Crisis in Six Scenes – Woody à l’ouest

Crisis in Six Scenes – Woody à l’ouest

Note de l'auteur

Woody Allen écrit, tourne et monte ses films dans un système de rotation infernal qui lui permet de livrer une œuvre par an, comme le bon artisan qu’il est, en pleine possession de son art. Plus ou moins inspiré, la matière doit sortir, pour sa santé mentale, et aujourd’hui pour la nôtre, pauvres fans conditionnés par ce rythme réconfortant, ce marronnier de cinéphages. Nouveauté 2016, Woody Allen se prête au format sériel pour Amazon, enfin, c’est ce qui nous est vendu officiellement, quand on découvre plutôt un film découpé en six tranches d’une vingtaine de longues minutes chacune. 

Alors, on sait bien que, malgré le succès critique, les financements ne se bousculent pas outre-Atlantique, de sorte que le réalisateur saisit toutes les perches, tendues par ses admirateurs, surtout en Europe, pour réunir les crédits nécessaires à l’alimentation de son addiction au travail. Paris, Barcelone… les grandes métropoles veulent se la jouer New York le temps d’un film et rivalisent de subventions pour s’offrir le prestige et l’écrin éternel signé Allen.
Aujourd’hui, c’est le service Premium d’Amazon qui s’enrichit de cette toute première production allenienne pour son service de vidéo à la demande, Prime, bientôt disponible en France.

Eigil Bryld (dir. photo) et W. Allen. Par Jessica Miglio ©2016 Amazon Studios LLC

Eigil Bryld (directeur photo) et W. Allen sur le tournage. Par Jessica Miglio ©2016 Amazon Studios LLC

Crisis in six scenes est une comédie qui se déroule pendant les années 60, à l’époque de la guerre du Vietnam et des diverses manifestations aux États-Unis, au sein d’une famille d’américains moyens qui voit son quotidien chamboulé par l’arrivée d’une invité surprise.
Allen nous sert une de ses recettes habituelles : un casting épatant plus une ou deux vedettes inattendues ou bankable – ici, lui-même, Miley Cyrus et Gad Elmaleh en guest – une photo somptueuse, du jazz, des longues parlottes, une situation incongrue… mais c’est tellement long à prendre. Les mauvaises langues et détracteurs du réalisateur dit « intello » souffleront que c’est souvent le cas, ignorant que les conclusions de Woody se méritent. Ses comédies sont comme des parties de Jenga. Elles se construisent bloc par bloc avec une efficacité rarement prise en défaut, mais de manière parfois un peu monotone. Puis vient la phase finale, quand il s’agit de déplacer les bûchettes de bois, jusqu’à la chute, au chaos jubilatoire.

Quand cette construction fonctionne parfaitement sur un long métrage, il en va autrement pour une série, qui nécessite relances et suspens. Or, rien de tout ça. Il s’agit ni plus ni moins que d’un film à part entière, proposé en six parties, sous le terme galvaudé d’anthologie. De sorte que les quatre premiers épisodes refroidissent la fangirl de base – moi, en l’occurrence – au point même de délaisser la série et d’envisager une critique titrée « crise en six siestes ». Mais voilà, les deux derniers épisodes sont des morceaux de choix et le climax, un moment de pur bonheur burlesque, appuyé par un hommage direct aux Marx Brothers.

Un soupçon de Escrocs, mais pas trop, une touche de Tout le monde dit I Love You sans les chants, Crisis in six scenes n’a rien de vraiment original, ni d’une série. Mais ennui ou non, l’effort est toujours récompensé par une réplique, une photo et une bande originale jamais décevantes.

Crisis in Six Scenes – Anthologie en six épisodes
Série écrite et réalisée par : Woody Allen
Pour : Amazon
Avec : Woody Allen, Miley Cyrus, Elaine May, Rachel Brosnahan, Gad Elmaleh,…

Visuel : Rob Kim/Getty Images pour Amazon

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