
#Concert : Whiskey Myers – Les Étoiles (Paris) – 31/05/2017
C’est l’histoire d’un journaliste ravi à l’idée d’aller applaudir l’une de ses découvertes récentes qui assure la première partie d’un autre groupe dont il a vaguement entendu parler à une ou deux reprises, et qui apprend au moment de rentrer dans la salle que le groupe qu’il est venu voir ne sera pas au rendez-vous… Déception en perspective ? Bien au contraire.
Mais c’est quand même dommage, avouons-le. Voir Buffalo Summer (dont nous vous avions déjà parlé ici) sur scène m’enthousiasmait au plus haut point ! Leur dernier album Second Sun ne quitte pas ma platine depuis presque un an et le fait que ces jeunes gallois soient plus que sympathiques et prompts à faire la fête présageait une soirée mémorable même s’il y a de fortes chances qu’une partie de nos souvenirs se soient envolés le matin venu !

John Jeffers & Cody Tate
Malheureusement, le van de nos p’tits gars ayant rendu l’âme sur la route qui les menait vers Paris (grand classique du groupe qui se fait encore les dents), la tête d’affiche Whiskey Myers va devoir assurer la totalité du spectacle ! Certes, la quasi totalité du public étant déjà acquis à leur cause, le challenge est loin d’être insurmontable mais pour l’auteur de ces lignes qui se trouve dans la salle pour une autre raison, tout le travail reste à faire !
Petite présentation des lascars pour commencer, Whiskey Myers nous arrive de Palestine au… Texas ! Histoire classique de la bande de copains qui se découvrent des goûts musicaux communs (en l’occurrence ici, Lynyrd Skynyrd et les Rolling Stones), empoignent des instruments sans toujours savoir très bien les utiliser et jouent, jouent et jouent encore. Quatre albums plus tard (dont les excellents Firewater (2015) et le petit dernier Mud (2016)), et voici nos texans armés d’un répertoire conséquent et d’une indiscutable maturité.
Maturité qui se ressent sur scène dès les premières mesures de On the River… Mélange subtil d’une country music ultra traditionnelle et d’un blues méchamment aiguisé, la musique de Whiskey Myers est carrée, tout comme le groupe qui est parfaitement en place. Suit Mud qui donne son nom au dernier album du groupe et qui oublie sciemment ses racines country pour plonger dans la boue collante du blues du Delta (du Mississippi forcément) avec une lourdeur évoquant Led Zeppelin période When the Levee Breaks… Votre serviteur commence à se dire que, finalement, la soirée ne s’annonce pas trop mal.
La voix de Cody Cannon plonge encore plus profond dans les méandres de la musique du diable sur l’hypnotique Early Morning Shakes avant de nous asséner le premier coup bas de la soirée, Broken Window Serenade. Des ballades agrémentées d’un harmonica déchirant, on connaît, Dylan a inventé le concept, Springsteen l’a sublimé mais force est de constater que cette histoire de déchéance et de derniers adieux n’est pas loin d’instaurer un nouveau modèle du genre.
Des ballades, il y en aura d’autres par ailleurs, la splendide Virginia hantée par une remarquable performance au bottleneck du guitariste John Jeffers, Ballad of a Southern Man ou encore Lonely East Tx Nights qui donne envie de bouffer du ruban sur une highway traversant l’est du Lone Star State, région dont sont originaire nos cinq garçons.
Mais l’exercice dans lequel ils excellent par-dessus tout, c’est bien le rock sudiste débridé à tendance Red Dirt (branche du genre proche du country rock) avec des titres comme Home ou Different Mold propices aux improvisations du guitariste Cody Tate, sorte d’homme des bois hirsute échappé d’une communauté hippie restée bloquée dans les années 60, peut-être un fils illégitime du révérend Billy Gibbons (ZZ Top) qui sait ? Après tout le bonhomme est texan lui aussi !
Au final, si l’on excepte une reprise un peu hasardeuse du Seven Nation Army des White Stripes, Whiskey Myers réalise un sans faute et m’a presque fait oublier pourquoi j’étais venu au départ ! Et les mecs sont tellement jeunes… Ça promet de sacrées belles surprises pour l’avenir ! En revanche, délicieux anachronisme, leur musique est assez rare sur les plateformes de téléchargement légal, il vous faudra donc faire l’effort d’une visite chez votre disquaire préféré pour en profiter. Qui a dit que c’était un défaut ? Certainement pas moi.