
#Critique : Ready Player One
Dans le futur, l’humanité s’affronte pour prendre le contrôle d’un monde virtuel. Scénario bas du front, mise en scène indigne de Spielberg : quelque chose comme Fort Boyard dans la réalité virtuelle. La déception de l’année.
Au-delà de la déception…
Je ne pensais pas écrire cela un jour, même dans mes pires cauchemars : Steven Spielberg s’est gravement planté. Rien qu’à relire cette pauvre phrase, j’en ai les larmes aux yeux. Car Spielberg est plus qu’un réalisateur, c’est un magicien, un homme qui toute ma vie m’a pris par la main pour me raconter des histoires de requins, d’extraterrestres, de dinos, d’aventuriers, d’holocaustes et d’amour, un génie qui a révolutionné le cinéma et qui a changé ma vie. Nos vies. Depuis le pas très funky Indiana Jones et le royaume du crâne de cristal (2008), Spielberg fait dans un cinéma plus classique, délaissant les superproductions d’aventures pour des œuvres plus intimistes, souvent passionnantes comme Le Pont des espions, Lincoln ou l’excellent Pentagon Papers. Ses grosses machines (Tintin, Le BGG, Cheval de guerre) semblent plus poussives, bien ternes en comparaison avec Il faut sauver le soldat Ryan, Jaws ou Minority Report… C’est dire si j’attendais le grand retour de Spielby à la SF avec un énorme budget, les meilleurs techniciens et informaticiens pour une plongée au cœur du virtuel. Las, Ready Player one est un échec sur toute la ligne. À commencer par le scénario…
Nous sommes en 2045. Le monde est devenu une immense décharge publique et les hommes s’entassent dans des mobil-homes sordides, empilés comme des immeubles du troisième type. Pour tuer le temps, vivre par procuration, oublier la misère, ils trompent leur ennui avec des lunettes de réalités et rejoignent l’Oasis, pour vivre à travers leurs avatars des aventures dans des mondes exotiques et colorés (on va le dire comme ça). L’opium du peuple ! Wade Watts, un ado accro (pléonasme), se balade de monde en monde, se bastonne avec des aliens belliqueux ou fait des courses de voitures où il affronte King Kong. Mais le créateur de l’Oasis est mort depuis quelques années déjà et il a décidé de léguer son bébé à plusieurs milliards de $ à celui qui trouvera trois clés, cachés dans ses innombrables mondes. Dans cette chasse au trésor, Wade est sur la piste de départ mais aussi la moitié de l’humanité connectée et un homme d’affaires très méchant…
Voilà pour le scénario écrit par l’auteur du bouquin, Ernest Cline, et ce nullard de Zak Penn, l’auteur immortel d’Elektra, X-Men l’affrontement final ou Hulk version Louis Leterrier. Que des daubes, ou presque. Toute sa vie, Spielberg a bossé avec des pointures du scénario comme Steve Zaillan, David Koepp, Tony Kushner ou Ethan Coen et là, il se coltine un débutant qui n’a signé que deux épisodes de série TV et un nullard abonné à la médiocrité absolue. Résultat, le film ressemble à un Fort Boyard dans la réalité virtuelle, avec le père Fouras qui pose une série d’énigmes débiles et donne des clés pour accéder à un niveau supérieur. Puis, tous les quarts d’heure, une grosse séquence d’action (en voitures, bastons, à l’intérieur d’un film…). C’est juste le néant absolu, avec des trous dans la narration, des coups de théâtre improbables et des persos à peine esquissés. Pour masquer le vide, les scénaristes égrènent, comme dans le bouquin, une série de clins d’œil et de références à la culture geek (oh, Godzilla, Chucky, la DeLorean, un T-Rex…) que le fan va s’amuser à comptabiliser, décrypter (et cette formule magique, elle vient… d’Excalibur, bien sûr !). Alors, pourquoi Spielberg a-t-il embauché ces deux tocards ? Parce qu’il pense que le spectateur a seulement besoin d’énigmes débiles et de bastons avec 10 000 guerriers qui se foutent sur la gueule, comme dans un machin numérique de Peter Jackson ? Parce qu’il est sûr que sa mise en scène va sublimer ce script en dessous du niveau de la mer ?
