EDITO : Will Smith, le syndrome Tom Cruise ?

EDITO : Will Smith, le syndrome Tom Cruise ?

Diversion, de Glenn Ficarra et John Requa. En salles le 25 mars.

Diversion, de Glenn Ficarra et John Requa. En salles le 25 mars.

En salles le 25 mars prochain, Diversion n’est pas une purge nanardissimesque, loin de là. Rythme alerte, trame roublarde, mise en scène plutôt élégante et inventive… Et Will Smith. Partout. Dans chaque scène ou presque. Dans le rôle d’un prince de l’arnaque à qui personne ne la fait, trois coups d’avance sur tout le monde jusqu’au générique de fin, Smith plastronne en mentor à l’aise dans la haute aristocratie des filous et qui va enseigner les ficelles du métier à une belle blonde en pamoison devant le génie à Willie. Voilà.

Aux Etats-Unis, où il est sorti le 27 février, Diversion (“Focus” en V.O) a réalisé un premier week-end tout juste correct avant de se dégonfler assez rapidement et stagner en-dessous des 50 millions de dollars. Il en glanera probablement plus de 60, ce qui sera déjà mieux que l’immense four After Earth et représente une performance plus qu’honnête pour Diversion, “comédie adulte” classée R très loin des blockbusters XXL auxquels la star est plutôt habituée depuis Independance Day. Par ailleurs, les recettes internationales, à l’heure où sont écrites ces lignes, ont déjà franchi la barre des 100 patates. Le film est largement rentabilisé, pas de panique. Et pourtant : on reste loin, très loin des scores planétaires d’Independance Day, Bad Boys 2, Hancock, I Am legend ou la trilogie Men in black (laissons de côté les accidents de parcours Wild, Wild, West et Ali, voulez-vous…).

willsmithticketsWill Smith lasse. Ou plutôt son melon. Will Smith le toujours cool, le sauveur christique post-apo, le défonceur d’aliens, le superhéros SDF (mais pas trop longtemps), le superflic badass à Miami, l’expert en séduction, le boxeur légendaire, le “father knows best” hiératique aux relents scientologues… A force de se réserver aveuglément des rôles à la gloire de son nombril de control freak, l’acteur (plutôt doué au passage) n’a pas vu venir la lente sédimentation, au fil des ans, d’éléments séparateurs entre le public et sa pomme. Ses efforts népotiques éhontés pour lancer la carrière de son endive cuite de fiston, Jaden Smith, n’ont pas vraiment arrangé sa cote de sympathie.

diversion-bande-annonce-avec-will-smith-et-margot-robbie-une-427x240Et pourtant Smith persiste. A 45 ans passés et malgré la baffe sans appel d’After Earth, il continue de faire le paon dans Diversion. De croire que le public veut toujours de lui en haut de l’affiche et va se déplacer en salles pour “voir un film avec Will Smith”. Lourde erreur. De six ans son aîné et fort d’un standing de star plus ancien d’une décennie, son bon ami Tom Cruise subit le même revers. Depuis Mission : Impossible 3, le scientologue Numéro Uno d’Hollywood se croit toujours taillé pour squatter toute l’affiche comme au temps de Minority Report ou du Dernier Samouraï. On a bien cru à un début de rédemption avec Walkyrie puis Lions et Agneaux mais non…. Night and Day, M:I protocole fantôme, Jack Reacher, Oblivion, Edge of Tomorrow… Suivis bientôt d’un nouveau Mission : Impossible, puis d’un Top Gun 2 (annoncé mais toujours rien de concret…) et d’une suite à Jack Reacher qui pourtant fut très loin d’un raz-de-marée en 2012. A chaque fois la même règle : Tom Cruise tout-puissant, Tom Cruise uber cool, Tom Cruise impérial, malgré quelques failles en trompe-l’oeil ici et là. Hormis la saga Mission : Impossible sauvée par Brad Bird en 2011, là encore le public semble bien en avoir soupé de l’hyper ego d’un acteur trop longtemps accro à sa propre auto-célébration film après film.

will smith torseDans un paysage ciné envahi par les blockbusters franchisés, où la “marque” d’un univers pré-existant excite bien plus l’actuelle génération de bouffeurs de popcorn qu’une star payée les yeux de la tête, Will Smith et Tom Cruise font figure de reliques. De vieux beaux condamnés à sombrer dans les tréfonds de la ringardise comme l’ont fait Schwarzenegger et Stallone si, à la cinquantaine passée, ils n’ont toujours pas trouvé de nouveaux axes de carrière. Ni arrêté de se perdre dans la contemplation de leur binette botoxée dans un miroir aux reflets forcément toujours plus cruels. Il leur faudra impérativement accepter de se fondre davantage dans un casting, couper les jarrets de leurs pulsions mégalomaniaques, cesser de produire quasi-systématiquement leurs films. Prendre de vrais RISQUES avec des rôles de losers, salopards, serial killers, violeurs, trouillards, pauvres types, désanusseurs de porcs, victimes en tout genre, que sais-je… On peut toujours rêver, hein.

tomcruiseTom Cruise l’a cependant fait dans le passé et Will Smith en est sûrement capable. Ce dernier semble d’ailleurs commencer à prendre le pli du profil bas puisqu’il a signé pour rejoindre l’aventure Suicide Squad dans le costume du super-vilain Deadshot. Un choix plus opportuniste qu’une vraie remise en question artistique et surtout, gaffe au syndrôme Mr. Freeze dans Batman & Robin, Will ! Bref, cessez de bomber le torse les gars et cherchez vous plutôt de beaux rôles, quelle que soit leur place au générique et quel que soit le genre de film. Arrêtez les odes à vos poils grisonnants et biceps flétrissants. Ou vous finirez à 60 balais comme des cacricatures de vous-mêmes au cimetière des vaniteux, sinistre zone où végètent vos grands frères Sly, Schwarzy et le carbonisé au cynisme Bruce Willis.

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