#Critique : Barry Seal, American Traffic

#Critique : Barry Seal, American Traffic

Note de l'auteur

Un pilote de ligne cool et cynique se fait recruter à la fois par la CIA et le narcotrafiquant Pablo Escobar. Inspirée d’une histoire vraie, une satire hilarante, avec un excellent Tom Cruise.

 

 

Depuis quand Tom Cruise n’a-t-il pas tourné dans un bon film ? 10, 15 ans ? De fait, après La Guerre des mondes de Steven Spielberg en 2005, la tête de gondole de la Scientologie a enchaîné les grosses machines décérébrées, les trucs médiocres où il peut se jeter d’un immeuble, piloter une moto, montrer ses pectoraux. Des titres ? Knight and Day, La Momie, des Mission : impossible en veux-tu en voilà, Oblivion… Pas grand-chose à voir avec le cinéma. Acteur intéressant quand il accepte d’être dirigé par Stanley Kubrick (Eyes Wide Shut), Oliver Stone (Né un 4 juillet) ou Paul Thomas Anderson (Magnolia), Tom, qui est également producteur, ne semble plus vouloir tourner qu’avec des yes men, cinéastes interchangeables, sans grande envergure (qui connaît le nom du réal de La Momie ?) qui acceptent ses diktats. Ce qui donne des films consternants de bêtise avec un Tom en roue libre, qui affiche son air content de lui, son torse glabre et ses muscles saillants (on imagine qu’il a fait 50 pompes avant la prise pour avoir ses biceps en fusion), sous son meilleur profil, avec sa belle gueule botoxée. Tom, clone (clown) de lui-même qui ne joue plus, mais qui s’auto-parodie dans La Momie ou qui se ridiculise, comme à la fin de Jack Reacher 2, lors du combat à mort avec le méchant, à qui il donne le coup de grâce, après avoir chuté de deux étages, en hurlant « Look at me ». C’est beau comme du Van Damme…

 

Après des années d’errements, TC revient avec Barry Seal, American Traffic, un thriller cynique et plutôt réussi signé Doug Liman, où il incarne un personnage de filou sympathique, inspiré d’un trafiquant qui a réellement existé. Bon d’accord, TC ne peut pas s’empêcher de faire deux trois cascades en avion (on apprend par la presse bien informée qu’il a lui-même tenu le manche, comme c’est intéressant), de montrer ses fesses et quand il fait l’amour à sa femme, c’est trois fois de suite sinon rien. Mais bonne nouvelle, Tom Cruise joue ! Et c’est assez réjouissant. Mèche rebelle, sourire enjôleur, il incarne un pilote de ligne cool, pas étouffé par les scrupules, qui se reconvertit en exécuteur des basses œuvres de la CIA. Pour arrondir ses fins de mois, il se met également à convoyer la drogue de ce cher Pablo Escobar, de la Colombie aux USA, avant de devenir un rouage essentiel de la machination inventée par le colonel North, avec la bénédiction de Ronald Reagan, pour financer les dictatures sud-américaines et les mercenaires. Un double, voire triple jeu qui va mal finir…

Supérieurement écrit par un illustre inconnu, le scénario évoque le meilleur du cinéma des années 70. C’est drôle, léger, mais également spectaculaire, politique, profond. On se pince constamment, impossible de croire que le film est inspiré d’une histoire vraie, mais c’est tellement bien tricoté que tout passe, même les interventions d’Escobar ou de Reagan à la télé. À la réalisation, l’inégal Doug Liman. Entièrement au service de son histoire, il ne fait pas le malin avec la caméra et signe un divertissement de qualité, entre M*A*S*H de Robert Altman et le cinéma de Martin Scorsese. Mais sa meilleure idée est de métamorphoser Tom Cruise, icone d’une génération (voire deux) et vaisseau amiral de la Sciento, en symbole de la dérive et du pourrissement de l’Amérique de Reagan à Trump.

Sacrément culoté.

 

 

Barry Seal, American Traffic
Réalisé par Doug Liman
Avec Tom Cruise
Sortie en salles le 13 septembre 2017

 

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