Mais le second problème du film, c’est la mise en scène ou plutôt la non mise en scène de Spielberg. Le film s’ouvre sur la chanson de Van Halen, Jump, prototype du rock FM ringard. Spielberg aurait pu choisir n’importe quel tube des années 80 et il choisit ce truc moisi, parfait pour une pub, qui même à l’époque était du simili hard surproduit. Bref, ça commence mal…
Ready Player One dure 140 interminables minutes et la plus grande partie se déroule dans la réalité virtuelle avec des avatars ressemblant à des Minimoys (Luc, tu peux demander des droits d’auteur). Bref, c’est d’une laideur absolue. Sur le plan formel, Ready Player One s’apparente à une cinématique de jeux vidéo, moins excitant qu’un Call of Duty, Zelda ou Assassin’s Creed. Comment le metteur en scène de Jaws ou Il faut sauver le soldat Ryan, qui a inventé quelques-uns des plans les plus iconiques du cinéma, peut-il recopier, compiler les cinématiques de jeux à la mode ? C’est simplement incompréhensible ? Et insupportable ! Pourtant, lors d’une séquence d’anthologie, Spielberg montre enfin ses muscles et tue la concurrence. Dans la scène du cinéma (attention spoiler), Spielberg plonge son héros et ses quatre potes « à l’intérieur » du film Shining. Nous sommes dans les décors du film de Kubrick, on se balade dans les couloirs de l’Hotel Overlook, on retrouve l’ascenseur qui dégueule de sang, puis on arrive dans la chambre 237, avant d’affronter des zombies géants dans le labyrinthe. Pendant quelques minutes, on sent Spielberg enfin concerné. Il reprend la main sur son armée d’informaticiens appliqués et laisse enfin éclater son génie étincelant. C’est dingue, supérieurement réalisé, cela génère une inquiétante étrangeté et Spielberg nous propulse enfin dans un ailleurs, une nouvelle dimension (j’ai l’impression que cette idée va être maintenant décliné par tout le monde). Ce film dans le film, avant la danse naze avec des zombies, est tellement enthousiasmant que j’en ai poussé un cri de jouissance !
Alors que les premières critiques tombent, j’ai pu lire çà et là que Ready Player One était un vrai film d’auteur, profond et radical, doublé d’un autoportrait du maître (le héros ressemble à Spielberg à 20 ans et le concepteur du jeu vidéo, Halliday, façonne les rêves de ces concitoyens, comme Spielby depuis 40 ans). Mais quand tu as dit ça, qu’est-ce que tu as dit, en quoi est-ce intéressant que Spielberg avance (dé)masqué dans plusieurs personnages ? Le film est définitivement vide, froid, désincarné et bas du front et à la fin, Spielberg nous balance sa double morale débile : les copains, c’est bien, et la réalité, c’est mieux que le virtuel. Sans dec’, ma poule !
Spielberg a 71 ans. Il signe un film de vieux destiné à des jeunes qui risquent de trouver son bouzin pour le moins dépassé, obsolète et à côté de la plaque.
Spielby, tu nous dois définitivement une revanche…
Ready Player One
Réalisé par Steven Spielberg
Avec Tye Sheridan, Olivia Cooke, Ben Mendelsohn
En salles le 28 mars 2018
« Depuis le pas très funky Indiana Jones et le royaume du crâne de cristal (2008) »
Pas très funky, c’est gentil, c’était un vrai viol ce film (cf. l’épisode de South Park sur le sujet).
J’avais quand même admiré la mise en scène de certaines séquences, graphiquement sublimes.
Je ne peux qu’être d’accord avec mosieur Godin. Une fois n’est pas coutûme.
Ce film est un film de vieux. Pas au sens où il serait anti par réflexe générationnel mais simplement parce que Spielberg a fait un film sur quelque chose qu’il fantasme complètement et en reprenant les critiques réacs de base des anti. La fin portnawak et sa morale simpliste sent la sénilité.
Le virtuel, les jeux vidéos, la technophilie imbécile, Apple, Musk, Job, les geeks, tout ça et bien plus encore mérite des millions de critiques mais le truc bien pensant à base de la réalité c’est mieux que le virtuel alors que le film vend – sur vend – de la cinématique boursoufflante à base de CGI hors de prix made in Holl… On se fout de qui baurdhell ?
J’ai adoré ce film dingue dans lequel j’ai retrouvé de très nombreux éléments typiquement spielbergiens.
Si le scénario est simple, il ne l’est pas moins que de très nombreux films qui ont contribué a l’émergence de la pop culture actuelle.
J’espère que le prochain film comblera mieux tes attentes de spectateur.
Tu l’as compris je suis pour pour ma part subjugué par ce formidable pas de côté. Je le trouve plutôt effronté pour ces 71 ans papy Steven.
Si vous trouvez ce film nul alors vous devez également trouver toutes les prods de Spielberg des années 80 nulles parce c’est exactement pareil sauf que c’est un film d’aujourd’hui qui parle en plus de la société d’aujourd’hui, de comment elle pourrait évoluer tout en parlant de son auteur (un regard sur ce qu’il a été, ce qu’il est) et de son oeuvre. Je sais pas ce qu’il faut de plus… Trop divertissant et léger comme les films l’étaient avant peut-être…
J’aimais bien, les films Amblin que j’ai vu à leur sortie. Là, j’ai l’impression que Spielberg est à côté de la plaque. Et ça n’a pas le charme de ces films des années 80 qu’il cite copieusement.
