On a lu…Uncanny X-Force (T.01) – La solution Apocalypse

On a lu…Uncanny X-Force (T.01) – La solution Apocalypse

Note de l'auteur
On l’attendait depuis un moment, on ne l’espérait plus et pourtant voilà qu’arrive enfin la meilleure série de Rick Remender écrite pour Marvel. Oubliez Uncanny Avengers, Captain America et Axis (surtout Axis), la grande œuvre d’un des scénaristes vedettes de la maison des idées est bel et bien cette unité spéciale de mutants prêt à tout pour remplir leur mission quitte à y perdre leur vie et leur âme.

 

212264_20101011182507_largeAoût 1991. Succédant au Nouveaux Mutants, X-Force est lancée par Fabian Nicieza et le dessinateur vedette Rob Liefeld. Pionnière des séries ridiculement bodybuildées de l’époque¹, la série raconte, avec la finesse d’un pachyderme dans un magasin de porcelaine, les aventures d’une équipe prônant une attitude proactive en opposition à la politique attentiste des X-men alors jugée désuète. Si le groupe (initialement composé de Cable, Rocket, Big-Bang, Domino, Shatterstar, Warpath et Feral) fut plusieurs fois remanié au fil du temps, l’état d’esprit perdura² et il fut toujours à part dans l’univers mutants. Ce n’est pourtant qu’avec l’arrivée de Rick Remender que la série gagna largement en intérêt. La raison ? Pour la première fois les membres de l’équipe doivent véritablement faire face aux conséquences de la violence de leurs actes.

 

Considérée à l’origine comme des parias, X-Force fut peu à peu tolérée pour devenir avec le temps un mal nécessaire. Cyclope l’utilise d’ailleurs comme une unité secrète destinée à faire le sale boulot lors de la relance de la série en 2008 par Craig Kyle, Christopher Yost et Clayton Crain. Malheureusement, là encore, le titre n’est pas à la hauteur de ses ambitions. La question de la violence, du fanatisme, des enfants soldats et de la rédemption est trop souvent mise de coté au profit d’un travail graphique intéressant mais vain. La faute notamment à un choix de personnage privilégiant la jeunesse au détriment de la profondeur. Warpath, Félina et X-23 ont trop peu de bouteilles pour ce genre d’équipe et jamais les scénaristes n’ont su en tirer le meilleur.

 

UncannyX-Force51-03Quand il lance sa série en 2010, la première décision de Rick Remender sera de bâtir un groupe plus cohérent avec son ambition en ne gardant de la précédente mouture que Wolverine et Angel. Immensément populaire, le mutant griffu sera non seulement à l’origine de la création de la nouvelle équipe mais également le modèle qui servira au choix des autres membres. Uncanny X-Force sera donc composée de Wolverine, Psylocke, Archangel, Fantomex et Deadpool. Un choix réfléchi de la part du scénariste. En effet, ces personnages sont des combattants redoutables et ont en commun un problème d’identité assez conséquent.

 

Le combat intérieur entre l’homme et l’animal est un des thèmes parcourant toute la vie éditoriale de Wolverine. Il en est de même pour Warren Worthington III alias Angel dont la part sombre (Archangel) menace à tout moment de prendre le contrôle de son être. Télépathe devenue une ninja après avoir perdue la mémoire, Psylocke a dû également combattre une femme prétendant qu’elle était un imposteur. Quand à Fantomex, s’il semble assez sain d’esprit, on rappellera qu’il possède trois cerveaux et qu’il fut élevé dans un monde virtuel afin de devenir un tueur de mutant. Au final, il semblerait que seul le célèbre Deadpool soit le plus stable de la bande. C’est peu dire alors que l’équipe ne part pas gagnante, surtout face à un ennemi aussi terrible qu’Apocalypse.

 

UncannyX-Force04-01Convaincu de la supériorité et de la domination du puissant sur le faible, ce puissant ennemi des X-men depuis sa création en 1986 (dans X-Factor #5 – Tapped Out) est au centre d’une première histoire passionnante dont la foudroyante conclusion pose le ton. Fini le temps où les combats sanglants étaient fun et drôle, dans Uncanny X-Force la violence a de réels et terribles conséquences. Ces super héros prêts à aller jusqu’au bout seront-il capable de stopper définitivement un être, dont la malveillance n’est plus à prouver, alors qu’il n’est qu’un enfant ? Face à ce dilemme classique mais tout à fait pertinent dans le contexte de la série, Rick Remender brosse des personnages portant douloureusement le poids de leurs actes.

