
Pour quelques légendes de trop (Critique du 2.08 de Flash / 4.08 de Arrow )
À grands renforts de teasings et de rappels à l’ordre incessant depuis que Flash et Arrow ont repris cette saison, le crossover annuel des deux séries super-héroïques de la CW a ici un double enjeu : confirmer un second rendez-vous d’importance qui voit le Bolide Écarlate et l’Archer Vert agir en tandem. Mais surtout, conclure le battage médiatique commencé il y a près d’un an pour préparer la venue de la série spin-off, Legends of Tomorrow. Sauf qu’à trop en vouloir, le résultat, aussi fun et épique soit-il, laisse tout de même grandement à désirer.
L’année dernière, la CW marqua donc un grand coup en croisant pour la première fois les intrigues d’Oliver et de Barry. Tout d’abord, par un affrontement entre les deux héros (critique ici), puis par une alliance via une cause commune (critique par là). L’attente est donc plutôt conséquente pour leurs retrouvailles, surtout que l’on promet un vilain d’une démesure certaine, ici rien de moins que Vandal Savage, que certains lecteurs connaissent bien. Problème : le méchant en question est bien loin de resplendir. Cabotinant beaucoup trop pour prétendre à parader comme vilain d’envergure, le futur bad guy de Legends of Tomorrow roule des mécaniques, s’enfonce dans sa suffisance et, paradoxe absolu, n’impressionne pas. Un antagoniste sans charisme donc, qui a pour but de tuer Hawkgirl (Ciara Renée, louvoyant entre le pathétique et l’indifférence dans un cosplay catastrophique) et Hawkman (Falk Hentschel, déjà plus dégourdi). Un couple bien singulier, se réincarnant sans cesse au fil du temps, et qui procure à Vandal Savage l’occasion de prolonger son immortalité et de devenir un peu plus fort à chaque fois. Une mise en place originale mais qui prête à sourire : le couple a donc péri auparavant des mains de Vandal Savage depuis des temps immémoriaux… pas moins de 206 fois (!). Alors bon, une fois de plus ou de moins, était-il bien nécessaire de faire tout ce ramdam pour des personnages qui ont l’habitude de trépasser encore et encore et qui finiront par revenir ? Une situation ubuesque, un peu crétine, finalement bouffie par un contexte marketing plus occupé à remplir paresseusement le cahier des charges qui introduira la fameuse série Legends of Tomorrow. Ce qui n’a rien de surprenant en fin de compte. La reprise de Flash cette saison comportait déjà des problèmes similaires, en intronisant beaucoup trop souvent des éléments du futur spin-off, sans que cela n’apporte nécessairement grand-chose à ses protagonistes. Résultat, la direction scénaristique de cette première demi-saison en ressort, sans être mauvaise, un peu cafouilleuse et de ce fait, moins accomplie. Arrow a aussi, bien entendu, subi ce même contrecoup cette année, mais en amoindrissant l’impact du problème. La série a su se concentrer sur le retour de personnages disparus (Black canary / Atom, promis à être des futures « légendes ») en développant un potentiel dramaturgique consistant pour les membres réguliers de la série (y compris pour cette gourdasse de Laurel, comme quoi…). Une construction hétérogène donc, et de nouveau établie dans ce crossover.
