Cinéma : le Top 10 2015 de Philippe Guedj
Année riche en déceptions blockbusteriennes et en bonnes surprises venues de nulle part, avec au milieu quelques valeurs sûres. Pas de Mad Max dans mon Top 10 2015, mais c’est promis j’ai bien aimé le film, pas taper !
1) SICARIO, de Denis Villeneuve
La guerre perdue, parce que truquée d’avance, contre les sanguinaires cartels de drogue mexicains : Sicario aurait pu être l’adaptation d’un roman génial de Don Winslow, mais il s’agit d’un premier scénario original signé de l’acteur Taylor Sheridan (Hale dans Sons of Anarchy). À l’heure où la plupart des fusillades à Hollywood se sont transformées en bataille de pistolets à bouchon, Sicario impose un style brut, sec, impitoyable. Même s’il ne tient pas toutes les promesses de son hallucinante première heure (et sa plus encore hallucinante ouverture), voilà sans conteste le meilleur polar de l’année. Magnifique photo de Roger Deakins, mais foin de pléonasme. Hâte de découvrir le futur Blade Runner 2 que nous prépare Villeneuve.
2) LE PONT DES ESPIONS, de Steven Spielberg
Tom Hanks en super avocat chargé d’assurer la défense d’un espion à la solde de l’URSS, dans une Amérique en pleine guerre froide. J’y allais plutôt à reculons, la curiosité tout de même piquée par la review dithyrambique du Docteur No. Et peu à peu, le récit ultra classique des frères Coen, mis en image avec la surnaturelle maîtrise tranquille de Spielberg, finit par vous happer, vous immerger par son sens du détail et ses enjeux humains. Jusqu’à ce que, lors du climax du film, une réplique a priori anodine et répétée une seconde fois vous arrache les larmes et vous serre la gorge sans crier gare par son humanisme et son courage. Quel très, très beau film.
3) IT FOLLOWS, de David Robert Mitchell
Les claques en provenance du cinéma fantastique sont devenues rarissimes. It follows en est une et, derrière l’apparence du classicisme eighties/carpenterien, offre une vraie proposition nouvelle, dans le fond comme la forme. Ponctuellement terrifiant, It Follows irradie d’une thématique aux répercussions vertigineuses.
4) BIRDMAN, d’Alejandro González Iñárritu
À la fois totalement divertissant et formellement étourdissant, ce chemin maudit d’une ex-star de films de super-héros m’a retourné comme une crêpe. La charge d’Iñárittu contre l’évolution artistique d’Hollywood a dû faire pas mal siffler les oreilles de Marvel.
5) VICE-VERSA, de Pete Docter et Ronnie del Carmen
Un seul nom pour résumer la cascade d’émotions qui vous secoue sans ménagement au fil de cet incroyable récit psychanalytique et ludique : Bing Bong.
6) HACKER, de Michael Mann
Injustement moqué, lancé sans motivation par Universal, Black Hat enfonce de très loin toute la production actuelle de films d’action. Les archétypes de Mann et sa maîtrise intacte de l’art des fusillades sont tous au rendez-vous et c’est magnifique.
7) RÉALITÉ, de Quentin Dupieux
Cauchemar en boucle entre Polanski et La Quatrième Dimension. J’ai rien compris mais j’ai adoré ! Fascinante Spike Jonzerie frenchie ! Alain Chabat parfait en aspirant réalisateur de film d’horreur crétin. Kubrick mes couilles !
8) MAGGIE, de Henry Hobson
Fuyez comme la peste les inconscients qui parlent d’ennui à propos de ce grand film sur l’amour filial déguisé en film de zombie. Pour la première fois de sa carrière, Schwarzenegger, transfiguré, est totalement crédible dans un rôle dramatique.
9) L’AFFAIRE SK1, de Frédéric Tellier
Carré, immersif, tenu jusqu’au bout : jamais pris en défaut de crédibilité, ce récit palpitant de la traque du tueur en série Guy George lave l’honneur du polar français souillé par tant de nanars boursouflés ou de pensum auteurisants chiants.
10) SHAUN LE MOUTON, de Mark Burton et Richard Starzak
L’autre grand film d’animation de l’année. Drôle, tendre et fin, mais tellement fin ! Total feel good movie avec banane garantie au générique de fin.