 

Le scénariste s’emploie à utiliser les mêmes techniques qui ont fait leurs preuves dans son mémorable Fear Agent. Un rythme trépidant, une grande capacité à créer le suspense, un art du cliffhanger et une jubilation certaine dans l’emploi de concept de SF au service du personnage. On pense avant tout au personnage de Fantomex, création remarquable de Grant Morrison dans New X-men que Remender emploie à merveille. La deuxième histoire de ce tome, Nation Deathlok, reprend ainsi le concept du Monde, cet espace virtuel incroyable dans lequel a grandi le voleur amoureux de Fantomex. Du reste, les autres membres de l’équipe sont tout aussi passionnants. Si Remender à peu de latitude avec un personnage aussi usité que Wolverine, il n’en reste pas moins que le mutant griffu retrouve une superbe qu’il n’avait pas eu depuis longtemps. Il en va de même pour un Deadpool trouvant une place bien à part dans le groupe. Sous la plume de Remender, il devient une sorte de conscience décalée, folle mais totalement nécessaire. Le couple Angel/Psylocke quand à lui fonctionne à merveille notamment grâce à un triangle amoureux avec Fantomex.

 

uxf1Composée d’un prologue, d’un épisode « bonus » et des dix premiers épisodes de la série, Uncanny X-Force se paye de plus le luxe d’être incroyablement bien dessinée par deux artistes remarquables. Jerome Opena (déjà à l’œuvre sur Fear Agent) et Esad Ribic (le magnifique Thor – God of Thunder de Jason Aaron et le très attendu Secret Wars) composent des épisodes magnifiques portés par un grand souffle épique, une amplitude dans la construction des pages et un travail remarquable sur les corps. Le succès critique de la série et la liberté donnée à une équipe créatrice ayant apportée un regard neuf sur l’univers mutants portèrent ses fruits et eurent des conséquences sur l’univers Marvel de manière général. Ainsi, la redistribution des séries, des auteurs et des dessinateurs et le nouveau départ que représentait Marvel Now en 2012 n’aurait peut-être pas eu lieu sans Uncanny X-Force et Daredevil de Mark Waid.

 

En choisissant pour l’album une couverture médiocre de Clayton Crain au détriment des magnifiques compositions de Jerome Opena, l’éditeur Panini souhaite conserver une certaine cohérence avec la précédente série X-Force mais ne soyons pas dupe. Uncanny X-Force est d’une qualité largement supérieure et joue dans la cour des grands. Définitivement, la série s’impose comme une des meilleures productions de son époque grâce à une équipe artistique de qualité et une maturité du propos faisant du comics le titre mutant le plus passionnant et intelligent depuis New X-Men de Grant Morrison et avec Wolverine & The X-men de Jason Aaron dont on vous reparle très vite..

 

 

 

 

uncanny x-force tome 1

 

 

 

Uncanny X-Force – Tome 1 : La solution Apocalypse (Marvel Deluxe, Panini Comics, Marvel Comics) comprend les épisodes US de Wolverine : Road to Hell #1 – The First Day of the Rest of Your Life, Uncanny X-Force #1 à 10 et #5.1.

Écrit par Rick Remender

Dessiné par Jerome Opena (#1 à #4), Esac Ribic (#5 à #7), Billy Tan (#8 et #9), Richard Elson (#9), Rafael Alburquerque (#5.1) et Leonardo Manco (Road to Hell)

Prix : 29,00 €

Critique basée sur les épisodes parus dans la revue X-Men Universe

 

 

 

 

¹ Dont les plus éminents avatars s’épanouiront chez Image Comics, studio fondé notamment par Rob Liefeld.

² Hormis la parenthèse X-Statix, série hors-norme de Peter Milligan et Mike Allred qu’on espère voir réédité chez nous.

 

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