
Pilote Automatique – The Player (NBC)
L’histoire : Alex Kane, ancien soldat au passé très violent aujourd’hui reconverti dans la sécurité à Las Vegas, s’apprête à refaire sa vie avec son ex-femme. Mais cette dernière se fait brutalement assassiner. Complètement désemparé et désigné coupable du meurtre, voilà qu’on lui propose de participer à un jeu dans laquelle la vie d’innocents est mis dans la balance pour le bon plaisir des plus riches de ce monde. Ça tombe bien, Alex est joueur. Et NBC aussi il faut croire…
Autour de la série : Derrière le projet, on retrouve les producteurs exécutifs de The Blacklist, John Rogers et Bharat Nalluri. Pour le cast, on a sorti deux gros bras avec Philip Winchester, fraîchement débarqué de Strike Back et Wesley Snipes, vétéran des films d’action que l’on ne présente plus.
Si on excepte la médiocre version télé du Transporteur dernièrement, le constat frise la morne plaine. Encore en activité, on peut toutefois citer Strike Back, qui entame d’ailleurs sa fin de parcours, tout comme Banshee, LA référence du genre (que tout amateur d’action de grande qualité se doit de voir absolument !). Et si on remonte depuis le début des années 2000, on ne peut pas vraiment dire que l’on ait été pourvu décemment, que ce soit au niveau quantitatif ou qualitatif. Excepté les super héros ou les shows qui croisent leur propre ADN avec de l’action (24, Alias, The Blacklist, etc.), il n’existe véritablement presque plus de séries pures dans le domaine, et qui soient réussies, encore moins. Un désamour pour le genre, difficile à ne pas traiter de manière superficiel, et dans lequelle les Networks se gardent bien de s’engouffrer. C’est pourquoi The Player figure comme un outsider ici, au milieu d’un tableau télévisuel dépourvu donc de concurrence. Mais c’est surtout un pari de la part de NBC, à la fois incompréhensible tout autant qu’il est surprenant.
Car The Player ne cisèle pas son pilote avec de la dentelle mais opte plutôt pour un martèlement du spectaculaire à tout prix. C’est qu’il court comme un dératé le Alex Cane ! Entre saut d’un immeuble, course poursuite et gunfight, il n’a pas le temps de souffler. A peine pour se recueillir sur la mort de sa femme en fait (il n’a pas le temps on vous dit !). La faute a un consortium secret plus fort que la NSA et la CIA réunis, qui mise à coups de millions de dollars sur la réussite ou l’échec des missions de l’ex-militaire à sauver des innocents. Et si au départ il refuse, les parieurs richissimes instigateurs du projet ont de quoi le convaincre. Grâce à un système informatique imparable, l’obscur organisme permet de prédire les crimes à venir à 100% (rentrez chez vous les précogs !). Le temps que l’on rappelle à Alex Cane qu’il est « une bonne personne » malgré son passé de tueur, le voilà qu’il se jette dans la mêlée, en plein désir de rédemption. Mais c’est aussi l’occasion pour lui de chercher l’assassin de sa femme, un fil conducteur bien maigre certes, mais qui permet de nourrir au minimum un des rares enjeux de The Player.
Marchant sans vergogne et avec un gros zeste d’hypocrisie dans les pas de Person of Interest, (comparativement, La Machine de Jonathan Nolan est bonne à mettre au rabais d’ailleurs !), The Player ne cherche donc pas la crédibilité, loin de là. Passé un scénario assez abscons et évidemment ultra prétexte, Philip Winchester montre tout alors l’éclat de son talent, très physique à l’écran. L’acteur n’est pas doublé, se lance à corps perdu dans l’action et donne volontiers de sa personne. Entre deadline impossible à tenir, tôles froissées et distribution de bastos pas forcément nécessaires, The Player tranche dans la cour des justiciers du petit écran. Là où des personnages mythiques comme Sam Beckett (Code Quantum) ou Jarod (Le Caméléon) changeaient de peau pour mieux rétablir la justice, où quand l’identité importait peu pour mieux la servir (Person of Interest), The Player répond à l’inverse : avec bruits et fracas, sans subtilité aucune et possédée par une certaine efficacité jubilatoire, il faut bien l’admettre. Face à Alex Cane, on découvre un antagoniste taillé sur mesure, en la personne de Wesley Snipes, cabotin en diable. Tantôt roublard, léger ou plus inquiétant, le personnage ne dépeint pas non plus une énorme ambiguïté, mais sait mettre en valeur sa présence à l’écran.
Quoiqu’il en soit, The Player a des airs de roulettes russes pour NBC. On peut déjà s’interroger sur la décision de son existence durant cette rentrée des séries, déjà pas vraiment enthousiasmante au vu des nouveaux pilotes proposé au public. On lui concédera par contre sans problème une sincérité désarmante. Elle ne bluffe pas, ne prétend à rien et s’engage à n’être définitivement qu’une série sans ambages, ni prise de tête. Elle accomplit l’objectif de se dérouler tambour battant, faisant fi de tout bon sens scénaristique pour colmater le tout avec de l’action pachydermique au possible.
Avec une prévisibilité certaine et un gros poil de plaisir coupable, The Player n’a donc d’autre choix que d’assumer son statut de grosse cylindrée testostéronée. On la regarde pour absorber gloutonnement une dose hebdomadaire de spectaculaire, pas toujours bien (di)gérée, rien de plus. Et après tout pourquoi pas ? En ces temps de disette dans le domaine, il serait d’ailleurs peut-être dommage de bouder la proposition de NBC. Les jeux ne sont donc pas encore faits pour The Player mais le show se doit d’obtenir une meilleure main pour les épisodes à venir, sous peine de voir sa cote de divertissement sympathique s’effondrer rapidement…
Episode 2 ? Du guilty pleasure, on n’en trouve pas tous les jours. Mais il faudrait qu’un semblant de tissu scénaristique prenne de l’épaisseur avec le temps. Car les téléspectateurs risquent tous de se coucher avant que la partie ne commence vraiment…
THE PLAYER, SAISON 1, EPISODE 1 « Pilot » (NBC)
Ecrit par : John Roger
Réalisé par : Bharat Nalluri
Avec : Philippe Winchster (Alex Kane), Wesley Snipes (Mr Johnson), Charity Wakefield (Cassandra King)