L’importance du Choix (Bull / CBS)

L’importance du Choix (Bull / CBS)

Note de l'auteur

CBS dégaine son premier procedural de la rentrée avec Bull, croisement de Perry Mason et Lie to Me. Si le pilote pose sa formule de façon classique, entre les lignes, il reflète bien son époque.

© Patrick Harbron/CBS

© Patrick Harbron/CBS

Des upfronts à la rentrée, nous sommes tous un peu le Dr Jason Bull. Les bandes-annonces sont placées devant nous sur le banc du jury et nous devons les lire, les décoder, afin de faire notre choix parce qu’aujourd’hui, il est devenu difficile sinon impossible de tout voir. Nous devons faire preuve d’une lecture quasi divinatoire, du teaser au pilote, pour décrypter l’intérêt (avec le risque de se planter copieusement, c’est l’amour du risque qui nous pousse à recommencer). Bull devient une relecture de la rentrée : la précarité liée à l’anticipation jusqu’à la sélection même des séries. Le psychologue, émanation de Phil McGraw (légendaire Dr Phil à la télévision américaine) s’est spécialisé dans la sélection de jurys. Avec une équipe (aka des critiques séries) et des moyens colossaux (aka algorithmes), il est ainsi capable de prédire les orientations des différents membres et s’organiser pour les faire changer d’avis. Il y a, dans la construction même de la série, un regard sur l’industrie de la télévision à l’heure de la Peak TV (croissance exponentielle de la production) et de la philosophie de Netflix (une volonté de prédire/définir le goût des abonnés).

Il n’y a rien de surprenant dans ce premier épisode. Michael Weatherly poursuit sa partition post-Remington Steel qu’il jouait déjà dans NCIS, dans une version plus psychologisante ; la formule est carrée, s’écrit toute seule jusque dans ses rebondissements ou révélations. Stigmate de ces séries américaines, incapables de laisser un récit en suspens ou un crime impuni, la résolution ne vient pas seulement de la mission de Bull (gagner le procès) mais de la découverte du vrai tueur (on attend de voir s’il défendra des coupables). Mix de Lie to Me et Perry Mason, la série se love dans une formule rassurante qu’il pourrait être intéressant de voir s’enrayer.

©CBS

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Bull montre combien l’époque a basculé. Si la décennie 2000/2010 a révélé l’hégémonie de la science avec CSI, la suite a indiqué une tendance à l’exploitation psychologique. Si l’on a eu besoin de comprendre comment le monde fonctionnait (la science), aujourd’hui, c’est l’Homme que l’on souhaite saisir dans toute sa complexité. Cela passe par des psy-sonnages, lecteur de l’être humain (descendance de Sherlock Holmes) aux propriétés souvent exceptionnelles et à la rhétorique foisonnante. Un peu agaçant, insolent, hautain, mais animé d’un bon fond. Une déclinaison déjà bien entamée avant Bull, qui semble arriver à la fin de son règne.

Créé par Paul Attanasio et Phil McGraw
Réalisé par Rodrigo Garcia
Avec : Michael Weatherly (Dr Jason Bull), Freddy Rodriguez (Benny Colón), Geneva Carr (Marrisa Morgan), Chris Jackson (Chunk Palmer), Jaime Lee Kirchner (Danny James), Annabelle Attanasio (Cable McCrory)…

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