
Coupés au montage : six victimes célèbres
Quoi ? Qu’entends je ? Danny DeVito a été coupé au montage final de Tintin ? Pleure pas Danny, t’es pas le seul… Petite liste totalement non exhaustive parmi les plus célèbres cas d’acteurs-fantômes dont le souvenir hante ces films qui les ont effacé sans pitié de leur métrage exploité en salles. En ce jour des morts (bouhhouuu), quoi de plus sain que de se pencher sur les trépassés de la cutting room ?
KEVIN COSTNER dans Les Copains d’abord de Lawrence Kasdan (The Big Chill, 1983)
Dans ce « film de potes » séminal et mille fois plagié pour le meilleur (Mes meilleurs copains) ou pour le pire (Les Petits Mouchoirs), Kevin Costner, alors à l’aube de sa carrière, incarnait Alex, le petit ami suicidé de Chloe (Meg Tilly). Dans le scénario, sa mort est à l’origine de la réunion de ses anciens camarades d’université, le temps d’un week end, dans la maison de Harold (Kevin Kline) et Sarah (Glenn Close). Alex intervenait sous forme de flashes back, censés nous en dire plus sur sa personnalité et les raisons de son suicide. Kevin Costner tourna bel et bien ces scènes. Mais une fois dans la salle de montage, le réalisateur Lawrence Kasdan dû se résoudre à couper les apparitions de l’acteur – importantes mais pas indispensables – pour maintenir le film sous les 120 minutes. Seul un bout de Kevin apparaît dans la version finale – son cadavre lors des funérailles au début de l’histoire. Dépité, Kasdan tint a prévenir lui même au téléphone Costner qui, malgré sa déception, n’accabla pas non plus son metteur en scène visiblement très embarrassé. Lawrence Kasdan promit à Kevin Costner qu’il ferait tout pour se faire pardonner un jour. Un an plus tard, il tint parole en lui offrant l’un des rôles principaux du western Silverado. Le carton du film, à l’été 1985, remis le genre en selle et, accessoirement, contribua à faire définitivement remarquer le talent de Costner.
MICHAEL BIEHN dans Terminator 2, de James Cameron (1991)
Chéri de ces geeks par excellence, Michael Biehn avait repris son rôle culte de Kyle Reese le temps d’une scène de rêve de Sarah Connor (Linda Hamilton), alors sous l’emprise de sédatifs lors de son internement. Reese, looké à 100% comme dans le 1er Terminator, vient secouer les puces de sa Sarah d’amour pour qu’elle sauve leur fils John, tout seul dehors à la merci du vilain T1000. Contraint de virer une bonne quinzaine de minutes de métrage pour satisfaire le studio Carolco, Cameron sacrifia un paquet de scènes de T2… dont ce retour onirique de Reese, absent de la version salles sortie en 1991. Pas de panique : les fans de Michael Biehn retrouvèrent leur héros dans le « director’s cut » proposé en DVD dés 2003 et sur les éditions suivantes de T2.
GARY OLDMAN, VIGGO MORTENSEN, LUKAS HAAS, MICKEY ROURKE, BILL PULLMAN, MARTIN SHEEN et BILLY BOB THORNTON dans La Ligne rouge, de Terrence Malick (The Thin Red Line, 1998)
Whoa ! En voilà un beau massacre ! Initialement envisagé (et monté) comme une fresque de plus de cinq heures, La Ligne Rouge fut évidemment contraint par Fox de revenir à une durée plus raisonnable en salles. Un paquet d’acteurs en firent les frais, dont les noms cités plus haut. Faut vraiment s’appeler Malick pour se permettre une telle hécatombe ! Le réal’ a promis que leur performance serait un jour réintégrée dans un montage director’s cut. On risque d’attendre un peu…
MAGGIE CHEUNG dans Inglourious Basterds, de Quentin Tarantino (2009)
Pas de chance pour Maggie, dont Tarantino coupa toutes les scènes dans le rôle d’Ada Mimieux, propriétaire du cinéma Le Gamaar où viennent se cacher des Juifs. La raison officielle est toujours la même : le film était jugé trop long (2h48) et, pour sa présentation à Cannes, il fut ramené à une durée de 2h28. On avance aussi une raison diplomatique à ce coup de ciseaux : Tarantino aurait voulu ménager la susceptibilité d’Isabelle Huppert, alors présidente du jury du festival de Cannes 2009, qui avait auditionné sans succès pour jouer Ada Mimieux.
ANDY GARCIA dans Esprits Rebelles, de John N. Smith (Dangerous Minds, 1995)
Il est fort Andy ! L’année dernière, il confiait au site BlogTalkRadio.com avoir lui-même plaidé pour son éviction du montage définitif d’Esprits rebelles, le laborieux thriller psychologique en milieu scolaire produit par Brukheimer avec Michelle Pfeiffer en ex-Marine reconvertie en prof. Le personnage d’Andy Garcia, absent du script initial, avait pour seule fonction de servir de mari à Louanne Johnson (Pfeiffer). Le studio souhaitait voir un peu de douceur dans le monde de brutes traversé au quotidien par l’héroïne anti-dealers (ha ha !). Garcia : « On m’a appelé pour me dire qu’il fallait que le personnage de Pfeiffer ait une relation sentimentale. J’ai lu le script et j’ai répondu « Je trouve que ce n’est pas indispendable, mais si vous avez besoin de moi, je suis présent. Ils ont donc écrit tout un arc sur cette relation, on a tourné les scènes, tout s’est bien passé. Et plus tard ils ont finalement compris que ces scènes n’étaient pas nécessaires. C’est exactement ce que je leur avais dit au début. Mais tant pis, j’ai quand même pris le chèque ! ».
