
Égaré dans une Fraternité (Critique de Goat)
La Berlinale, ce n’est pas que la compétition officielle, c’est aussi la sélection Panorama qui nous permet de découvrir des films venus du monde entier. Alors avant le festival, on parcourt le programme, on lit les synopsis, on jette un œil au casting et à l’équipe. Ce qui donne lieu à des (bonnes ou mauvaises) surprises. Ici, avec ce film d’Andrew Neel, on est catapulté dans le thème des fraternités universitaires masculines aux US. Découverte d’un long métrage intéressant.
Synopsis : Se remettant d’une terrible agression, un jeune homme de 19 ans s’engage dans la confrérie de son frère afin de prouver sa virilité. Ce qu’il se passe là-bas, au nom de la « fraternité », met à l’épreuve les garçons et leurs relations de manière brutale.
Après Spring Breakers vu du côté des filles, c’est au tour de la gente masculine américaine d’être mise à l’épreuve. Pas de grands rapports entre les deux films, si ce n’est la présence au casting d’un acteur/chanteur passé par l’écurie Disney, Nick Jonas, bien décider lui aussi à casser son image d’enfant sage (coke, alcool et sexe au programme donc).
La fraternité américaine fait office de point d’entrée pour traiter d’une thématique forte, celle de la violence. L’incursion se fait par une histoire touchante : celle d’un jeune homme qui essaie de retrouver une vie normale après son agression. La plongée dans le monde des clubs étudiants et de leur bizutage violent n’est que résultante de cette tentative de réadaptation, de normalité.
Nous regardons ce monde à travers les yeux de Brad, personnage principal attachant, extrêmement bien caractérisé et finement joué par Ben Schnetzer. On est affecté par sa culpabilité de n’avoir pu répliquer et on se pose la même question que lui : comment parvient-on à retrouver une vie normale, une sérénité, après une agression violente où l’on a été incapable de se défendre ? Le personnage, à l’aube de sa vie d’adulte, se cherche et tente de se construire en s’intégrant parmi ceux qu’ils pensent faire partie d’une normalité, les populaires élèves de la fraternité Phi Sigma Mu (à laquelle son frère appartient). Brad et son nouveau colocataire vont en voir de toutes les couleurs, rituels/épreuves de passage des jeunes étudiants : alcool, vomi, harcèlement, tout y passe. Sous couvert de blagues et d’humour, c’est le royaume des bullies : homophobies, railleries, ils font de la vie de leurs bizuts un véritable cauchemar.
Inspiré de faits réels, le scénario coécrit par David Gordon Green (Joe, King of Texas) fait froid dans le dos. La mise en scène est sobre, les comédiens jouent juste et il ne nous en faut pas plus pour être happé par cette histoire effrayante. Cette bande de jeunes complètement cons, dont le vieux James Franco qui fait une apparition (il est également coproducteur), nous écœure et donne lieu à des scènes proches du dégout, nécessaires à la totale compréhension des enjeux.
Le film n’est, certes, pas parfait (mise en scène un peu trop classique), mais il a le mérite d’avoir un vrai propos et de marquer les esprits.
Goat se plante dans notre esprit et on ne l’oubliera pas de si tôt.
Pas de bande-annonce mais un extrait du film sur le site de la Berlinale.
Goat, 2016, 1h42, USA, d’Andrew Neel, avec Ben Schnetzer, Nick Jonas, Gus Halper, James Franco… Pas de date de sortie annoncée en France.