Dynasty Warriors 9 : Les larmes aux yeux

Dynasty Warriors 9 : Les larmes aux yeux

Note de l'auteur

Avec plus d’une vingtaine de titres à son actif, la glorieuse licence Dynasty Warriors commençait sérieusement à s’essouffler ces dernières années. Toujours développé par l’emblématique studio Omega Force à l’origine du genre mûso, Dynasty Warriors 9 devait ainsi marquer d’une pierre blanche le renouveau de la saga en s’attaquant à l’Open world. Prometteur sur le papier, ce nouvel opus est en réalité une grosse déception. Pire, c’est un lamentable gâchis.

 

Une réalisation technique scandaleuse

Tous comme les précédents opus, Dynasty Warriors 9 est un jeu d’action type beatem’all/musô qui nous raconte la tumultueuse histoire de la Chine à la fin de l’Antiquité. Basé sur le classique roman historique Les Trois Royaumes, le jeu met en avant les terribles guerres civiles qui déchirèrent l’Empire du Milieu à la chute de la dynastie Han. Sans être un titre qui se veut historique comme Kingdom Come Deliverance, le soft de Koei Temco permet de nous plonger dans l’une des plus grandes épopées jamais écrites.

Pour retranscrire toute la dimension épique du livre, Omega Force a vu les choses en grand. Trop grand peut être. Exit l’enchainement de niveaux trop old-school pour le public moderne, place au désormais très à la mode monde ouvert ! En repartant du bon travail fait sur Toukiden 2 (critique ici), les développeurs nous ont littéralement façonné une carte gigantesque censée modéliser la Chine entière (à une échelle réduite, bien entendu). Mais le studio nippon n’a pas fait les choses à moitié puisque, pour l’occasion, Dynasty Warriors 9 a également bénéficié d’un moteur flambant neuf, avec son lot de promesses habituelles tel qu’un climat dynamique et un cycle jour/nuit.

Si les nombreux trailers et annonces en grandes pompes du brand manager d’Omega Force nous mettaient l’eau à la bouche, le résultat final une fois manette en main est hélas catastrophique. Dès le lancement du jeu, on comprend tout de suite que la réalisation est non seulement datée et digne du début de l’ère PS3 (et encore je suis gentil) mais que la technique est toute aussi épouvantable. Les couleurs sont délavées, les textures sont baveuses et manquent cruellement de détails, et cela n’est rien en comparaison de l’aliasing omniprésent, du clipping de la mort et des pop-ups de villes entières à deux mètres de vous. Oubliez également de suite les 60 fps, ou même le cap 30 fps du pauvre. Sur ma PS4 Slim qui hurlait à l’agonie et surchauffait tel un four à pizza, Dynasty Warriors 9 affichait un framerate instable en plus d’être horriblement bas. Aux dernières nouvelles, la version Xbox One ne s’en sort pas mieux tandis que les versions « de luxe » sur PS4 Pro, Xbox One X et PC s’avèrent être légèrement meilleures (mais c’est très léger). Koei Temco, bien conscient du fléau qui touche son titre, a d’ors et déjà promis moult correctifs. Du coup, je plains les pauvres développeurs d’Omega Force qui doivent désormais cruncher comme des malades jours et nuits juste parce qu’on ne leur a pas laissé le temps nécessaire au préalable. Pour le moment, un mode plus fluide est disponible sur les PS4 et Xbox One classiques, stabilisant le framerate au détriment de la qualité visuelle. Bref on passe d’un jeu digne de la PS3 à un titre de PS2.

A l’opposé, la chouette direction artistique participe à l’ambiance général du titre et retranscrit plutôt bien à l’écran l’idée qu’on se fait de la Chine Antique. Mais une bonne direction artistique ne suffit pas à sauver Dynasty Warriors 9 du naufrage, puisque même son monde ouvert inédit est une déception. L’Empire du Milieu est curieusement sans vie, terriblement vide, comme si l’apocalypse avait frappé le monde deux jours avant. Alors certes, Omega Force n’a pas le budget d’une production AAA occidental (ou même japonais) et fait plutôt partie de cette catégorie grandissante des studios AA. Mais cela n’excuse en rien ce manque de respect pour les joueurs qui, rappelons-le, payent le titre au prix fort de 50-60 euros !