Rarement lu une critique aussi à côté de la plaque. Faut changer d’activité monsieur.
C’est pas un bon film mais je suis toujours étonné par les retours des critiques après la projo presse qui ont crié au chef d’oeuvre.
Je veux bien que tous les goûts sont dans la nature mais ce grand écart dans les critiques est vraiment troublant…
Bah non. Il y a des critiques qui ont adoré, d’autre beaucoup moins. Comme les spectateurs lambda à la sortie du ciné…
Aucun problème avec ta critique qui est surtout l’expression d’une grande déception.
Je viens de voir le film et je suis resté sans voix… Votre analyse reflète exactement ce que j’ai ressenti.
Le film manque complètement le côté fascinant de la réalité virtuelle et ses intrications avec le réel.
Entre un monde réel détruit et une réalité virtuelle où les seuls plaisirs consistent à tout casser avec frénésie, où est l’Oasis? Et en quoi l’un ou l’autre de ces mondes serait-il meilleur, plus agréable et attrayant que l’autre?
Un film ridicule qui s’apparente plus à un blog vidéo pour les jeux en ligne qu’à une oeuvre de Spielberg!
Désolé mais c’est votre critique qui celle d’un vieux. Le film met à l’amende toutes les grosse productions actuelles, un film jeune fait par un papy de 71 ans. Un grand film : vision d’auteur, mise en scène exaltante, utilisation intelligente de la nostalgie et le scénario excellent. Rappelons qu’un bon scénario n’est pas forcément une histoire complexe mais une structure narrative qui se tient autour de laquelle se greffent des univers et des personnages (exemple mad max fury road ou conan le Barbare). Ce qui est étrange c’est que vous réclamiez de Spielberg qu’il fasse des films comme il y a 15 ans alors que le bonhomme a évolué… Il faudrait critiquer les films pour ce qu’ils sont non en fonction de ce que l’on aurait voulu qu’ils soient. Sans rancunes.
Scénario? Structure narrative? Mise à l’amende des grosses productions actuelles? Ah bon???
Deux heures de « Shoot’em up » et pis c’est tout…
Alors se film est une daube ultime! même pas un nanar ou une série Z (que j’apprécie). Ce qui l’ont apprécié les (pseudo geektropàlamode)ont une culture de l’animation/SF/Japanime/films 70″-80″ au niveaux des pâquerettes! Ce film est une insulte à cette CULTURE.
C’est comme si le film avait étaient réalisé par les pseudo « geek » de IOI du film! Les 40 premières minute c’est filmé comme un film de transformer à vomir, le character design des persos sont médiocre (cela aurait intéressant si l’univers VR était hyper réaliste au niveau de l’image de synthèse, pour que la transition vers la réalité soit ténu mais ont dirait Arthur est les minimoys sous stéroïde les textures sont d’un autre âge) et bon dieu que j’attendais ce film comme le Graal qui aurait pu cristalliser cette culture (Spielberg était totalement légitime pour boucler la boucle comme l’un des précurseurs du cinéma « moderne »), sans rien me spoiler pour pouvoir l’apprécier pleinement. Cela à était pénible pour moi de rester jusqu’à la fin alors que j’ai eu la chance de voir des Spielberg/Hughes/Zemeckis/Dante/Lucas/Kurosawa au cinéma.
Ce n’est pas un film d’auteur c’est un vomis de groupe de com ayant une culture assez sommaire, de surface et qui ont mis toutes leurs idées et ensuite dans un broyeur pour faire une pâté infâme qu’est ce film.
Un film peu avoir une histoire simple est êtres un chef d’œuvre, mais faire un film simpliste pour tous le mondes en pré-digérant tous c’est une insulte pour les spectateurs. (beaucoup de mes films culte ont une histoire basique)
Ce qui m’énerve le plus c’est que beaucoup de gens ont appréciés ce film!!! Je ne comprend pas, ce film et une pure sucette d’édulcorant au cyanure.
Entièrement d’accord avec le Sieur Godin; sauf pour une chose : sa salve inconsidérée contre Van Halen. Ce dernier ne méritait nullement cela. D’autant qu’à lui tout seul, le titre Jump a beaucoup plus marqué les mémoires de son empreinte musicale que la plupart des « tubes » de ces 18 dernières années.
Ceci dit, Van Halen méritait encore moins de figurer dans la « playlist » de Spielberg dont l’inspiration semble décidément se tarir à vue d’oeil depuis plusieurs années. Il restera un réalisateur important qui aura essentiellement marqué les 70’s/80’s. Il faudra qu’il s’y fasse, on ne peut être et avoir été…