
Kingdom Hearts HD 2.8: Final Chapter Prologue
La saga Kingdom Hearts est un véritable ovni vidéoludique et le résultat d’un pari osé de la part de feu SquareSoft. À une époque où l’emblématique éditeur japonais était en apnée après l’échec cuisant du film Final Fantasy, les têtes pensantes recherchaient désespérément une bouffée d’oxygène. Et ce bol d’air frais est venu d’un jeu à la fois inattendu et au concept complètement fou en mélangeant l’univers des jeux Final Fantasy et le monde magique de Disney. À l’annonce de ce curieux mariage sous la houlette de Tetsuya Nomura, beaucoup de joueurs ont d’abord pensé à une bizarrerie nippone de plus. Mais Kingdom Hearts est loin d’être une blague de mauvais goût ou un pur produit marketing destiné aux petits louveteaux. Premier jeu à m’avoir embarqué dans un torrent d’émotions, Kingdom Hearts a toujours eu une place à part dans mon cœur de joueur. Et c’est en tant que fan absolu des deux premiers opus sortis sur PS2, qu’à ma grande tristesse, j’assistais d’année en année à la sortie des nombreux spin-off sur tous les supports possibles et imaginables : Gameboy Advance, DS, 3DS, PSP, mobile, et même un jeu web.
D’autant plus que ces nombreux épisodes sont intimement liés les uns aux autres et par conséquent sont tous indispensables. Kingdom Hearts est un Action RPG qui nous offre une histoire ultra complexe et un univers tellement riche que la moindre pièce du puzzle est d’une importante capitale si l’on veut comprendre un minimum la trame scénaristique. Heureusement pour nous, Square Enix a décidé depuis 2013 de ressortir tous les opus dans des éditions spéciales sur la console de Sony. Les deux premières collections, Kingdom Hearts HD 1,5 Remix et Kingdom Hearts HD 2,5 Remix regroupent quasiment tous les jeux de la licence. Pour cette dernière collection sobrement intitulée Kingdom Hearts HD 2,8 Final Chapter Prologue, Nomura a surtout pensé au futur et très attendu Kingdom Hearts III en recroisant les destins des différents personnages principaux. Nous y retrouvons donc le tout dernier opus à ne pas avoir été porté sur console de salon, c’est-à-dire l’excellent Kingdom Hearts 3D: Dream Drop Distance. Mais plus intéressant encore, nous avons A Fragmentary Passage qui est un tout nouveau « jeu » développé sur le moteur de Kingdom Hearts III. Et pour finir, le joueur aura le droit à environ une heure de cinématique faisant la lumière sur la toute première Guerre des Keyblades, plutôt alléchant non ?
Kingdom Hearts: Dream Drop Distance HD
Accueilli chaleureusement par la presse et les joueurs, Kingdom Hearts 3D : Dream Drop Distance est sorti en 2012 sur 3DS. Considéré encore aujourd’hui comme l’un des meilleurs RPG de la console portable de Nintendo, Dream Drop Distance est également un épisode très important dans l’histoire de la série. Se situant juste après les événements de Kingdom Hearts II, on y retrouve le personnage principal Sora ainsi que son éternel rival et meilleur ami Riku. Alors que l’affrontement final contre Xehanort approche à grands pas, les deux héros doivent passer un examen crucial pour enfin devenir de véritables Maîtres des Keyblades. La tache sera loin d’être facile puisque selon le Grand Maître Yen Sid, ils doivent réapprendre le maniement de la Keyblade depuis le début. Mais ce n’est pas tout, pour prétendre au rang de Maître, Sora et Riku auront également la lourde tache de se rendre dans le Domaine des Rêves pour trouver et déverrouiller les sept serrures des mondes endormis auparavant détruits par les sans-cœurs (ça sonne compliqué, mais les fans comprendront). Si l’histoire peine au début à décoller, tout finit par s’accélérer pour un final grandiose.