Le traitement des intrigues personnelles des deux héros continue d’être diamétralement opposé, malgré qu’ils soient réunis tous deux dans le même récit. Une fois n’est pas coutume, c’est ici de nouveau flagrant dans la première partie introduite via Flash. Si Barry rejoint Star City pour bénéficier des conseils d’Oliver en matière de mysticisme, sa propre histoire se résume à une pathétique peau de chagrin. Car les problèmes du Bolide Écarlate, c’est-à-dire son manque de rapidité pour affronter le professeur Zoom, ne peuvent être exploités qu’à Central City. Et c’est à Central City donc que, de façon très bancale, la mythologie de Flash se passe, pendant que son propre héros s’en trouve dispensé, puisque se trouvant à 800 km du sujet. Une conséquence fâcheuse pour le personnage, qui voit sa propre trame scénaristique diluée dans un marasme narratif supplémentaire. On en oublierait presque que l’on se trouvait dans sa propre série…
A contrario, Oliver Queen bénéficie donc d’un traitement inverse, clairement plus qualitatif. Réutilisant un élément remontant à la saison 2 et timidement esquissé une énième fois lors du précédent crossover dans Flash, l’Archer Vert se découvre donc une paternité. Les répercussions, dont il est trop tôt pour les mesurer, impliquent d’ores et déjà une évolution supplémentaire pour ce dernier. Bouleversé par la révélation de l’existence du jeune William dans sa vie, il prendra la décision de le cacher à Felicity. Et même de lui cacher deux fois d’ailleurs (grâce à une pirouette temporelle made in Flash), préparant des ramifications difficiles pour la sphère Ollicity. Mais a fortiori, Arrow prouve qu’elle a une mémoire et qu’elle est en mesure de délivrer intelligemment une intrigue cohérente, même plongée dans l’élaboration de son encombrant spin-off.
Dans un tout autre registre, l’énième retour dans le temps de Barry Allen laisse dubitatif. En une vingtaine d’épisodes passés depuis son premier « saut », c’est la troisième fois que le jeune scientifique effectue un bond dans le passé pour, une fois de plus, sauver ses proches. Si les deux premières tentatives n’entachaient alors pas vraiment le bon fonctionnement de l’intrigue, que ce soit pour sauver sa ville ou bien sa mère, cette nouvelle percée temporelle passe cette fois-ci plus mal. Ce procédé noie en effet le concept même de mise en danger pour les personnages par son utilisation répétée. Barry, s’il ne le fait pas exprès, et encore heureux, devient par la force des choses, un outil scénaristique bien simpliste. Car en plus d’être un pied de nez au téléspectateur, ce dernier va finir par croire que s’il arrive malheur à quiconque, la solution est d’ores et déjà toute trouvée : il suffit donc de remonter dans le temps. Bien sûr, les scénaristes insistent sur la contrepartie à payer si le temps se voit bouleversé, et on attend de voir encore cela. Pour l’instant, nous y voyons surtout un magnifique instrument de facilité, un véritable moteur de deus ex machina en puissance au demeurant. Une astuce narrative qu’il sera opportun de refréner autant que possible à l’avenir, afin de conserver un semblant de crédibilité concernant les aventures du Bolide Écarlate.
Dans son souci de réunir ses héros pour préparer le terrain aux « légendes de demain », nous voyons bien que la surabondance de personnages pose aussi problème. En à peine une heure et demie, certains auront peu voix au chapitre (Diggle, Théa, Merlyn), d’autres seront absents ou à peine présents (Laurel, Iris, Damien Darkh), quand d’autres manquent cruellement à l’appel. C’est d’ailleurs peut-être ici le plus gros problème. La surpuissance de Vandal Savage impliquerait une réponse proportionnelle de la part de ses héros pour lutter contre lui. On s’étonne donc que ni Atom, ni Firestorm, voire même la première Black Canary n’apparaissent ici, ou que quelqu’un n’ait cherché à les contacter. Bien évidemment, leur éviction, si elle n’est jamais expliquée logiquement, n’est en fait qu’un très mauvais subterfuge qui ne cherche qu’à retarder l’apparition de tous ces protagonistes dans Legends of Tomorrow. La résultante d’un tel procédé irrite alors un tant soi peu : on passe notre temps à nous préparer à l’arrivée de ces fameuses « légendes » pour finalement se passer d’eux quand l’intrigue en a le plus besoin. On a connu plus subtil en termes de camouflet scénaristique…
Après un tel constat, pourtant, ce crossover tisse habillement une cohérence éminemment appréciable dans la réunion de son cast. Sa plus grande réussite s’opère d’ailleurs au niveau de ses dialogues. Les punchlines s’enchaînent, les bons mots fusent, tout comme les références aux aventures passées. Mieux encore, le comique de situation habille de manière naturelle l’ensemble et prouve même que les deux séries savent faire preuve d’autodérision (les apparitions ridiculement fumeuses de Merlyn), osant même en profiter pour taquiner intelligemment Avengers : L’Ère d’Ultron dans une vanne savamment sentie quand toute la team se retrouve à la campagne. Une ambiance indéniablement fun, pleine d’humour, parcourt donc ce double épisode, faisant oublier,le plus clair du temps, la maigre pitance narrative déployée. Le tandem du Bolide et de l’Archer fonctionne une fois de plus très bien, les deux héros quittant le statut de partenaires pour obtenir celui de frères d’armes, contribuant une fois encore à un divertissement tout à fait honorable, mais avec moins de panache finalement .
