
#Critique Une génération française (T. 5 Vichy capitale) de Thierry Gloris et Manuel Garcia
Dans une France troublée en 1940, trois destins se mêlent, s’aident ou s’affrontent. Le monde bascule pour Brettin d’Arçonet, militaire droit dans ses bottes et accro au maréchal Pétain. Sa fidélité à l’ordre établi et ses valeurs peuvent-elles s’accommoder longtemps avec le supplice d’un peuple et le démembrement de sa patrie ?
L’histoire : Pétain, la figure ultime du paternalisme, est le dernier recours qu’envisagent et adoubent nombre de Français alors que la France est occupée par la barbarie nazie. C’est aussi le vœu du lieutenant Tanguy Brettin d’Arçonet. Fils de militaire qui combat la gueuse, la République, il est fidèle à son clan, à sa famille et à sa patrie. Mais cette dernière va vite le faire déchanter et douter.
Mon avis : le parti pris est le bon dans cette série en six épisodes et trois diptyques. Trois héros de la Seconde Guerre mondiale : une résistante, un soldat fidèle à Vichy et un autre à la France qui ne courbe pas le dos. Dans ce tome 5, on suit la route de Tanguy qui campe la vieille noblesse des armes, partisane de l’alliance du sabre et du goupillon. Avec un père plus qu’encombrant, il lui est difficile de s’épanouir. Tant sur le plan personnel que professionnel. C’est un soldat, probablement homosexuel, dans un milieu de XXe siècle peu favorable. C’est aussi un officier qui, s’il ne combat pas ouvertement les thèses de Vichy sur la faute aux juifs, aux francs-maçons et aux cocos, se pose plus de questions que la moyenne. Ce personnage est beaucoup plus complexe que le nervi d’extrême-droite qu’il semble être au début.
C’est aussi la cuisine interne des politiques et hommes d’armes durant ces années sombres qui est mise à jour. On comprend mieux comment cela s’est passé entre un maréchal Pétain, persuadé que l’armistice et l’Occupation étaient un moindre mal pour les Français, et un Pierre Laval, loin de ses idéaux de jeunesse, qui ne jure que par la collaboration et la création de l’État français. Une petite leçon de la grande Histoire.
On prend un vrai plaisir à se perdre et à se retrouver dans cette série pour l’instant de cinq BD qui sera bientôt conclue. On est emporté par le scénario tout en cultivant nos connaissances. Idem dans ce cinquième opus. Pari réussi.
En accompagnement : Le Procès de Vichy: Pucheu, Pétain, Laval de Fred Kupferman.
Si vous aimez : l’eau Vichy Célestins et le tourisme thermal.
Autour de la BD : c’est l’avant-dernier rendez-vous, avec toujours Thierry Gloris, un auteur référent dans les BD d’histoire, au scénario et Manuel Garcia au crayon. Le dessinateur espagnol s’est mis en valeur notamment sur Gengis Khan. Il a travaillé sur les deux tomes de la série qui concernaient le héros Tanguy Brettin d’Arçonet.
Extraits : « Le maréchal est très satisfait de votre discrète efficacité. Il m’a chargé officieusement de vous proposer un poste au IIe bureau. »
« Les services secrets ? Qui veut-il que j’espionne ? Les communistes ? Les gaullistes ? »
« Non, Pierre Laval. »
« Comment ? Mais c’est son vice-président ?! »
« La politique, mon fils, prend parfois des méandres insoupçonnés. Laval manœuvre dans notre dos. Il cherche à négocier directement avec les Allemands. »
« Pour quelle raison ? »
« Le pouvoir ! Il veut faire du maréchal une potiche ! »
Écrit par Thierry Gloris
Dessiné par Manuel Garcia
Édité par Soleil