Dishonored: La Mort de l’Outsider

Dishonored: La Mort de l’Outsider

Note de l'auteur

Presque un an après la sortie du second épisode et la petite déception commerciale qui en a découlé, Dishonored revient avec un stand-alone, La Mort de l’Outsider. Mettant en scène Billie Lurke, la capitaine du Dreadful Whale, mais aussi l’élève de Daud, l’assassin du premier volet, ce mini-épisode est peut-être la dernière chance de faire découvrir la saga au plus grand nombre tout en concluant l’arc de l’Outsider via un opus qui sonne comme le chapitre final de la série.

Pour être honnête, le scénario de la Mort de l’Outsider sera compliqué à appréhender si vous n’êtes pas un habitué de la saga. Non pas que l’histoire de ce DLC soit particulièrement alambiquée, mais la relation qu’entretient Daud avec son ancienne disciple sera bien plus parlante en ayant toutes les cartes en main. Une relation qui sera introduite dans le DLC La Lame de Dunwall, mettant en scène Daud l’assassin, et qui se poursuivra justement ici, où l’on découvre que Daud souhaite mettre un terme aux agissements de l’Outsider sur le royaume en l’assassinant. L’Outsider, sorte de créature mythologique et mystérieuse, est à l’origine des pouvoirs des personnages, mais aussi de la magie noire en général qui règne sur le monde de Dishonored. Daud n’étant plus aussi agile qu’un cabri en pleine croissance, ce sera à Billie Lurke de s’en charger.

Pour justifier une longueur plus courte compte tenu du prix réduit de ce DLC (comptez 6-7 heures pour terminer l’histoire en ligne droite), le gameplay a lui aussi quelque peu changé. Oubliez les arbres de compétences et les multiples améliorations pour s’amuser avec les gardes comme un beau diable, Billie a maintenant accès à seulement trois pouvoirs, regroupant peu ou prou les principales qualités des compétences précédentes. Le pouvoir Displace, pour commencer, permet à l’héroïne de placer un marqueur afin de s’y téléporter quand elle veut, pour peu que le marqueur en question soit encore dans les alentours, sans obstacle entre le personnage et sa destination. Une manière de se créer une porte de sortie en cas de coup dur ou de se grimper toujours plus haut pour dénicher la porte dérobée du coin. Le pouvoir Foresight est une compétence de détection, permettant au joueur d’arrêter le temps histoire de planer tout autour du personnage et marquer n’importe quoi, autant les ennemis que les objets. Le petit plus qui fait la différence : on peut aussi placer des marqueurs pour Displace histoire de se téléporter à travers les barreaux d’une fenêtre par exemple. Parfait pour procéder sans scrupules au pillage en règle d’un magasin du marché noir. Enfin, Semblance permet de prendre l’apparence de quelqu’un pour une durée limitée, ce qui permettra l’accès à des saynètes bien particulières.

Ces pouvoirs ne sont donc jamais améliorables, mais peuvent être légèrement boostés via les multiples Charmes d’Os que l’on trouve un peu partout. Encore mieux, la jauge de magie se recharge maintenant toute seule, permettant au joueur de ne jamais perdre de temps en exploration. Ces modifications ont un effet à double tranchant. La Mort de l’Outsider se trouve être bien plus dynamique que ses semblables, préférant limiter le nombre de possibilités pour aller à l’essentiel, sans créer de lenteur dans la progression ni transformer le joueur à court de magie en cible vivante. En réduisant les compétences au minimum et un mana infini, Arkane prend le pari de focaliser le joueur sur ses objectifs afin qu’il puise dans ses ressources actives et réfléchisse bien plus sur les limites de ses pouvoirs. A contrario, le gameplay devient bien moins riche, et perd beaucoup de son potentiel ludique qui faisait la joie de certains joueurs, même si les possibilités sont encore présentes. Mais le titre transforme une progression inventive en un schéma qui se répète sans cesse : Foresight pour repérer les ennemis alentours, puis Displace histoire de se téléporter pour passer incognito ou décimer les rangs adverses bien trop faciles à duper.

On aura bien quelques gadgets ici et là venus varier les plaisirs, comme ces mines-grappins qui attirent les ennemis en les clouant sur place, de façon létale ou non. Mais il est dommage de constater que la profondeur des précédents opus s’est un peu perdue en cours de route, en prétextant une courte aventure pour limiter le nombre de possibilités. Pour la première fois de la saga, Dishonored devient répétitif, surtout quand on a usé et abusé des anciens épisodes et qu’on constate avec déception le faible nombre de nouveautés de l’ensemble. Et ça ne s’arrangera pas dans ses niveaux, dont le recyclage du second épisode est à peine déguisé, cherchant simplement à casser la verticalité d’un bâtiment pour justifier sa réutilisation. Mais plus encore que l’effet redite, c’est bien l’écriture des missions et du background global qui pâtit du faible temps de développement.

Alors que Dishonored 2 offrait des niveaux fantastiques, à l’écriture et à l’originalité sans faille (le manoir mécanique, le passage présent/passé, les deux gangs à monter l’un contre l’autre) qui permettaient de varier les situations voire de résoudre les assassinats de façon originale, La Mort de l’Outsider ne cherche même plus la subtilité. Les « cibles » deviennent totalement facultatives et bien moins intéressantes, puisque les missions consistent surtout à récupérer des objets, sans jamais se préoccuper des agissements du tyran local. Et quand bien même le joueur voudrait s’en occuper, ces personnages atypiques n’offrent aucune originalité dans leur approche ni dans le niveau qu’ils contrôlent. Seule la troisième mission, avec son level design spectaculaire, offre un vrai aperçu de ce que les équipes d’Arkane Studios sont capables de faire, mais le reste du jeu reste un cran en deçà. Les objectifs ne sont plus que des prétextes pour tester tel ou tel chemin à prendre, et deviennent même terriblement linéaires sur certains passages de la dernière mission. Même vos actions n’ont plus aucun impact sur le monde qui vous entoure, alors que c’était l’un des points forts de la saga.

Ce petit spin-off offre toujours l’une des directions artistiques les plus incroyables que l’on peut voir dans un jeu vidéo (les intérieurs sont toujours aussi mabouls), mais il préfère créer un condensé paresseux de ce que la saga propose plutôt que de créer la surprise comme la série avait pu le faire sur La Lame de Dunwall. La Mort de l’Outsider devient un stand-alone poussif sur son écriture et la construction de ses niveaux (mis à part la mission 3) et il est vraiment regrettable qu’à l’apparition des crédits de fin, on soit forcément déçu d’un jeu qui n’aura jamais suscité autant d’enthousiasme que ses grands frères. Le titre est toujours aussi plaisant à parcourir, ne reniant jamais ses origines et proposant parfois quelques beaux moments de bravoures et d’infiltration, mais le second opus avait placé la barre tellement haut qu’on ne peut qu’être déçu de cette ultime tentative. Il est peut-être temps de partir vers d’autres horizons, et de laisser cette licence se reposer un peu.

Dishonored : La Mort de l’Outsider

Développeur : Arkane Studios
Editeur: Bethesda
Prix : 25 euros
Plate-formes: PLAYSTATION 4/XBOX ONE/PC

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