
« Dernier meurtre avant la fin du monde » : enquête policière pré-apocalypse
L’histoire : Ça y est, c’est la fin, ou presque. Un astéroïde géant, doté du doux surnom de Maïa, va entrer en collision avec la Terre, dans six mois. Où exactement ? Personne ne le sait. Hank Palace est un banal flic de province, qui vit à Concord. Si les suicides sont à la mode, celui de Peter Zell lui semble suspect. Suffisamment pour lancer une enquête, alors que les militaires ont les pleins pouvoirs et que sa soeur décide de l’appeler sans cesse pour retrouver son mari, un crétin fini.
Mon avis : Polar noir très agréable, Dernier meurtre avant la fin du monde présente un flic qui décide coûte que coûte de s’accrocher à son travail. Autour de lui, une galerie de personnages plus ou moins perdus. Que faire quand on sait qu’une catastrophe va nous tomber sur la tête ?
Hank Palace, lui, a choisi. Il veut savoir ce qui s’est passé, qui a tué Peter Zell, parce qu’il en est sûr, c’est un meurtre, pas un suicide. L’atmosphère de ce roman est très agréable, et assez surprenante. On se sent réellement dans un polar noir, au milieu d’une ville en perdition. La fin du monde est un prétexte pour distiller l’impression d’être dans Sin City. Les moquettes sont sales, les gens se remettent à fumer, les petits assureurs cachent des secrets… Premier volant d’une trilogie Dernier meurtre… se lit aussi comme une aventure en un volume, ce qui est fortement appréciable, tout en gardant une part de mystère pour la suite.
Bon, certes Hank Palace est un cliché : le devoir d’abord (surtout si la fille est mignonne…*air connu*), une histoire familiale difficile, une grande empathie. Bon, il n’est pas cynique et décomplexé non plus, ce qui en fait un personnage auquel nous pouvons nous rapporter. Usant des clichés tout en les détournant et en instillant juste ce qu’il faut de catastrophisme sans pour autant tomber dans les travers d’un feuilleton de science-fiction, le livre de Ben H. Winters est un beau numéro d’équilibriste très divertissant.
Si vous aimez : les policiers et Tintin et L’Étoile mystérieuse. Avec une petite dose de Michael Crichton pour l’ambiance.
Autour du livre : Dernier meurtre… a gagné le prix Edgar-Allan-Poe des Mystery Writers of America, une association d’auteurs de polars américains, catégorie livre de poche.
Extrait : « Car d’un seul coup il n’y avait plus d’ambiguïté, plus aucun foute. D’un seul coup, ce n’était plus qu’une question de temps. Risque d’impact : cent pour cent. Le 3 octobre. Rien à faire.
Beaucoup de gens sont restés collés à leur téléviseur après la fin de l’émission, à regarder des experts, des professeurs d’astronomie et des hommes politiques balbutier, larmoyer et à attendre le discours à la nation promis par le président, qui en fin de compte n’a eu lieu que le lendemain midi. Beaucoup aussi se sont jetés sur leur téléphone pour tenter de joindre leurs proches, mais les circuits saturés sont tombés en panne et le sont restés pendant toute la semaine qui a suivi. D’autres sont sortis dans les rues, malgré le froid mordant de janvier, pour partager leur peine avec des voisins ou des inconnus, ou pour commettre de petits actes de vandalisme et aitres délits mineurs – une tendance qui allait se poursuivre et culminer, du moins dans la région de Concord, avec une petite vague d’émeutes à l’occasion du President’s Day.
Pour ma part, j’ai éteint la télé et je suis parti au boulot. C’était ma quatrième semaine en tant qu’inspecteur, je travaillais sur un cas d’incendie criminel, et j’avais la nette intuition – tout à fait juste, comme je n’ai pas tardé à le constater – que la journée du lendemain serait animée et stressante au poste. »
Sortie : le 12 février, Super 8 Editions, 345 pages, 18 euros.