La plupart des mondes de cet opus sont non seulement inédits, mais aussi géniaux qu’intéressants, par exemple Le Pays des Mousquetaires (Les Trois Mousquetaires version Disney) ou la Cité des Cloches du Bossu de Notre Dame. Mention spéciale au monde enchanteur de Fantasia qui, tout comme le film, est une véritable ode à la poésie et aux rêves. Le joueur aura aussi l’occasion de parcourir des mondes déjà bien connus des fans comme La Ville de Traverse, dont le thème musical après plus de quinze ans va finir par sérieusement me rendre fou. La direction artistique est comme d’habitude au top grâce à cette grande diversité qui a toujours fait la force de la saga. Pour ce qui est de l’OST, Yoko Shimomura est encore à la baguette et nous livre des compositions toujours aussi émouvantes. Du côté du gameplay, Dream Drop Distance reprend les très bonnes bases de l’épisode PSP Birth By Sleep tout en rajoutant une tonne de nouveautés. Encore plus nerveux et spectaculaire, nos héros peuvent désormais utiliser les éléments du décor pendant les combats pour réaliser des combos dignes d’animes japonais. Cette nouvelle interaction avec les environnements, parfois destructibles, est plus que bienvenue et rend les combats encore plus dynamiques. Autre nouveauté, les Esprits remplacent Donald et Dingo comme compagnons et ressemblent à des pokémons vraiment moches, mais très utiles.
Mais qu’en est-il du portage ? Square Enix a fait du bon boulot pour un résultat final assez convaincant. La résolution est en Full HD et les 60 fps rajoutent un petit plus non négligeable niveau confort. Même si les graphismes sont évidemment plus fins, le jeu a d’abord été pensé pour la 3DS et cela se ressent à l’écran beaucoup plus que le remastered de Birth By Sleep par exemple. Les décors sont certes assez grands, mais en même temps terriblement vides par rapport aux deux opus principaux. De plus, certains éléments du gameplay comme l’interaction avec les Esprits qui tiraient profit des caractéristiques de la 3DS perdent tout leur intérêt dans ce portage. Si vous avez déjà le titre sur la console de Nintendo, l’avantage de cette version est plutôt moyen, à part jouer confortablement sur votre TV. Par contre si vous êtes comme moi et que votre dernière console portable est la Gameboy Advance, cette réédition est parfaite et nous donne enfin l’occasion de mettre la main sur un très bon épisode de la licence.
Kingdom Hearts Birth By Sleep 0.2: À Fragmentary Passage
Même si Dream Drop distance représente le gros morceau de cette collection, c’est bien A Fragmentary Passage qui a captivé l’attention des fans en tant que tout nouvel opus. Très court (environ trois heures), A Fragmentary Passage est à la fois l’épilogue de Birth By Sleep, mais aussi le prologue de Kingdom Hearts III, similaire à ce que c’était Metal Gear Solid : Ground Zeroes pour Metal Gear Solid V (critique en deux parties ici et ici). En plus d’être très important d’un point de vue scénaristique, ce prologue est une vitrine technologique pour le futur de la série. Développé sur l’Unreal Engine 4, le jeu affiche des graphismes époustouflants et ne présage que du bon pour Kingdom Hearts III. La direction artistique toujours au sommet se retrouve magnifiée par le nouveau moteur avec notamment de superbes effets de lumières et de particules. Nomura n’a pas choisi l’Unreal Engine 4 par hasard et ce choix résulte de son expérience douloureuse sur Final Fantasy Versus XIII (article ici). Le développement d’un moteur fait maison est un processus long et difficile qui demande beaucoup de temps. Et autant dire que le temps est précieux pour Nomura, puisqu’en plus d’être le directeur de Kingdom Hearts III, il est en outre responsable du remake de Final Fantasy VII (oui, rien que ça). Très flexible, facile à prendre en main et capable d’afficher des graphismes qui flattent la rétine, l’Unreal Engine 4 s’est imposé de lui-même et ce n’est pas par chance si le remake de Final Fantasy VII est également développé sur ce moteur.
Au niveau du gameplay, A Fragmentary Passage condense le meilleur de chaque épisode. Si le système de base ressemble fortement à Kingdom Hearts II, il inclut de plus des idées de Birth By Sleep et la nervosité des combats de Dream Drop Distance. Résultat, on est face un Action RPG ultra complet, très rapide et surtout spectaculaire (à des années-lumière de Final Fantasy XV). La caméra, un problème récurrent dans la série, fait toujours un peu des siennes, mais c’est normal pour un jeu qui va tellement vite. Le level design bien plus vertical par rapport aux précédents titres débloque de nouvelles possibilités intéressantes. Comme souvent dans la série, le joueur aura quelques puzzles à résoudre. Mais rassurez-vous, ils ne sont pas bien difficiles et permettent surtout de faire retomber la tension entre deux combats. Si je devais reprocher une seule chose au gameplay, ça serait la difficulté que je trouve un brin trop faible même si l’on est loin du casual Final Fantasy XV (critique ici). Dans le domaine de l’Action RPG, beaucoup de titres comme Dark Souls ou même le plus récent Nioh ont clairement élevé la barre et démontré qu’une forte difficulté ne rebute pas les joueurs, au contraire.
