoutables prises de tête au moment de vérifier que l’addition du préquel et de l’histoire originale aboutit à un ensemble narratif en tous points cohérents.

Avantage numéro 2 : ça vous épargne de nombreuses désillusions. Du genre nombreuses nombreuses.

« Mais pourquoi j’ai pas pris un hôtel franchisé, hein ? Pourquoi ? POUR-QUOI ??? » (rires entremêlés de larmes)

D’ordinaire, je respecte à la lettre les préceptes de notre Grand Gourou à nous. Et puis voilà: au détour d’un week-end pluvieux, et à la demande des camarades chroniqueurs de Season One, je me suis retrouvé à regarder Bates Motel. Ceci alors que Marine Perot (la meilleure amie de Giancarlo Esposito et David Lyons) vous avait déjà parlé du pilote.

En gros, c’est ce que l’on appelle un visionnage accidentel.

Contre toute attente, la découverte de Bates Motel fut une bonne surprise. Piloté par Carlton Cuse (Nash Bridges, Lost) et Kerry Ehrin (Boston Public, Friday Night Lights), le show raconte l’adolescence du jeune Norman Bates. Bien avant que ce dernier ne devienne l’homme inquiétant au centre de Psychose, mais juste après la mort de son père.

L’argument central de la série ? Raconter quelle relation liait le jeune Norman et Norma, sa mère. Pour donner un relief supplémentaire au personnage d’Alfred Hitchcock. Ce que le pilote parvient à faire efficacement.

« Un-deux, Norma te coupera en deux… » (Vera Farmiga, in la chanson à Freddie -Highmore)

Sans franchement marcher sur les plates-bandes de David Chase dans Les Soprano, Cuse et Ehrin réussissent à poser d’entrée de jeu toute la singularité et la perversité de leurs liens. Mieux : au centre de cet épisode, il y a une scène assez violente qui vient singulièrement questionner le téléspectateur sur la façon dont il se représente le personnage de Norma. C’est bien joué, c’est bien raconté. Et puis surtout, cela donne franchement envie de voir la suite.

Il faut dire aussi que les deux acteurs qui tiennent les rôles principaux sont bien choisis. Vera Farmiga incarne avec brio une Norma tour à tour bienveillante et étouffante. Freddie Highmore possède quant à lui une candeur naturelle indispensable pour interpréter le personnage de Norman.

Oui mais voilà : la suite n’est pas du même tonneau. Soucieux de développer un univers qui ne se limiterait pas à Norma et Norman, Cuse et Ehrin ajoutent toute une série de personnages au fil des épisodes – notamment celui de Dylan, l’autre fils de Norma – et une intrigue impliquant un trafic de prostituées.

Si l’arrivée de Dylan n’est pas une mauvaise idée, force est de reconnaître que les scénaristes sortent sérieusement les rames pour faire que le tout reste dans le droit fil de ce que le pilote donnait à voir. Et cela ne marche pas.

Norman : « Tu sais, frérot, je trouve que tu bouges beaucoup trop. Ça va finir par m’agacer. Je vais te laisser : j’ai taxidermie niveau 1 chez le voisin ».

En voulant donner beaucoup de rythme à leurs intrigues, Cuse et Ehrin font marcher malgré eux la catapulte à rebondissements à une cadence trop élevée. On a parfois l’impression de voir Melrose Bates plus que Bates Motel. Non pas que ce soit forcément une mauvaise chose… mais cela s’inscrit franchement en contradiction avec les prémices de l’histoire. Et cela conduit les acteurs à en faire des tonnes, parfois (n’est-ce pas, Vera Farmiga ?).

C’est dommage, parce que cela rend les dix épisodes de la saison 1 assez longs. Progressivement, on a un peu tendance à se désintéresser de ce qui se passe à l’écran… alors que tous les éléments sont toujours là pour raconter une histoire prenante, complexe et plutôt dérangeante.

Rien n’est cependant définitif : Bates Motel aura effectivement une saison 2 en 2014. Si la série revient au cœur de son propos (l’histoire d’une mère et d’un fils qui va devenir un dangereux psychotique), si elle ne la lâche plus, elle peut inverser la tendance. Sans ça, c’est sans doute le public qui la lâchera. Définitivement.

 BATES MOTEL

Saison 1 (Arts & Entertainment)
Créée par Anthony Cipriano ; showrunnée par Carlton Cuse et Kerry Ehrin

Avec Vera Farmiga (Norma Bates), Freddie Highmore (Norman Bates), Max Thieriot (Dylan Massett), Olivia Cooke (Emma Decody), Nicola Peltz (Bradley Martin), Nestor Carbonell (sheriff Alex Romero), Mike Vogel (Zach Shelby) et Keegan Connor Tracy (Miss Watson).

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