Cette seconde réunion n’a donc pas su complètement combler les attentes qu’elle était censée procurer, en particulier, dû à la mauvaise gestation des éléments de son spin-off et d’un vilain bourré d’artifices. Bien loin d’être raté malgré tout, le spectacle fonctionne tout de même. Mais les ficelles restent bien minces pour rendre homogène un ensemble scénaristique un brin précaire. Nous aurions souhaité que la finalité de toute l’entreprise tire parti d’un contenu plus fourni pour mettre en avant ses deux héros, en particulier pour Flash, qui en ressort sans grandes avancées notables. Reste un événement finalement sympathique mais passable, exploité sans grand éclat et qui ne convainc pas vraiment. Et si, malgré tout, nous sommes curieux de les découvrir ces fameux Legends of Tomorrow, on appréciera qu’elles s’arrêtent ici pour éviter qu’elles ne polluent de trop les univers qui les ont vu naître.
Je trouve la critique assez sévère. J’ai beaucoup aimé le crossover de cette saison mais également avec quelques réserves. En tout cas, les punchlines et l’humour n’ont pas manqué et c’était assez jouissif 🙂
Mon gros bémol va à l’histoire de la paternité d’Oliver Queen. Et Barry pire conseiller du monde : oui Oliver, va t’incruster dans la vie de ce gamin qui n’a rien demandé, qui apparemment vit très bien avec sa mère, va lui dire que sa grand-mère a voulu l’éloigner pour 1 million de dollars, que tu concoures pour être maire mais que tu es justicier la nuit !
Cette importance des liens du sang dans les séries américaines, ça me gave.
J’en profite pour glisser sur l’épisode d’Arrow de mi-saison où tout nous désigne la morte du jour aka Felicity : le retour de la mère, le petit passage de son assistant, la demande en mariage… Trop de bonheur est toujours suspect. Alors Felicity serait la personne dans la tombe ? J’ai vraiment du mal à l’accepter 🙁
C’est là tout l’intérêt : Les dialogues et les punchlines. Mais sorti de tout le fan service de la série, l’intéret reste moindre en matière d’enjeux pour les deux séries puisque chacune s’exhorte à présenter Legends of Tomorrow par des touches plus ou moins subtiles, même si Arrow s’en sort mieux. J’attends grandement le retour des deux séries pour voir si le camouflet du futur cross over va permettre de présenter quelque chose de plus conséquent.
Pour Felicity, je suis sur que non. A force de nous pointer l’évidence, il est carrément sur qu’elle ne se produira pas. Je pense que si felicity devait mourir, ca serait autrement. Mais plus grave : Le monde dans lequel gravite les séries dela CW prouvent que maintenant la mort ou la disparition n’est plus forcément un problème. A force de manier le temps, les mondes parallèles et maintenant la magie, il deveitn de plus en plus difficile de croire qu’une mort sera définitive. On a bien vu le retour de sara Lance et de Atom cette saison…
Maintenant, dans la liste des suspects potentiels, Si lance était ma principale préoccupation, je pense maintenant très clairement à l’ex copine de Oliver et mère de son fils. Darhk ayant lui même une famille (Un peu what the fuck ce truc là d’ailleurs), je trouverais ça normal qu’il s’attaque à la mère de l’enfant en la tuant, et relancer l’intrigue de Oliver devenant père pour la saison prochaine en s’occupant de son enfant, clashant le couple qu’il a avec Felicity et amener son fils a devenir un futur Green Arrow.
Le « malgré qu’il soit » dans votre critique, toutefois bien construite, laisse un goût amer quant à vos qualités stylistiques. Dommage.