
Cleverman, en pleine mutation (Séries Mania)
Du 15 au 24 avril se déroule la septième saison de Séries Mania à Paris, et comme chaque année, le Daily Mars vous offre une couverture du festival. Au programme, critiques, bilans de conférences et autres surprises…
Dans un futur proche, des mutants tentent de survivre dans une Australie qui les ostracise. Traqués, exploités, voire tués par les humains, ils n’ont d’autre option que de vivre cachés. Deux frères ennemis vont lutter ensemble contre l’oppression.
Des séries vont puiser dans le passé pour révéler notre présent. D’autres chercheront dans l’anticipation. Associé au pouvoir allégorique du fantastique, Cleverman est un véhicule chargé. Chargé d’un message universel lourd sur l’intégration, la discrimination, la différence. Et la série de se heurter à une déclinaison scolaire de ses thèmes. Dans la lignée des True Blood ou The Walking Dead qui imaginent ses créatures fantastiques comme les symboles d’une humanité en proie à sa multiplicité, les mutants jouent les archétypes un peu faciles bien que tout à fait pertinents.
À l’image d’un Romero dont les variations autour de la figure du zombie déplaceront le curseur des idées, les deux premiers épisodes de Cleverman écartèleront celle du mutant. On assiste à une cartographie du génome de la discrimination comme autant de storylines à l’agencement parfois problématique. Le montage doit jongler avec de (trop) nombreux personnages aux enjeux (trop) nombreux pour conserver une bonne visibilité et ne pas assommer sa progression. Se prenant les pieds dans un tapis décousu, la série s’écrase un peu sous l’effort.
Tout comme X-Men ou les films de Romero, Cleverman se sent investi d’une mission : celle de produire une réflexion (ou un message) dans un contexte mondial de plus en plus soumis à ses pulsions individualistes. La peur de l’autre est parfaitement illustrée et fait écho à une actualité sinistre, qui touche aussi l’Australie et dont la série se fait soudainement l’accusatrice. Le geste n’est pas toujours très fin mais salutaire dans un pays où la question aborigène souffre encore d’un manque de visibilité.
Cleverman reste intelligente dans sa façon de proposer une dystopie proche, mais son côté gloubi-boulga rendra sa digestion difficile, accusant une trop grande richesse, jusqu’au sacrifice de scènes importantes et amputées de leur climax. La série s’avère suffisamment séduisante pour pousser à la curiosité en espérant voir converger les fils narratifs pour plus de simplicité.