#Critique de Logan

#Critique de Logan

Note de l'auteur

Dans le futur, Wolverine attend la mort mais tente de sauver une étrange mutante. Un film inégal, hyper-violent, et incroyablement décevant dans sa deuxième partie. Critique avec de gros morceaux de spoilers dedans.

 

Depuis des mois, on y croyait. De fait, la bande-annonce de Logan, somptueuse, sombre, élégiaque, déroulait des images sublimes sur fond de Johnny Cash (la reprise de Hurt), avec une histoire qui semblait s’inspirer du chef-d’œuvre de Mark Millar, Old Man Logan. Le film arrive enfin et – trêve de suspens – c’est une déception, malgré une première heure puissante et dépressive. Étonnant, non ?

Tout commence en 2029. Pourquoi ? Aucune idée ! Wolverine, gonflé aux stéroïdes, est en bout de course. Malade, vieilli, usé, il attend la mort comme une délivrance et s’occupe du professeur Xavier, qui souffre de céphalées apocalyptiques et perd la boule. Un jour, dans ce monde sans mutant, il croise le chemin de la mystérieuse Laura, qui a les mêmes pouvoirs que lui (avec un ou deux bonus sympatoches) et va devoir l’escorter, alors qu’elle est poursuivie par une armée de scientifiques et mercenaires.

Logan (2017) Hugh Jackman FRAMEGRAB FROM TRAILER

Première chose, je ne comprendrai jamais, quand on a à disposition des milliers d’histoires des X-Men écrites par des scénaristes de génie comme Chris Claremont, Jason Aaron, Mark Millar ou Barry Windsor-Smith, pourquoi choisir une histoire originale (ah ouais ?) signée… James Mangold, le réalisateur de Copland ou Night and Day ? Pourtant, Logan commence furieusement bien. Wolvie est devenu chauffeur de limo. Dans la première scène, des truands mexicains tentent de piquer les jantes de sa voiture. Wolverine se fait bastonner, tirer dessus, mais pète les plombs quand les bandidos flinguent sa voiture. Pour la première fois dans la saga made in Hollywood, Wolvie fait péter l’adamantium. Il lâche un « Motherfuckers » rageur, coupe les bras, fracasse les crânes, explose les tempes de ses adversaires. Miracle ! Sur son siège, le fan n’en peut plus. Voici ENFIN le Wolvie de Claremont, de Frank Miller, cet animal sauvage en pleine fureur. SNIKT ! Hugh Jackman, entre Clint Eastwood et Mel Gibson, joue un Wolverine badass, au bout du rouleau. Alors que les films de super-héros n’en finissent plus de lasser par leur bêtise et leur laideur, Mangold emprunte la voie de Christopher Nolan avec Dark Knight. Il joue la carte du ciné adulte, mélancolique, et signe une sorte de western apocalyptique, bourré d’emprunts à Sergio Leone et à Mad Max. La première partie est remarquablement tricotée, avec des guest stars comme Xavier ou Caliban. Le réalisateur nous présente Laura, une môme de dix ans qui manie l’adamantium en virtuose, pose les bases de ce monde sans mutant, puis au bout d’une heure, il n’y a plus de film. Nos (super) héros se retrouvent dans une famille top sympa de fermiers et pendant 15 minutes, Mangold te fait passer des messages fondamentaux comme la famille, c’est bath, rien ne vaut un foyer, des enfants, une bonne soirée entre amis avec une bonne bière. Bref, c’est l’ami Ricoré. Pour les mongolos qui n’auraient pas compris, Mangold plombe encore plus avec des extraits de L’Homme des vallées perdues (tuer, c’est mal, la paternité, c’est cool). L’ennui s’installe et le film ne s’en remettra pas. Il reste encore 1h 15 de métrage et Mangold, épaulé par des cadors (les scénaristes de Green Lantern et Marley et moi) va nous gonfler encore et encore avec son idée de filiation (Laura serait-elle la fille de Logan, that is the question?). Entre deux massacres, le réalisateur accumule les personnages mal dessinés, stéréotypés, les dialogues sentencieux, sa morale à deux balles. Et comme le film n’a pas de méchant digne de ce nom (un problème de licences empêcherait la Fox de piocher dans le vivier de la Marvel), les 135 minutes de Logan paraissent une éternité. Pour emporter le morceau, Mangold se prend pour Shakespeare et sacrifie certains de ses personnages principaux afin de secouer le spectateur. En vain, car depuis longtemps, celui-ci a cessé de se soucier des ectoplasmes qui s’agitent sur l’écran en dolby surround.

Logan 5Derrière la caméra, James Mangold, qui avait déjà « réalisé » le précédent Wolverine (Le Combat de l’immortel, en 2013) joue la carte du drame intimiste. On est loin des premiers volets flashy de Wolverine. Ici, tout est sombre, dépressif, on se croirait dans un film d’auteur français. Avec John Mathieson, directeur de la photo de Gladiator et de plusieurs Ridley Scott, Mangold soigne les ambiances crépusculaires. Et, pour la première fois dans un film des X-Men, fait pisser le sang. Par hectolitres. Mais bon, au bout du 25e crâne explosé dans une belle éjaculation de sang numérique, tu as compris. De plus, Mangold ne sait pas filmer correctement une scène d’action, même s’il est épaulé par pas moins de onze assistants et réalisateurs de seconde ou troisième équipe (11, vous vous rendez compte). Pour preuve, il y a une scène de course-poursuite où il cite ouvertement Mad Max 2 (la première quand Wolvie tente de s’enfuir de son repaire avec Xavier et Laura). C’est simplement pathétique. Là où George Miller réinvente le cinéma à chaque plan, Mangold signe une série de séquences mal branlées que l’on croirait issues d’un téléfilm de C8. Alors qu’il n’a plus rien à raconter dans la seconde partie, il meuble avec des scènes qui confinent au sadisme (notamment avec les enfants). Logan, qui avait si bien commencé, se termine dans un déchaînement de violence et d’effets spéciaux que tu regardes d’un derrière distrait.

Dans les derniers plans, Hugh Jackman, bien sûr épatant, fait ses adieux au personnage. Le spectateur devrait être crucifié sur son fauteuil, pantelant. J’avais quant à moi décroché depuis longtemps, abasourdi par le néant de l’entreprise et le manque d’émotion de cette chose préfabriquée.

 

Logan affiche2

Logan
Réalisé par James Mangold
Avec Hugh Jackman, Patrick Stewart, Dafne Keen.
En salles le 1er mars 2017

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