On a vu… Man Seeking Woman et ça décoiffe

On a vu… Man Seeking Woman et ça décoiffe

Note de l'auteur

man seeking woman 1FXX nous propose depuis quelques semaines sa nouvelle comédie « romantique » MAN SEEKING WOMAN, signée Simon Rich (auteur de Last Girlfriend on Earth, dont la série est l’adaptation, et au Saturday Night Live).

Le pitch : Après s’être fait larguer par sa petite amie, Josh Greenberg, interprété par le canadien Jay Baruchel, tente de se remettre en selle et rencontre des femmes. Et tout ça est loin d’être de tout repos…

La série rappelle Molière ou La Fontaine, c’est une farce, une caricature, poussant le grotesque le plus loin possible pour nous faire rire. Un monde où les dernières affaires de votre ex doivent être exorcisés par un prêtre italien pour ne pas vous sauter à la gorge, où écrire un texto nécessite de rassembler une cellule de crise. C’est un enchaînement de sketchs où chaque séquence est l’occasion de nous faire entrer brièvement dans un thriller, un spot pour une œuvre de charité ou une réunion de famille au sommet… de l’Olympe. Man Seeking Woman se montre outrageusement comique dans ses excès, poétique parfois dans ses détails, mais surtout d’un cynisme toujours mordant. Dès le pilote, le ton est donné et je m’inquiète déjà qu’il faille, par la suite, aller encore plus loin pour me garder en haleine.

Man seeking Woman 4La série, lancée à plein régime, joue à fond la carte des clichés. Elle enfonce toutes les portes ouvertes, mais à telle vitesse qu’on est plus que ravi de se laisser emporter. Le point de vue est clair et sans ambigüité : ceci n’est pas la vie, ceci est la vie dans la tête de Josh, avec toute la folie que ça implique. Folie parfois douloureuse (pour lui) et irrésistiblement drôle (pour nous). Jay Baruchel est parfait dans son rôle de garçon attachant, largué, mal à l’aise, qui se retrouve, toujours un peu malgré lui, dans les situations les plus folles. Il sait apporter une douce et très naturelle maladresse à ce héros qui semble, au premier abord, être notre seul repère de réalité.

En choisissant de se concentrer sur la vie sentimentale, la série prend évidemment le risque de nous ressortir les poncifs genrés les plus éculés. Au lieu d’essayer de contourner le problème, le récit plonge intégralement dedans en nous proposant donc de les explorer jusqu’aux confins de leur absurdité.

Man seeking woman 2En ceci la série déçoit en se cantonnant dans le plus grand classicisme. Les stéréotypes évoqués sont les mêmes que dans toutes les autres séries. Le propos semble le même depuis des décennies : les hommes sont obsédés, lâches et inconséquents, les femmes superficielles, cruelles et manipulatrices, Bla-bla-blaaaaa. La série semble parfois misogyne. Personnellement après plusieurs des 6 épisodes vus, bien que bienheureuse après avoir tant ri, un vague et diffus sentiment d’énervement me restait. Tous les personnages féminins ne sont que des coquilles vides. La mère et la sœur jouent l’hystérie familiale, tandis que les autres sont des images de papiers glacés ne servant qu’à la mise en évidence d’une attente. L’ex, le coup d’un soir, la petite copine qui s’impose, la fille pas assez jolie et la très jolie femme trophée.

Célibataire que je suis, je passe donc les épisodes à me reconnaitre dans Josh. Femme que je suis, je m’exaspère de ces représentations dont aucune ne me semble être moi. Et j’attends avec la plus grande impatience l’épisode laissant de côté son héros au profit d’une héroïne (épisode mentionné dans une interview de Simon Rich menée par Pierre Langlais pour Sérierama).

Man seeking woman 3Mais c’est en cela aussi que la série réussit son coup de maitre, en étant justement rien d’autre qu’un catalogue de clichés. Tous les personnages, oui tous, les hommes y compris, même si on les voit moins, thématique et héros masculin hétéro obligent, tous les personnages donc ne sont qu’une représentation archétypale et complètement barrée de chacune des cases dans lesquelles la société les contraint. Notre héros se transforme lui-même en stéréotype à force de se laisser porter par les clichés qui l’entourent. Josh, force de réaction pure, devient malgré lui le dindon de la farce et Jay Baruchel brille dans ce rôle de marionnettiste pris au piège des fils de son cerveau et de ceux tissés par tout son entourage.

La série s’impose donc comme une commedia dell’arte des temps modernes. Un grand carnaval où la surcharge grotesque de tous joue un rôle cathartique. Rendre absurde et drôle des comportements dont nous nous défendons mais que nous voyons malgré tout, malgré nous, avec tendresse et indulgence, dans nos proches, dans nous-mêmes.

En choisissant de ne creuser absolument aucun de ses personnages pour les rendre singuliers, un tant soit peu aimables et finalement humains, la série profite du rire pour nous mettre en garde. Le chemin de l’amour est pavé de bonnes intentions et si la société, celle qui nous opprime tant mais que nous sommes tous, se charge par ses attentes de nous contraindre à des comportements, il revient à chacun de prendre du recul pour faire ses propres choix et pour considérer l’autre comme autre chose qu’une simple petite case…

 

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