En attendant : Mad Men saison 6

Joie, bonheur et félicité dans nos coeurs ! Mad Men revient dimanche sur AMC avec une salve d’épisodes inédits, dont un double season premiere s’ouvrant sur un cadre paradisiaque mais aux sombres résonances. Les critiques américaines sont aux anges devant ce coup d’envoi… On ne l’attend que d’un pied plus ferme encore.

Alors qu’auprès de certains hipsters, il est de bon ton de toiser Mad Men au profit de nouveaux hochets sériels plus hype, inutile de dire qu’au Daily Mars, on attend fermement la sixième saison du bijou anthropo-soapesque de Matthew Weiner. La saison 5 avait certes laissé aux fans un petit arrière goût déceptif, principalement dû à un démarrage molasson, mais avait comblé en partie ses lacunes à mi-parcours jusqu’à un extraordinaire season finale. On est pas prêt d’oublier ce jubilatoire épilogue, au son du You only live twice de Nancy Sinatra, bouclé par un plan gavé de sens jusqu’à la gueule d’un Don Draper accoudé à un bar et prêt à rouvrir la porte à ses démons d’antan.

Comme d’habitude, Matthew Weiner a tenté d’imposer une chape de plomb quasi impénétrable sur les détails du scénario de The Doorway, le double season premiere qu’AMC diffusera ce dimanche. Quant aux journalistes américains qui ont eu le privilège de le visionner en avant première, leur press-kit fut accompagné d’une note personnelle de Weiner les priant gentiment de ne révéler sous aucun prétexte cinq informations cruciales relatives à l’intrigue (voir ci-dessous). Sincère respect de l’effet de surprise pour le téléspectateur ou excès de control-freakisme de la part d’un showrunner réputé diva ? La plupart des critiques ont respecté la volonté de Weiner… à part bien évidemment quelques petits malins, comme Matt Zoller Seitz (journaliste free lance dont la review publiée d’abord sur le site nymag.com puis dans vulture.com) ou Tim Goodman du Hollywood Reporter. Autant vous prévenir : si vous souhaitez conserver l’intégrale surprise de The Doorway, ne lisez pas ce qui suit !

Warning :  spoiler ahead

Vous êtes encore là ? Bon j’en déduis que comme moi, vous avez votre carte de membre du “club des fans curieux” et que je peux donc poursuivre. Ce double épisode nous emmène à Hawaii, a priori deux ans après la fin de la saison précédente (située en 1967), où le couple Draper est parti se dorer la pilule quelques jours. Il s’agit de vacances payées par un gros client de l’agence, afin d’aider Don à trouver des idées pour la campagne de promotion du complexe hôtelier où il séjourne. Contrairement à ce qu’aurait pu suggérer la fin de la saison précédente, le couple Draper tient toujours et Megan a réussi à percer comme actrice. Le contraste entre les deux époux est cependant plus que jamais appuyé lors des premières minutes, entre une Megan extravertie et Don quasi mutique.

Malgré le cadre paradisiaque de cette ouverture, The Doorway, truffé de visions et d’indices visuels symboliques à la Lost, est hanté par le thème de la mort, une préoccupation que vont partager Don et Roger, plus que jamais replacés au coeur de l’intrigue. Proche elle-même de la fin (annoncée pour sa saison 7), Mad Men semble décidée pour son crépuscule à renouer avec le passé militaire de Draper, via une trame autour d’un briquet piqué par erreur à Hawaii par Don à un G.I en partance pour le Vietnam… Quant à Roger, dont on a pu apercevoir une face plus introspective en saison 5 depuis ses trips au LSD, il entame une psychothérapie. Et comme le souligne le New York Times, alors que les hommes semblent de plus en plus préoccupés par la mort, ce sont les femmes qui tiennent plus fermement le cap.

La plupart des critiques de The Doorway regorgent de dithyrambes : « Jon Hamm n’a jamais été aussi bon », “remarquable”, “somptueux”, “merveilleux”, “fascinant”… Visiblement, Weiner a frappé très fort pour ce grand retour et semble avoir renoué avec les fondamentaux du meilleur de son show. Une mélancolie sourde, l’exploration chirurgicale de la psychologie et des tourments d’un Draper en perpétuelle insatisfaction, une certaine dose d’humour, un puzzle de relations complexes entre des personnages passionnants (Peggy, Peter, Joan…).

Et bien sûr, comme toujours en toile de fond, une subtile photographie de l’époque et ses soubresauts, cette fois à la charnière des années 70. Les premières photos diffusées par AMC sont à cet égard assez croquignolettes et bien pourvues en looks favoris/robes à pois. Personnellement, j’attends beaucoup des retrouvailles avec ce petit monde et de voir comment Weiner (qui appose sa signature au scénario de The Doorway) et son équipe ont géré la pratique déjà galvaudée de l’ellipse temporelle. Soyons optimistes et faisons confiance à la magie du showrunner pour nous immerger sans réserve une sixème fois dans le monde de Mad Men, la série qui a définitivement déringardisé les sixties.

Mad Men, saison 6 :  diffusion à partir du 7 avril sur AMC. Double season premiere :  The Doorway.

La lettre de Matthew Weiner à la presse avant la diffusion de The Doorway :

Dear Journalist,
As we head into « Mad Men’s » sixth season, I want to take a moment once again to express my sincere thanks for your ongoing support. The success we have enjoyed for the past five seasons has in large part been due to your continued interest in the series, and the interaction I have with so many of you continues to be a highlight of making the show every season.

I am genuinely excited to be sending you the season-six, two-hour premiere episode, and I’d like to take a moment for a familiar request. I know you are aware how strongly I feel that the viewers are entitled to have the same experience as you when they watch a new episode for the first time. My goal every season is first and foremost to entertain the audience, and I know that this is best accomplished when key storylines are not revealed in advance. I am asking you to please join with me to ensure this enjoyment by not revealing the following in your review:

The year the season begins
[Redacted]
[Redacted]
New characters
New relationships or partnerships
Thank you again for your support of « Mad Men, » and I truly look forward to your thoughts and insights.

Best,

Matthew Weiner