#Critique X-Men – Surdoués de Joss Whedon et John Cassaday

#Critique X-Men – Surdoués de Joss Whedon et John Cassaday

Note de l'auteur

À l’occasion de ses vingt ans, Panini Comics lance une nouvelle collection anthologique destinée autant aux lecteurs de super-slips qu’à des amateurs de bandes dessinées européennes sensibles aux couvertures inédites réalisées par d’illustres dessinateurs européens. Parmi la première salve d’albums, il en est un qui a retenu toute notre attention. Quand le créateur d’une des deux plus grandes fictions télévisées fantastiques des années 90 rencontre les mutants les plus célèbres de l’éditeur, cela devrait provoquer des étincelles. Non ?

 

x-men surdoués - 3Ça raconte quoi ?

Peu de temps après la terrible attaque de Magneto sur New York qui a vu la mort de Jean Grey et du maître du magnétisme, le professeur Xavier a quitté les X-men. À charge aux survivants de relancer la machine et de poursuivre le rêve de paix et de tolérance de leur mentor. Une tâche ardue confiée à Cyclope, Wolverine, le Fauve, Kitty Pryde et Emma Frost qui vont devoir faire face à une scientifique qui affirme avoir trouvé un vaccin contre le gène mutant.

 

C’est de qui ?

A-t-on vraiment besoin de le présenter ? Créateur de la série Buffy the Vampire Slayer, Angel et Firefly à l’époque de la publication de la série, Joss Whedon est également devenu depuis le réalisateur des deux premiers films Avengers. Au dessin, il s’appuie sur John Cassaday, à l’époque un dessinateur vedette grâce notamment au chef-d’œuvre Planetary.

 

x-men surdoués - 2Pourquoi choisir cet album parmi les quatre autres qui sortent ?

Pas pour les couvertures. Ce n’est pas qu’elles soient moches, bien au contraire pour certaines, mais il faut bien reconnaître que ce genre de considération nous passent bien au-dessus. À toi, amateur de BD qui ne pense qu’à la belle couverture ou aux commissions que tu extrairas des dessinateurs que tu rencontreras, sache qu’on est content pour toi si tu achètes ce tome pour la couverture de Lewis Trondheim, mais ce qui compte dans la BD c’est son contenu.

 

Bon, mais pourquoi ne pas avoir parlé du Miss Marvel ?

Parce qu’on l’a déjà fait ici.

 

Et pourquoi ne pas avoir parlé du Deadpool ?

Parce qu’on aime bien Deadpool mais sans plus.

 

x-men surdoués - 6Et pourquoi pas One More Day ?

Parce c’est de la merde.

 

Et donc les X-men alors ?

Il nous apparaissait intéressant de revenir sur un cycle populaire mais pas dénué de défauts. Mais revoyons la scène au ralenti. Après le départ de Grant Morrison en 2004, Marvel décida d’invalider certaines des actions prises par le scénariste. En découla alors un rétropédalage grotesque de ce qui est, encore à ce jour, la plus grande période des X-men depuis le départ de Chris Claremont. Quelques mois plus tard, l’éditeur décide néanmoins de relancer la machine avec la même technique : une nouvelle série et un nom fort à la barre. Ce titre sera Astonishing X-men par Joss Whedon.

 

Même en occultant toute déclaration ou propos promotionnel, l’amour du papa de Buffy pour les X-men est évident pour qui connaît son œuvre. On pense bien sur à Willow la rousse dont la dépendance à une magie qu’elle contrôle de plus en plus et son basculement vers le côté obscur renvoi au personnage de Jean Grey et à la saga du Phénix Noir. Plus simplement, on retrouve dans Buffy et dans les X-men de Claremont cette même notion de groupe/famille ou bien encore un leadership assumé par une femme¹.

 

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Il n’est donc guère étonnant qu’Astonishing X-men s’articule rapidement autour d’un conflit entre deux figures féminines : Emma Frost et Kitty Pryde. Volontairement ou non, ces deux femmes incarnent chacune l’une des deux caractéristiques du travail de Joss Whedon sur le comics. L’ancienne membre du Club des Damnés fut une des figures maîtresses du cycle de Grant Morrison. En la conservant et en validant le nouveau couple qu’elle forme avec Cyclope, le créateur de Buffy valide un cycle dont l’extrémisme fit peur à Marvel. Mais en partie du moins car avec le retour de Kitty Pryde, le scénariste veut reconnecter les lecteurs avec les X-men, sous entendu ceux de l’âge d’or de Chris Claremont.

