
Critique : Interstellar de Christopher Nolan
L’espace. Le vide au-dessus de nos têtes. Pendant des décennies, il fut l’endroit qu’il fallait atteindre, les premiers, aller plus loin, pour toucher le lieu où vivaient nos fantasmes d’être humains plus si cloués au sol que ça. Et puis, plus rien. Le monde est parti dans une autre direction, et on s’est mis à regarder le sol. Interstellar, ce n’est pas 2001, l’odyssée de l’espace, ce n’est pas Gravity. Interstellar, c’est Christopher Nolan qui nous fait lever la tête vers les étoiles, de nouveau.
Dans un futur proche, sur une planète Terre devenant de plus en plus inhabitable, un groupe d’explorateurs part dans une mission interstellaire à travers une autre dimension, à la recherche de nouvelles planètes à coloniser pour sauver l’espèce humaine de l’extinction.
Chris Nolan propose de suivre entre autres cette reconquête de la curiosité humaine, et comme le bonhomme ne fait pas les choses à la légère, Interstellar est assez massif. Que ce soit sur Terre ou dans l’espace, c’est cette scission entre une humanité affaiblie, résolue, et celle qui, à l’image de Cooper (Matthew McConaughey), continue de cultiver son appétit pour l’ailleurs, que le réalisateur met en scène ici. La première partie du film pose tout cela de très belle manière, et si l’on voit quelques facilités scénaristiques et les bonnes ficelles utilisées par le réalisateur d’Inception, l’attention et la justesse portées aux personnages, et à leurs motivations face aux questions de survie, de sacrifice et à la nature même de l’homme conquiert tout. Et ce n’est qu’une rampe de lancement vers le vrai voyage.
En s’affranchissant d’un certain réalisme, comme pouvait le proposer notamment Gravity, Interstellar installe le voyage spatial de ses protagonistes comme similaire à celui des grands navigateurs partant sur des eaux inconnues. L’endroit est à la fois d’une beauté folle, et d’une létalité implacable, et les protagonistes oscillent sans arrêt entre leurs assurances de scientifiques chevronnés, et leur humilité d’hommes faillibles, qui ne savent pas réellement où ils vont.
Le film, mis en place lentement, explose magnifiquement dans cette deuxième partie, transportant littéralement son spectateur, hébété de découvrir encore et encore, à mesure des étapes, à mesure des épreuves, l’insignifiance de sa condition, et paradoxalement l’importance de sa volonté. Le long métrage gagne ainsi en ampleur, et délivre quelques moments de grâce qui laissent littéralement le souffle coupé par l’émotion. Il s’en va même titiller la métaphysique, en s’enfonçant tardivement dans des notions plus abstraites.
Titiller, car Christopher Nolan n’est pas Stanley Kubrick, et ses aspirations dramaturgiques sont très rapidement ramenées à ces bonnes grosses ficelles hollywoodiennes que l’on connaît bien. Et là est peut-être le seul défaut d’ambition d’Interstellar, qui ne parvient pas, au bout de son voyage, à transcender les questions profondes qu’il met tant de temps à construire. Le film revient inconditionnellement à des choses plus simples, certes plus fortes, et qui fonctionnent excellemment bien, mais qui en frustrera sans doute certains qui y verront l’effet de la montagne qui accouche d’une souris.
Interstellar, c’est ce grand retour vers l’infiniment grand, qui renvoie inexorablement à l’infiniment petit, à nous. C’est un film magnifique, visuellement sublime, et à l’histoire époustouflante. Nolan aura réussi, avec un propos à aussi grande échelle, de parler si bien de ce que devrait être l’être humain, c’est-à-dire un chercheur, un aventurier, un explorateur. On pourra se plaindre des bons sentiments, et des tire-larmes faciles. Mais la proposition du réalisateur britannique, toujours bien aidé par la musique troublante de Hans Zimmer, reste définitivement au-dessus du reste des films de ce calibre.
Christopher Nolan nous dit également quelque chose d’assez rare et important pour un film de cet acabit. Il nous dit que ce qu’on cherche désespérément lorsqu’on scrute les étoiles, lorsqu’on se perd dans l’espace, nous l’avons finalement au fond de nous.
Il suffit juste de le retrouver.
Le gros doute que j’ai sur ce film est la capacité de Nolan à distiller de l’émotion, avec un minimum de subtilité. C’est vraiment là-dessus que je l’attends, parce qu’après en terme d’univers et visuellement, je lui fait entièrement confiance
Pour ça Florian, rassures toi. Niveau émotion, Nolan livre quelques séquences magnifiques, dont une qui touche directement au cœur.
Elle est très belle votre critique, Monsieur Thibaud Smithee. Ca me donnerait presque envie de ne pas voir ce film que j’attendais tant, de peur d’être déçu.
Ce que je retiens, cependant, c’est que c’est beau comme du Kubrik sans les trucs qui m’ont toujours fait chier chez Kubrik. Je sais, c’est moins classe que votre critique, mais c’est quand même un sacré argument pour…
Que ça fait du bien de lire un commentaire de quelqu’un qui ne considère pas Kubrick comme un Dieu, on se sent moins seul merci Alex!! lol
« 2001 » restera toujours le somnifère le plus efficace jamais inventé.