Pour éviter un maximum les spoilers, A Fragmentary Passage raconte les mésaventures d’Aqua (protagoniste de Birth By Sleep) après son sacrifice pour sauver son ami Terra. Condamner à errer dans le Royaume des Ténèbres et sans aucune notion du temps, Aqua est une héroïne en plein doute et au bord de la dépression. La dernière partie du jeu fait définitivement le lien avec le tout premier Kingdom Hearts (au prix de quelques incohérences scénaristiques) et introduit enfin via une cinématique les futures aventures de notre trio préféré (Sora, Donald et Dingo) dans Kingdom Hearts III.
Kingdom Hearts X Back Cover
Kingdom Hearts Unchained X est un assez bon jeu mobile sorti récemment en 2016. Se situant dans la chronologie de la série dans une époque bien antérieure aux événements racontée dans tous les autres opus, Kingdom Hearts Unchained X développe la mythologie obscure de la licence et plus particulièrement la fameuse Guerre des Keyblades. Faute de pouvoir porter un jeu mobile free-to-play sur PS4, SquareEnix a toutefois concocté un moyen métrage d’environ une heure mettant en scène l’envers du décor de Kingdom Hearts Unchained X.
Toujours sur Unreal Engine 4, Kingdom X Back Cover tout comme Fragmentary Passage est un avant-goût de Kingdom Hearts III. Si le film est en général relativement beau, j’ai trouvé l’animation des personnages un peu moyenne. Mais ce qui m’a le plus dérangé avec Kingdom X Back Cover c’est son écriture bancale. Je ne sais pas si c’est à cause des traductions, puisque le jeu a d’abord été pensé en japonais, mais à certains moments j’ai vraiment eu cette impression de voir (et surtout entendre) un anime traduit. Les Japonais ont une certaine qualité de doublage et un ton qu’il est très difficile de retrouver dans les traductions (anglaises et françaises) qui frisent souvent le ridicule. Et si cela ne m’a pas vraiment posé problème durant les jeux, pendant une cinématique d’une heure non-stop c’est une autre affaire. Les dialogues sonnent souvent faux et les différents personnages censés être les premiers Maîtres des Keyblades ne m’ont pas du tout impressionné. Seul le mystérieux Maître des Maîtres, vêtu du manteau noir de l’Organisation XIII, sort du lot par son charisme et son humour décalé.
Mon deuxième grief vis-à-vis de Kingdom X Back Cover est l’extrême opacité de son scénario. Et là, je ne parle même pas pour les néophytes pour qui cette longue cinématique sera juste incompréhensible. Non, même les fans hardcores comme moi seront aux fraises et chercheront désespérément des réponses sur le net. Alors oui, on a en effet des éléments supplémentaires concernant la mythologie de Kingdom Hearts. Mais franchement, à la vue des crédits de fin, je me suis surtout retrouvé avec beaucoup plus de nouvelles questions que de réponses. D’un côté, je ne suis pas surpris, c’est plus au moins la marque de fabrique de Nomura qui aura désormais une énorme pression pour relier tout ça sans incohérences et donner du sens à son histoire.
Conclusion :
Destiné avant tout (et surtout) aux fans, Kingdom Hearts II.8 est une collection indispensable pour percer un peu plus les secrets de la saga. C’est un vrai bonheur de pouvoir enfin jouer manette en main à l’excellent Dream Drop Distance dans un portage de qualité. Très court, le chapitre inédit A Fragmentary Passage ne déçoit pas non plus et surfe plus que jamais sur la hype du très messie Kingdom Hearts III. Malgré toutes les qualités, je trouve néanmoins que le prix (environ 60 euros) est un peu salé pour un remastered d’un jeu 3DS et un prologue de trois heures seulement. Même si vous êtes un fan de la série, je vous conseille d’attendre un peu avant de l’acheter, d’autant plus que Kingdom Hearts III n’est pas vraiment près de pointer le bout de son nez (mais on garde espoir hein !). Par contre, si vous êtes nouveau dans la série, passez votre chemin ! Pour comprendre et apprécier les jeux présents dans cette édition, vous devez au moins avoir terminé les deux opus principaux ainsi que l’épisode sur PSP. Si vous êtes dans ce cas, patientez un peu puisque une collection ultime regroupant Kingdom Hearts HD 1,5 Remix et Kingdom Hearts HD 2,5 Remix devraient bientôt débarquer sur PS4.