 

Si ce retour aux sources passe par le retour des costumes (avec un discours appuyé et un brin grossier de Cyclope et par-delà de Joss Whedon), il est surtout mis en avant par le retour de celle qui fut la benjamine des X-men. À ce titre, le premier épisode est très parlant avec Kitty arpentant les couloirs de l’école et se souvenant du passé. On s’étonnera guère également de voir le retour de Colossus, alors considéré comme mort, donnant l’occasion d’une scène de lancement de Wolverine comme il était usuel fut un temps.

 

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« On va la refaire à l’ancienne » dixit le mutant griffu et c’est exactement le sentiment qui transparaît à la lecture de ces six premiers épisodes. Une impression de retrouver les sensations d’antan. Et si foncièrement cela est fait correctement, cette approche nostalgique s’apparente aussi à du surplace. Pour une série qui s’est longtemps caractérisée par une audace sans limite et une capacité à se remettre sans cesse en question, cela est un comble.

 

Autre problème : John Cassaday. Hasard du calendrier des rééditions, il est intéressant de comparer son travail sur X-men avec celui sur Planetary. L’occasion de se rendre compte que la narration séquentielle tient tout autant à un bon dessinateur qu’à un bon scénariste fin connaisseur de son médium. Dessinateur capable du meilleur quand il est bien secondé, Cassaday semble ici très vite dépassé. S’il est un bon scénariste, Whedon n’est pas Warren Ellis et sa compréhension du langage de la BD reste limitée. Le rythme semble lourd voire figé et la narration s’en ressent. Ceci est vraiment dommage surtout compte tenu des quelques passages brillants (notamment le premier épisode) où on dépasse la simple illustration.

 

Bonne histoire pour ceux qui ne connaissent pas ou peu les X-men, ou retrouvailles charmantes pour ceux qui veulent revenir aux sensations de leur jeunesse, Astonishing X-men apparaît avec le temps comme la première série à tenter de renouer avec le passé pour plaire aux lecteurs. Démarche difficile qui, si elle a rencontré un beau succès à l’époque, n’en reste pas moins décevant pour ceux qui appréciait l’avant-gardisme de la série.

 

Un dernier mot ?

Si ces premiers épisodes forment une saga complète sympathique et pouvant être lue par n’importe qui, la nature même de la collection dont il est issu fera que la suite ne sera pas disponible dans ce format. À toi donc qui aimerais découvrir tout le cycle de Joss Whedon, nous te conseillons de t’orienter vers les deux gros volumes Marvel Icons consacrés à la série.

 

Et les autres ouvrages à venir ?

Après la salve du début d’année avec les X-men de Joss Whedon et John Cassaday, Deadpool de Duane Swierczynski, Miss Marvel et le totalement évitable Spider-Man – One More Day, va débouler en juin un combo de qualité avec le Punisher de Garth Ennis et Steve Dillon mais surtout la géniale mini-série Wolverine de Chris Claremont et Frank Miller. Ce dernier sera encore à l’honneur avec ses récits qui composeront un tome pour Daredevil et un autre pour Elektra. En octobre enfin, on passera rapidement et sans regret sur Les Gardiens de la Galaxie et les Avengers selon Bendis pour retenir le Hulk Gris de Jeph Loeb, mais surtout le trop méconnu Fantastic Four 1234 de Grant Morrison et Jae Lee.

 

 

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X-men – Surdoués (20 ans Panini Comics, Panini Comics, Marvel Comics) comprend les épisodes US de Astonishing X-men #1 à #6
Écrit par Joss Whedon
Dessiné par John Cassaday

¹ On oublie souvent que les X-men sous Claremont est un groupe dont les mutants les plus puissants sont des femmes et qui fut dirigé pendant des années par Tornade, tout cela dans les années 80.

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