Critique de Un jour avec, un jour sans [MOVIE MINI REVIEW]

Note de l'auteur

Un homme. Une femme. Une rencontre. Une passion… Cette histoire aussi basique qu’universelle, le cinéaste Hong Sang-soo va la métamorphoser en poème bicéphale, éthéré à en crever d’admiration !
Cheonsoo, cinéaste nonchalant en villégiature (doppelgänger chevelu de Sang-soo) erre dans le temple/musée en carton-pâte d’une ville paumée où il doit présenter un film, et rencontre Heejeong, jeune fille rêveuse vaguement artiste-peintre. Ces deux êtres vont s’adonner, pendant une journée, à un délicat jeu de séduction…
Hong Sang-soo transcende toute la banalité de cette situation avec son procédé narratif détonnant ! Deux variations sur un même thème. Deux points de vue. Plutôt masculin puis plutôt féminin… Un jour avec, un jour sans gambade en équilibre précaire sur le fil du rasoir de la vacuité. Avec une délicatesse et une humanité ensorcelantes. Ces plans fixes interminables parsemés de zooms dingos, ces discussions anodines et tellement réalistes et ces deux acteurs en état de grâce nous propulsent dans un opéra baroque et épuré à la fois ! Un opéra où les petits riens, les maladresses, les mensonges, la solitude et la banalité explosent de vie !
Mais la mélancolie et l’aliénation de notre société contemporaine, cette hydre vampirique qui semble se nourrir de nos sentiments les plus profonds, sont des forteresses imprenables. Hong Sang-soo les prend quand même d’assaut avec ce conte ludique au porte du fantastique. Un conte où légèreté et noirceur s’enlacent, où hommes et femmes se manipulent plus ou moins consciemment, où l’amour éclot, croît et périclite en une seule journée, gravée à jamais dans le cœur de ces deux amoureux platoniques. C’est ce jeu de miroir déformant qui donne toute sa puissance à Un jour avec, un jour sans, comme dans l’inoubliable Un jour sans fin.
Les déclinaisons sont infinies. Hong Sang-soo ne nous en offre malheureusement que deux, alors que l’on est disposé à se perdre corps et âme dans cette journée suspendue dans le temps où Cheonsoo et Heejeong se découvrent dans une parade amoureuse d’une fraîcheur bouleversante. Une féerie d’instants d’intimité volés par la caméra de Hong Sang-soo. Comme un colossal feu d’artifice de petits riens. Ces putains de petits riens qui sont le ciment de la vie… Magnifique !

En salles depuis le 17 février
2015. Corée du Sud. Réalisé par Sang-soo Hong. Avec Jae-yeong Jeong, Min-hee Kim, Yeo-jeong Yoon…

UN JOUR AVEC, UN JOUR SANS – Bande-annonce par vodkaster