
#Critique Highway Hypnosis – Highway Hypnosis
Quand le rock critic se retrouve le bec dans l’eau avec un papier hebdomadaire à écrire et une actualité musicale aussi pauvre qu’un ex-premier ministre non soumis à l’ISF, que fait-il (le rock critic) ? Il se tourne vers le rayon nouveautés inconnues au bataillon ! Et là, pas de mystère, on ne passe pas des heures à écouter un titre au hasard dans la liste des suggestions Spotify ou Apple Music, on regarde les pochettes…

La pochette originale
C’est important une belle pochette. On a tendance à l’oublier de nos jours où la musique se dématérialise, mais une bonne partie du plaisir lorsque l’on écoute un album, c’est le décryptage de sa couverture. Un disque, c’est un objet avant tout, ne l’oublions pas. Combien d’heures passées devant le Live After Death d’Iron Maiden à rechercher chaque petit détail glissé par l’auteur ? La musique de Motörhead aurait-elle eu autant d’impact sans la gueule menaçante de Snaggletooth ? Et que dire des Abbey Road, Sticky Fingers et autres Dark Side of the Moon ?
Du coup, lorsque le regard du rock critic susnommé tombe sur la pochette du premier album de Highway Hypnosis, ça fait tilt ! Une autoroute désolée menant à un soleil couchant en forme de frise amérindienne surmonté du nom du groupe dans une police de caractère psychédélique, ça vend du rêve, du genre qui se fait attraper par les fameux Dreamcatchers qu’évoque justement cette image.

Highway Hypnosis (filtre Photoshop inclus !)
D’ordinaire, il est de bon ton de brosser une rapide biographie du groupe avant de vous parler de sa musique, histoire de remettre les choses dans leur contexte… Problème ici, les mecs sont totalement absents des radars ! Anciennement appelé Mothership Connection, le groupe originaire de New Braunfels au Texas ne dispose que d’une page Facebook sommairement renseignée qui annonce un « blues folk rock psychédélique avec un glaçage funk » ! Avec ça, on est bien avancés…
Mais bon, let the music do the talking comme ils disent, laissons la musique faire les présentations, après tout c’est pour ça qu’on est là, non ? Après une introduction (Arrival) qui pose l’ambiance (un mec s’allume ce qui semble être un calumet de la paix pour rester politiquement correct), Awake démarre les hostilités en mode pow- wow électrique autour du totem avec chamane possédé et tout le (manitou)tim ! On comprend mieux le nom choisi par le groupe, les guitares tournoient et invitent l’auditeur à la transe dans la grande tradition tex mex. On pense à ZZ Top bien sûr et aux cousins Tito & Tarantula de l’autre côté de la frontière.

Fait à la main à Austin, Texas
Trouble confirme cette impression avec son boogie moite taillé pour la route, on voit les cactus défiler et l’odeur de Tequila se fait plus présente dans l’habitacle de la bagnole qui prend de la vitesse dans notre petit cinéma mental. Dommage que Gratitude vienne couper cet élan, petite ballade un peu fade qui fait office de station-service où l’on est obligé de s’arrêter pour reprendre de l’essence.
Heureusement, Coming to Some Use vient relever le niveau, empruntant sans vergogne la structure du Midnight Rider des Allman Brothers avec suffisamment d’élégance pour qu’on ne crie pas au plagiat. Le plein est fait, on peut repartir ! Drown My Sorrows a beau ralentir le tempo, on reste sur le bitume. La nuit est tombée, les phares éclairent un désert inhospitalier et les guitares glapissent comme autant de coyotes saluant l’ascension de la lune dans un ciel d’encre.

Quand on vous dit qu’ils font tout eux-mêmes !
Texas Ice renforce cette impression d’isolement au cœur de l’état le plus vaste de l’union, et nous gratifie du meilleur solo de l’album avant que le groupe n’enfonce le clou (ou plutôt l’aiguille) avec Tattoo, où l’influence du révérend Billy Gibbons se fait sentir plus que jamais. Lugubres et précises, les guitares imposent leur rythmique inexorable pied au plancher et tant pis pour les panneaux de limitation de vitesse !
Jezebel vient conclure l’album de la meilleure manière possible, le soleil finit enfin par se lever et les montagnes que l’on aperçoit sur la pochette de l’album semblent se rapprocher alors qu’une pedal steel vient doucement soutenir l’ambiance acoustique guitare/banjo du titre. On arrive à destination et l’espoir renaît avec l’arrivée d’un jour nouveau.
Déjà fini ? Seulement huit titres sur un premier album dont la production fleure bon l’amateurisme, c’est déjà pas mal. Highway Hypnosis réussit le pari de nous faire voyager à peu de frais, loin des grosses productions où le mec derrière les manettes compte parfois plus que les gars qui transpirent derrière leurs instruments. C’est donc un premier effort brut de décoffrage comme un shot de mezcal qui vaut largement le coup que l’on s’y arrête… Comme quoi, c’est parfois bon de s’éloigner des sentiers battus, surtout si l’on finit par atterrir sur une highway perdue au fin fond du Texas !