 

Bonnes idées éclipsées par de nombreux problèmes

Vous l’aurez compris, ce n’est clairement pas sur l’aspect visuel que Dynasty Warriors 9 va briller. Alors sûrement, le gameplay sera lui aux petits oignons, n’est-ce pas ? Et toc, remonte ton slibard Lothar ! Petit piqûre de rappel, la série des Dynasty Warriors consiste à massacrer des hordes d’ennemis à grands coups d’épées et autres armes chinoises en multipliant les combos. Pour faire la comparaison, c’est le cousin nippon de God of War, c’est-à-dire un beatem’all défoulant, volontairement bourrin et addictif. Et Dynasty Warriors 9 reprend bien ce postulat de base. Premières heures de jeu et première bonne nouvelle, malgré le ratage technique la prise en main est toujours aussi rapide et intuitive. Pour ceux qui seraient intimidés par le nombre d’ennemis, pas de panique ! Dynasty Warriors 9 n’est pas un jeu qui demande du skill ou du die and retry comme les Dark Souls, et peut très bien se jouer en faisant du button mashing bête et méchant. Le studio a même légèrement revue sa copie en facilitant encore davantage les combats, avec un système permettant d’utiliser plusieurs types de coups spéciaux (en appuyant sur R1) ou d’achever les ennemis en un coup avec un QTE (en pressant sur triangle). Bref, tailler en pièces des armées entières n’a jamais été aussi facile, trop facile même. En effet, l’IA de la série n’a certes jamais été très brillante mais dans cet opus nous atteignons des sommets de stupidité. C’est simple, en mode normal, les ennemis n’offrent absolument aucun challenge, se contentant de se faire poutrer gentiment chacun leur tour façon Astérix et Obélix contre les romains. Sur cet aspect, j’aurais vraiment aimé voir une vraie évolution et ressentir l’impression d’être vraiment au cœur d’une bataille plutôt que de massacrer des ennemis sans défense. Même les animaux sauvages comme les tigres m’ont donné plus de fil à retordre que les boss du jeu !

Par son nouvel monde ouvert, Dynasty Warriors 9 avait l’ambition de nous plonger dans les guerres civiles des Trois Royaumes. Concrètement, le joueur a de nombreuses missions à accomplir aux quatre coins de la carte avec une ligne de front qui évolue constamment au fil des batailles. Chaque mission principale a un niveau de difficulté souvent plus élevé que le vôtre, vous devrez donc accomplir certaines quêtes secondaires pour faire baisser le niveau du boss et, par la même occasion, augmenter celui de votre personnage. En théorie, c’est plutôt une bonne idée. Mais en réalité, après environ cinq heures de jeu on commence déjà à se lasser des missions manquant d’intérêt et des objectifs qui souvent les mêmes. Pour diversifier un peu le contenu, les développeurs ont essayé d’intégrer certaines mécaniques de gameplay propre au RPG comme le craft d’armes ou de potions, la recherche de matériaux primaires par la chasse ou la pêche et même de la cuisine (coucou Final Fantasy XV !) ! Le problème, c’est ce que ces activités ne sont ni intéressantes d’un point de vue ludique, ni vraiment nécessaires pour avancer dans le jeu.

Omega Force avait une autre idée qui aurait pu être vraiment excellente si bien exécutée, ce sont les sièges. Dans la Chine de Dynasty Warriors 9, il n’est pas rare de tomber sur de nombreuses forteresses ou campements fortifiés que vous devez prendre d’assaut avec l’aide de votre armée. En accomplissant certaines missions secondaires, votre armée se verra même renforcée par des tours d’assauts et autres engins de sièges. Sauf que tout cela ne sert strictement à rien puisque le joueur dispose d’un grappin qui lui permet de passer sans problèmes absolument tous les obstacles. Cette mécanique est juste incompréhensible de la part des développeurs puisque elle vient démonter tout le concept des sièges. Plus besoin de renforcer mon armée et d’attendre que le beau bélier sculpté explose la porte principal, un petit coup de grappin en mode Batman et me voilà directement dans la forteresse. Même les archers postés sur les murailles ne me tirent pas dessus ! Une fois dans la forteresse, autre grosse déception. Là où on pouvait s’attendre à toute une armée de défenseurs prêts à en découdre, on se retrouve dans une citadelle vide… Comme si tous les soldats souffraient de dysenterie et se pressaient aux toilettes.

Conclusion

Dynasty Warriors 9 est hélas un échec sur toute la ligne. En plus d’une réalisation technique exécrable, le soft de Koei Temco est handicapé par des idées de game design incompréhensibles et une IA aux fraises. Les bases étaient pourtant là et je suis persuadé que les intentions de départ du studio japonais étaient sincères et bonnes. En effet, Dynasty Warriors 9 proposent des nouveautés intéressantes qui auraient pu renouveler le genre du musô. Mais ces belles idées sont restées à l’état de prototypes comme si le jeu était encore dans sa phase alpha. Clairement, les développeurs ont manqué de temps, faute à une année fiscale au Japon qui se termine bientôt. Tout comme pour Final Fantasy, le culte du chiffre et du profit pour les actionnaires aura mis du plomb dans l’aile d’une autre prestigieuse licence. Dynasty Warriors aurait mérité mieux et j’espère de tout cœur que cet accident ne sonne pas comme un mauvais chant du cygne pour la saga.

Dynasty Warriors 9

Développeur : Omega Force
Éditeur : Koei Temco/Koch Media
Prix : 50 euros

 

Partager