Mick Jagger dans Fitzcarraldo, de Werner Herzog (1982)
Météo capricieuse, production houleuse, acteur principal malade… Dans la longue et passionnante tradition des tournages maudits, celui de Fitzcarraldo en Amérique du Sud occupe sans conteste une place de choix. Mais le point de non-retour faillit bien être atteint lorsque Jason Robards, dans le rôle de Brian Sweeney Fitzgerald tomba gravement malade alors que le réalisateur n’avait même pas achevé la moitié de ses prises de vue. Rappatrié aux Etats-Unis pour cause de dysenterie, le comédien ne revint jamais. Herzog appela donc à la rescousse son vieux pote cintré Klaus Kinski pour remplacer Robards. L’autre ennui majeur, c’est qu’en raison du retard pris par le tournage, Mick Jagger, co-star de Robards, dû lui aussi se retirer pour honorer une tournée de concerts des Stones. Herzog décida alors de virer entièrement ses scènes du montage et repris tout à zéro avec Kinski dans le rôle principal et plus de Jagger du tout !
Les exemples tout aussi connus de Eric Stoltz dans Retour vers le futur et Harvey Keitel dans Apocalypse Now ne sont pas inclus dans cette mini-liste dans la mesure où il s’agit là d’un autre cas de figure : celui d’un acteur remplacé par un autre suite au désir du réalisateur (Stoltz fut remplacé par Michael J. Fox et Harvey Keitel par Martin Sheen). Pour le reste, si ce post vous rappelle d’autres cas ayant échappé à mon extraordinaire sagacité, vos commentaires sont les bienvenus !
super post vraiment passionnant! Bon je sens que je vais me faire pourrir mais pas d’accord du tout pour le jugement sur Les petits mouchoirs mais j’assume totalement et par contre ravi de constater le satisfecit donné à Mes meilleurs copains qui avec The Big Chill, sont dans mon panthéon personnel et presque tout en haut:-) Sinon, Andy Garcia dans Esprits Rebelles, j’avoue qu’heureusement pour lui il a échappé à ça:-)
Dans la lignée de Thin Red Line, il y a aussi September de Woody Allen. Allen est connu pour être un perfectionniste du cast, mais là c’est carrément toute l’équipe qu’il a viré pour refaire le film avec d’autres acteurs. Dans le premier casting il y avait Christopher Walken, Sam Shepard, Charles Durning et Maureen O’Sullivan.
Et bien sûr Harrison Ford dans Apocalypse Now, qui, même si on entend sa voix, n’apparaît pas une seule fois à l’écran dans le montage original. Coppola y a remédié dans la version Redux.
Alors sans vouloir oser contredire votre sainte autorité cher Sheppard, il me semble bien qu’on voit bel et bien Harrison Ford dans la version salles d’Apocalypse Now. J’en suis même sûr à 100%, pour avoir revu le film récemment sur le blu-ray dans cette version-là (chui pas fan de la redux). Et je te confirme que Ford est bien là, en chair et en os, tout jeûnot et timidounet, même si c’est une apparition fugace.
il me semblait qu’on ne le voyait que de dos… je vérifierais sur ma vhs (j’me méfie des « versions originales » sur blu-ray) 😉
Effectivement il apparaît bien au début du film lors de l’affectation de la mission. Ceci dit je n’ai vu qu’une version uncut de 5h30, qui ne devait pas être la version d’origine en salle… si?
Sinon David Lynch s’est lui-même coupé au montage de Lost Highway, il jouait le réceptionniste de la morgue.
Be seeing you,
Mentine
non la version d’origine faisait 12h30 mais elle a été coupée au montage.
Haaaagh j’ai horreur de me tromper sur les chiffres. Après vérification j’ai vu la redux qui dure 3h20… et où on voit Han Solo.
Be seeing you,
Mentine
Aaah Eric Stoltz. Lorsqu’il a tourné « Some Kind of Wonderful » il faisait à mon avis partie des hommes les plus beaux du monde (mais j’ai une amie qui le trouve très vilain, comme quoi tous les goûts sont dans la nature).
Sinon, j’ose à peine l’avouer mais j’adore « Dangerous Minds » 😀 Ça a été un de mes films culte de, disons, 10 à 13 ans. Aujourd’hui même sans l’avoir revu j’en vois bien clairement tous les défauts, mais je me souviens aussi de ce que j’aimais. Le concours Dylan Dylan putain <3
Et puis "on a toujours le choix", aussi, c'est un cliché mais ça n'en reste pas moins vrai.
petite rectification harvey keitel n’a pas été coupé au montage d’apocalipse now, il a été viré du tournage au bout de quelques jours….Et remplacé par Sheen
Pour ce qui est d’Harrison Ford dans Apocalypse Now, on le voit bien dans la version cinéma… et pas de dos ! Pas un grand rôle certes, mais il est bien là dans la fameuse scène d’affectation du début du film, avec sa coupe militaire bien dégagé derrière les oreilles, ses binocles, et on voit même son grade et son nom sur son uniforme : Colonel (ou commandant, je ne sais plus…) Lucas 🙂
Il a fait un cameo dans E.T. qui a été coupé au montage. Il jouait le directeur de l’école d’Elliott et je pense que c’est dans ce film ou on ne le voyait que de dos…
Sinon, merci pour cet excellent article et longue vie au blog John Plissken of Mars !!