
Ces Disques Dont On Ne Peut Pas se Débarrasser : Feelies, Crazy Rhythms
On aurait tort de se fier à la seule pochette ni rock’n’roll ni glamour qui présente quatre types, l’allure de ce qu’on appellerait aujourd’hui des nerds. Ils n’occupent qu’un tiers du fond bleu, en bas forcément, comme s’ils s’excusaient un peu d’être là et refusaient de tirer la couverture à eux. On aurait tort, car Crazy Rhythms, le premier album des Feelies, sorti en 1980, est une improbable merveille, hors des modes. Et on se félicite presque de cette pochette redoutablement discrète qui donne encore plus l’impression d’avoir affaire à un trésor caché, un secret d’initié qu’on se passerait sous le manteau, trop fragile pour être exposé brutalement au grand jour.
Le groupe tente encore de se dérober sur le premier morceau qui commence par un son à peine perceptible (des gouttes d’eau qui tombent) avant de gagner en volume et en intensité. Tout le long du disque les Feelies ménagent des plages de silence anormalement longues entre certains morceaux ou varient sans raison apparente le volume.
Et quels morceaux ! Ces Américains jouent un rock mélodique et fiévreux qui n’obéit qu’à ses propres règles et semble s’emballer malgré eux. Formé dans le New Jersey, influencé par le Velvet Underground, le groupe arrive sur ce premier album à jouer une musique à la fois contenue et intense. Les instruments et la voix s’emboîtent parfaitement sur ce disque sans âge.
Et la timidité apparente des Feelies ne les empêchent pas de s’attaquer aux sacro-saints Beatles en reprenant Everybody’s got something to hide except Me and my Monkey, certtes pas le morceau le plus connu des Liverpuldiens, à défaut d’être leur titre le plus bref. Titre qui paraît cependant anecdotique comparé au reste. Et comme pour équilibrer la balance, certaines rééditions de Crazy Rhythms comprennent une version réussie et vibrante du Paint it black des Rolling Stones.
Pour l’anecdote, crédité comme les Willies, le groupe apparaît dans le film Something Wild de Jonathan Demme (Dangereuse sous tous rapports en VF) dans le rôle d’un groupe de lycée, au cours d’une fête d’anciens étudiants. Oui, Melanie Griffith et Jeff Daniels ont dansé sur les Feelies !