
#Critique Bleach (T. 74)
Eh oui, ça y est, c’est l’heure de faire nos adieux à Ichigo et toute sa clique ! Bleach est bel et bien fini et je serai tenté de dire, mieux vaut tard que jamais… Après 14 ans de publication chez Glénat et soixante-quatorze tomes, le shōnen de Tite Kubo tire sa révérence avec un arc pas franchement inspiré. À la différence de Naruto publié chez Kana, Bleach se conclut dans l’indifférence quasi générale et on ne peut qu’être soulagé de voir le titre prendre fin. Malgré un univers intéressant, des personnages ô combien badass et charismatiques et un superbe travail graphique, la série a souffert d’un étirement inutile de son récit et d’une surenchère sans commune mesure. Bleach sort donc par la petite porte, bien incapable qu’il aura été de se ressaisir lorsqu’il était encore temps. Quoiqu’il en soit, ceci n’en reste pas moins la fin d’une époque.
Tout à une fin et les gros hits shōnen ne font pas exception à la règle. Hormis bien évidemment, Dragon Ball, Saint Seiya et One Piece qui semblent immortels… Avec le départ du petit ninja de Konoha et maintenant celui des Shinigamis de la Soul Society, ce sont deux titres mastodontes qui se terminent. Eux qui étaient des valeurs sûres pour leurs éditeurs respectifs vont laisser un grand vide en termes de publication. Si l’éditeur Kana peut compter sur la progéniture de Naruto avec le titre Boruto, il est peu probable et peu enviable que Bleach se voit décliner sous forme de spin-off ou prequel. Et même si l’éditeur Glénat, premier sur le marché en France, a un catalogue ultra-solide, la fin de Bleach le prive d’une part non négligeable. D’autant que les nouveaux shōnen rois comme One-Punch Man, Fire Force ou My Hero Academia se trouvent chez d’autres éditeurs. Bien entendu, Glénat possède toujours son arme de destruction massive et leader indétrônable, One Piece mais n’empêche… Mais revenons-en à nos moutons et à ce dernier tome de Bleach ! La Soul Society est sur le point de disparaître sous la menace de Ywhach, devenu une sorte de dieu de la mort, capable de réécrire et modifier le futur. Face à lui, se débattent les shinigamis impuissants, menés par Ichigo revenu d’un énième entraînement pour acquérir plus de puissance. On se dit que ça va envoyer sévère mais en fin de compte, cet ultime affrontement est assez décevant comparé à d’autres combats auxquels nous avons assisté par le passé. La conséquence d’un arc chaotique – et bien mal géré par l’auteur – qui n’a pas réellement su décoller.
L’attaque des Quincy contre la Soul Society n’a pas trouvé de réel ancrage dans le récit global et la construction ainsi que le rythme de l’arc en ont pâti. Il faut dire qu’avec l’arc précédent, concernant les Fullbringers, qui était parfaitement inutile et inintéressant, cette dernière partie ne partait pas sur de bonnes bases. De plus, comme à son habitude, Tite Kubo ne peut s’empêcher de démultiplier les personnages, notamment les adversaires et ne parvient pas à les faire tous exister. Du coup, d’un tome à l’autre, on a un peu de mal à se souvenir qui est qui et qui fait quoi… Alors, en même temps me direz-vous, à part des mecs qui se battent, il n’y a pas grand-chose de plus, mais bon quand même, on finit par ne plus savoir qui affronte qui. Le face-à-face Ichigo/Ywhach censé être l’apogée du titre, l’ultime climax perd de sa puissance et se noie un peu dans la masse. Certes, il a de la gueule mais c’est déjà le cas de beaucoup de combats dans le titre. Cet affrontement n’a aucune plus-value et n’a pas la résonance que devrait avoir un ultime combat de ce niveau. On termine donc ce tome et par la même occasion le titre dans une certaine forme d’indifférence, un sentiment qui nous habite depuis déjà de très nombreux tomes. À quoi bon continuer, me direz-vous ?! Eh bien, je répondrais qu’après s’être investi dans un récit et des personnages durant des dizaines de tomes, on souhaite atteindre le dénouement même si on sait que la déception sera de mise. De plus, il ne faut pas oublier l’effet « guilty pleasure » qui nous pousse à poursuivre. Enfin, je rajouterais qu’en dépit d’une histoire chaotique et d’un trop plein de protagonistes, Bleach reste à ce jour une œuvre à la puissance graphique sans commune mesure.
Le trait de Kubo est, selon votre humble serviteur, l’un des plus remarquables que l’on ait eu l’occasion de voir, ces vingt dernières années dans le manga. Jamais à court d’idées en termes de chara-design, le mangaka a su imposer au fil des tomes, des personnages ultra-charismatiques et des scènes de baston toujours plus dingues. On pourra toujours lui reprocher, à juste titre, des arrière-plans et des décors très minimalistes mais finalement cela contribue à faire ressortir les personnages et l’action pour un rendu très souvent somptueux. Depuis le début de son titre, l’auteur n’a cessé de jouer sur les contrastes, alternant grands aplats de noir et de blanc. En résulte une approche graphique puissante mais toujours pleine de finesse. Cela ne suffit peut-être pas à sauver le titre mais à coup sûr ses qualités graphiques auront fidélisé pas mal de lecteurs. Malgré ses innombrables défauts, malgré une invraisemblable longévité, Bleach est et restera l’un des shōnen-phares et emblématiques des années 2000 et les aventures de Ichigo, au même titre que celles de Luffy et de Naruto auront fait vibrer des millions de fans. Bleach, c’est bel et bien fini. Ne reste que l’écho des Zanpakutô qui s’entrechoquent ainsi que la fureur des Bankai qui se déchaînent dans les souvenirs de celles et ceux qui ont la force et le courage d’aller jusqu’au bout ! Bravo !!!
Bleach (T.74)
De Tite Kubo
Édité par Glénat