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#Critique : la bande-son du labyrinthe (Legion saison 2 / FX / OCS)

#Critique : la bande-son du labyrinthe (Legion saison 2 / FX / OCS)

Note de l'auteur

La saison 2 de l’époustouflante série Legion, issue de l’univers X-Men, a débuté sa diffusion sur FX ce mardi et sur OCS dès mercredi. Après une première saison passionnante, Noah Hawley, son showrunner, relève encore la barre et ne lâche rien.

« You’re inside the maze, now. You cannot escape. Welcome to madness. » Dès l’introduction en voix off, la saison 2 de l’excellente série Marvel Legion (on vous en parlait avec des trémolos dans la voix ici) retrouve son thème de prédilection – la folie, la perte de soi – et y ajoute une nouvelle image, celle du labyrinthe. Une image qui, à l’instar de la mémoire diffractée de la première saison, se multiplie en variantes, s’ouvre comme un éventail et énumère ses possibilités narratives au cours d’un premier épisode à couper le souffle. Un épisode placé sous l’égide d’Alice, celle qui passe de l’autre côté du miroir pour explorer le pays des merveilles, et s’y perdre.

Petite remarque au passage : en français, on parle toujours de « labyrinthe », mais l’anglais établit une distinction entre maze et labyrinth. En gros, le premier est un puzzle complexe où le joueur a souvent le choix de sa direction, tandis que le second n’a qu’un chemin possible, long et biscornu, qui mène avec constance au centre du dispositif. Dans un « maze », on peut se perdre. Et c’est même l’esprit du jeu.

L’épisode d’ouverture de la saison 2 est lui-même un labyrinthe dans sa construction narrative. Au bout de quelques minutes, il annonce une « deuxième partie » intitulée The madness of crowds, la « folie des foules ». Un peu plus tard, on entre dans un « chapitre 3 », intitulé Délusions (délires). Partie, chapitre (où est passé le nom de la première séquence ?), où est la logique ? Nulle part.

(c) Matthias Clamer/FX

L’errance porte ici de nombreux visages. Elle est sexuelle (les « femmes à moustache » qui secondent le mystérieux amiral Fukuyama), musicale (un thème classique se retrouve mêlé à un mix nettement plus contemporain), temporelle (David a l’impression qu’un seul jour s’est écoulé depuis son départ, alors que la vérité dépasse un an)…

La musique, surtout. Synthétique, elle reflète en fréquences sonores l’environnement de plastique blanc irréel qui entoure David dans le nouvel environnement de travail de la Division 3. Plus que jamais, on y retrouve la tonalité d’un Orange mécanique mélangé à 2001, l’Odyssée de l’espace.

Le S02E01 est en lui-même un morceau de musique. Tout l’épisode est samplé comme un titre électro. La bande-son en est un labyrinthe de notes, de phrases répétées et agencées, de rythmes de basse (organiques, du cœur et des viscères). À l’instar du compositeur (Jeff Russo en grande forme), les scénaristes Noah Hawley et Nathaniel Halpern jouent avec le spectateur comme avec un instrument, dans un chassé-croisé mélodico-narratif étonnant.

(c) Matthias Clamer/FX

Une question occupe le cœur de l’épisode (voire de la saison ?) : « What happened in the night-club ? » Que s’est-il donc passé dans cette boîte de nuit où David s’est trouvé en présence d’Oliver (habité par le Shadow King) et de Lenny (elle-même un mensonge puisqu’elle n’existe plus vraiment) ? Cette soirée où s’est déroulé quelque chose d’apparemment horrible demeure un secret caché dans un souvenir caché dans un mensonge.

Le labyrinthe mémoriel se déroule aussi dans une série de chorégraphies exécutée par David, Oliver et Lenny dans le fameux night-club. Une véritable battle artistique, entre la danse hypersexuée de Lenny et celles, plus martiales, de David et d’Oliver. La musique mêle alors sons synthétiques et instruments analogiques (cordes).

Cet épisode, décidément à écouter au casque ou avec un bon système audio, se termine sur les mots d’Alice au pays des merveilles transposés par Jefferson Airplane dans leur chanson White Rabbit : « One pill makes you larger. One pill makes you small. And the ones that mother gives you don’t do anything at all. Go ask Alice when she’s ten feet tall. »

Toute l’histoire d’Alice, perpétuellement perdue et toujours à la recherche du lapin blanc qui a peut-être la clé de son retour, repose sur le labyrinthe. Dans Legion, on recherche plutôt le Shadow King, un « roi ténébreux ». Une différence de ton radicale s’il en est. « Qu’on lui coupe la tête ! », dirait la Reine de cœur. Épisode après épisode, David paraît avoir la tête hachée menue, tranchée au rasoir, découpée en personnalités et en souvenirs aléatoires et mensongers.

David est Alice égarée dans son propre labyrinthe intérieur. Et la bande-son de sa folie est une tuerie.

LEGION (FX) Saison 2 en 8 épisodes,
diffusée sur OCS en US+24 dès le 4 avril.
Série créée par Noah Hawley.
Saison écrite par Noah Hawley et Nathaniel Halpern.
Avec Dan Stevens, Rachel Keller, Aubrey Plaza, Bill Irwin, Amber Midthunder et Jeremie Harris, entre autres.

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