Bon, vu le film, effectivement beaucoup aimé. Emouvant, certaines scènes sont réellement magnifiques (pas jusqu’au larmes, hein, on est un homme ou on l’est pas).
J’adore sa façon de filmer avec des trucages, des bidouilles, ce qui fait qu’on y croit plus que de la bête image de synthèse.
Après, ça reste du Nolan. Ceux qui n’aiment pas son style à la base ne changeront pas d’avis. Il a toujours privilégié une forme complexe pour un fond simple: Interstellar pourra perdre les spectateurs avec une approche très alambiquée mais avec du recul, le film parle à tout le monde, et pose des thèmes classiques, éculées mais très efficaces.
Par contre, nul doute que c’est son film le plus atypique (enfin, sur la forme en tout cas)
Sans la critique du Dr No c’est quand même nettement moins fun, non ?? lol
C’est toujours le problème avec Nolan, dès qu’il se met à faire dans l’émotion, faut qu’il en fasse 15 tonnes et sur Interstellar, malheureusement, on plonge dans le neuneu à vitesse grand V.
Autant il avait su rester relativement discret sur Inception, autant là, le final est proprement insupportable de connerie. C’est dommage car il y a des scènes magnifiques, l’enveloppe est très jolie mais ce qu’il y a à l’intérieur est bâclé, bancale et surtout très, très con.
Si vous n’avez pas aimé 2001, passez votre chemin. Ce film n’apporte rien au genre…C’est long, c’est vide, et comme dit au dessus, niveau émotion, zéro pointé.. 2h49 d’ennui. Même les acteurs ont l’air de se faire c…Heureusement que la Bo nous tient éveillée.. 🙂
C’est beau la Terre, c’est beau l’amour, c’est beau la vie, c’est beau l’espace…
Plus une propagande pro-catho à peine déguisée… Au secours!!
Tire-larmes, trop long, trop pompeux, trop bavard, trop incohérent, trop mystique, le film m’a souvent fait pensé à un mix entre le « Prométheus » de Ridley Scott et le « 2001 » de Kubrick, donc pour moi c’était clairement too much.
Reste quelques plans assez hallucinants de beauté, le savoir-faire de Nolan qui est tout sauf un manchot, et ma copine Jessica Chastain…
Il a clairement vu trop grand sur ce coup-là, mais au moins il aura eu l’audace d’essayer, c’est déjà beau.
Je termine en précisant qu’ »Inception » est l’un de mes films cultes. Ça peut servir, car j’ai cru comprendre qu’il ne fait pas bon descendre Nolan ces derniers temps…
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Après les Gardiens de la Galaxie qui pille le pitch de Farscape en l’affadissant à la sauce hollywoodienne, voilà Interstellar qui pille la quête de John Crichton dans Farscape pour en faire un bouillie mysticomélodramatique chiante qui s’amuse à faire du name dropping avec la surface de concepts scientifiques basiques – et réutilise la théorie scientifique de Crichton pour se propulser dans l’espace sans carburant – pour toujours nous ramener au petit nombril éploré de son héros viril qui bien sur a toujours raison, toutes les solutions, tous les héroïsmes.
On passe les 3/4 du film à ne rien voir des merveilles traversées, le réalisateur préférant se focaliser sur le cockpit, les actes d’héroisme syndicaux ou la ferme du héros.
Pendant ce temps, quelque chose de beaucoup plus interessant se passe sur terre, Murph découvre comment manipuler la gravité (mais le scénario préfère se cocnentrer sur ses larmoiements et drames familiaux avec son frère Redneck), l’humanité s’embarque dans l’espace et vit plusieurs générations dans l’espace, mais c’est beaucoup plus interessant de s’interesser à la destinée d’un pauvre con puéril qui laisse ses gamins pour des décennies sur un coup de tête en expliquant à sa gamine « mais c’est parce que je suis destiné à partir!!! Sois gentille fais moi des bisous … et puis ça va etre trop drole, quand je reviendrais on aura le même âge (hi hi) » (pas creepy et megalo du tout) pour pleurnicher ensuite sans s’arreter d’avoir largué ses gosses.
A un moment j’ai cru que le scénario allait au moins traiter cet aspect du scénario, condamner Cooper à errer dans l’espace en assistant aux morts successives de ses enfants et à la dévastation ineluctable de la Terre par messages interposés, comprenant au fond de ses entrailles son erreur fondamentale. Mais Nolan est trop superficiel pour ça, et se rétracte en rendant la quête de son héros indispensable, justifiant tous les pseudos héros à abandonner leurs gosses pour « vivre leur vie » et « sauver le monde ».
De la même façon, il eut été infiniment plus interessant de traiter la question de l’humanité qui gache une planète entière et décide de se barrer plutot que tenter de réparer (sur ce point, bruler les plantes et champs qui soutiennent les sols et la plus belle des conneries environnementales, et on voit des fermiers le faire du début la fin du film, mais personne pour même évoquer l’idée de planter des végétaux qui fixent le sol apparemment), ou comprendre pourquoi une espèce extraterrestre tenterait de sauver une espèce aussi misérable.
Comme Inception, on a un beau gachis ici, un tout petit drame familial étriqué qui s’étire à n’en plus finir et se prend pour quelque chose, à partir de concepts formidables et d’une liberté totale pour les explorer. Et un film de plus qui se fait passer pour de la SF sans en être.