
Easy : Anthologie option Mom Porn.
La chair est triste, hélas ! et j’ai lu* tous les catalogues de mobilier suédois. Voilà le point de départ de cette pseudo anthologie, réalisée par un des plus éminents représentants du Mumblecore, mouvement créatif indé. Huit épisodes consacrés à un instant de doute dans une vie épanouie, luxe de nantis dont la résistance au bonheur est l’ultime coquetterie. Une succession de « stories » qui rejouent le déclin de l’empire américain avec filtre « beauté ». Totalement fake ?
Ça spoile, oui, mais c’est pour votre bien !
Sur le fond, c’est oui, sans hésiter. Bon, je n’ai rien contre le fait qu’on m’impose une image beigeasse, des dialogues improvisés d’après un paragraphe de pitch, un montage au smartphone et une musique de pub Ricoré, mais pour se le permettre, il ne faudrait quand même pas lésiner sur le fond, le sujet, le traitement à tout le moins. La première saison de Transparent ou même celles de Girls peuvent s’offrir des partis pris artistiques contestables. Easy, sûrement pas. En tout cas, pas ce qui est donné à voir pour le moment.
J’imagine qu’il faut prendre le titre de la série comme une blague. N’était-ce la vanité de l’auteur-réalisateur, Joe Swanberg, on pardonnerait beaucoup. Mais la moindre interview témoigne du melon de compétition que se trimbale le personnage, sorte de pape d’un mouvement « indé » pince-sans-rire appelé Mumblecore.
Le Mumblecore, en gros, est à la série ce que le Dogme 95 est au cinéma : un ensemble de règles édictées par de jeunes réalisateurs, pour se faire remarquer et éventuellement justifier un manque de moyens. Lars Von Trier est le premier à rire sous cape en pensant à ceux qui y trouvent une volonté artistique radicale. Il reste que l’instauration de contraintes, d’écriture ou de réalisation, demeure un excellent moyen de réinvention et de libération des processus créatifs. Mais à quoi bon bousculer si c’est pour imposer paresseusement des thèmes rebattus, sans proposer de nouvelles approches ?
Le développement de ces atermoiements bourgeois repose sur un paquet de stéréotypes insignifiants, de valeurs bien réacs et de questionnements vieux comme le premier courrier du cœur. Chacun des huit épisodes capte un moment de doute, de ceux qui gonflent les forums de conseils et tests de psychos simplistes, et le déroule platement jusqu’à sa résolution heureuse. C’est dommage, Pamela Adlon, avec son approche naturaliste personnelle, a illustré récemment dans la série Better Things que les gens heureux avaient vraiment une histoire à raconter, pourvu qu’on se place à hauteur d’homme. Ici, les personnages sont observés de haut et dépeints avec une vulgarité honteusement désinvolte. La vulgarité, dans tous les sens du terme : petit couple lesbien tout mignon, avec nana végane austère mais tolérante (Non, sans blagues ?) ; auteur flaccide, père au foyer qui a besoin de bousculer bobonne pour réveiller la libido de son couple, alors que ses enfants ont des rêves de Prince et Princesse malgré une éducation progressiste (Mais bien sûr…) ; Legolas qui s’encanaille avec sa douce, via Tinder, dragouille une brunette – dont on suggère qu’elle est quelconque – pour constater finalement qu’il n’a envie/besoin que de sa femme parfaite…
En bonus, des scènes de sexe tristement grotesques qui se veulent réalistes, mais feraient passer Cinquante Nuances de Grey pour un chef-d’œuvre. Pour finir, on découvre que tous les protagonistes sont liés d’une façon ou d’une autre, bref, qu’on vient de se taper une exposition en sept scènes de trente minutes et que le tout constitue forcément une œuvre, voire une performance, à considérer dans son ensemble. Ben tiens !
Conclusion : c’est moche, prétentieux, filmé avec les pieds et complètement tarte. Joe Swanberg a pour ambition de mettre à jour le vécu de ses personnages chaque saison, à la manière du subtil Boyhood. On attend avec impatience « Comment on a découvert le bondage avec Pokemon Go », entre autres feelgood épisodes pour la prochaine saison.
Easy – Anthologie en 8 épisodes
Série créée par : Joe Swanberg
Avec : Orlando Bloom, Malin Ackerman, Michael Chernus,…
Je n’ai vu que le deuxième (ma chère et tendre ayant déjà vu le premier et puis comme c’est une pseudo-anthologie, what the hell) et je l’ai trouvé intéressant. Au départ, je partageai ton sentiment sur le cliché de la lesbienne vegan. Et puis j’ai été embarqué, je trouve que leur histoire fonctionne, que les actrices sont convaincantes et qu’au final, la confrontation de leur comportements diamétralement opposés n’est pas vaine…
ça fonctionne, mais toute mauvaise foi ravalée, c’est quand-même très pauvre, question enjeux, avec des personnages superficiels, des situations naïves (et là, je suis gentille…) et tout est pour le mieux pour finir… c’est pourquoi j’évoquais le côté mom porn. Sexe ou non, c’est propret, juste un peu osé pour émoustiller la ménagère.
Et si tu prends tous les épisodes, que tu mêles les intrigues et ajoutes un fil conducteur,tu obtiens le pilote d’une série contemporaine, comme This is Us. Même si je n’en suis pas fan non plus, cette fois, les enjeux sont posés, les situations prises avec un angle plutôt inédit.
Déconstruire le récit, c’est intéressant en soi, mais en l’occurrence, ça n’apporte pas grand chose de plus, on se croirait dans une production AB, la prétention et le nihilisme en plus.
Peut-être que tu verras ça un peu autrement à terme, l’accumulation provoque sûrement en partie ce sentiment de lassitude et de gâchis.
Bon, maintenant, je te cache pas que je suis pas pressé de voir les autres épisodes ;o)