Etrange Festival 2014 : The Voices/Smart Monkey

Etrange Festival 2014 : The Voices/Smart Monkey

Note de l'auteur

Ryan-Reynolds-The-VoicesJerry est amoureux de la comptable de son travail. Il va se confier à ses animaux de compagnie qui ont la faculté de parler : un chat qui le pousse à commettre des meurtres en série et un chien affable.

Avec The Voices, Marjane Satrapi fait un bond clair vers la comédie d’horreur totalement débridée… et vers une carrière américaine, en choisissant Ryan Reynolds, Gemma Arterton et Anna Kendrick pour sauter le pas. Le pitch est assez simple : Jerry Hickfang, employé d’une petite usine charmante, tombe sous le charme de la comptable de l’entreprise, Fiona (Arterton). Apprécié de beaucoup mais un peu gauche, on réalise progressivement que Jerry a un sombre passé : récemment sorti de l’asile psychiatrique mais ne prenant plus ses médicaments, il entend des voix. Plus précisément, les voix de son chien, Bosco, et de son chat, Mr. Whiskers, à l’accent écossais à couper au couteau. Tous deux sont doublés par Reynolds, et tous deux font merveille dans les conversations profanes.

Le charme de The Voices vient donc de l’humour très très noir, et du manque total de retenue dans le grand-guignol progressif. Ce serial killer de proximité n’a pas forcément de velléités meurtrières, mais comme le Norman Bates de Psychose, va y être progressivement poussé par les voix, de plus en plus nombreuses. On trouve pas mal de Tex Avery dans la vision de Satrapi, avec l’association du chien bienveillant et du chat psychopathe comme ange/démon intérieur, forçant Jerry à aller plus loin dans sa folie. Mais aussi un peu de Joe Dante/John Landis dans les décors et la photographie très 80’s, voire même un tantinet de Disjoncté . Du jaune fluo aux combis rose bonbon de l’usine, elle ajoute des tonalités un peu plus pop, mais n’hésite pas à assombrir le tableau dès qu’on pousse la porte de son appartement.. ou de la maison familiale.

the voicesSi The Voices est une bonne comédie d’horreur qui respecte son point de vue subjectif pour une grosse partie du film, elle fait moins mouche lorsqu’elle dessine le passé plus trouble de Jerry. Tentative légèrement avortée de lui donner une vraie psychologie, ce qui est vite démenti une fois que l’on retourne aux commentaires animaliers des bévues de Jerry. Comme si Satrapi voulait donner une dimension plus terre-à-terre à un univers résolument surréaliste, mais c’est là où l’on voit que Jerry répond aux poncifs de la longue lignée de dégénérés qui ont traversé le cinéma d’horreur américain. Une impression renforcée par le choix de Jackie Weaver en psy inquiète, qui ne fonctionne finalement que pour donner à Reynolds une occasion de dominer clairement les séquences. Une efficacité qui est freinée par un manque d’originalité à la lisière de l’autosatisfaction. Les limites de The Voices, c’est aussi réduire Anna Kendrick en proie un peu ingénue, l’une des plus à même de gagner la confiance de Jerry. Malheureusement, cela ne restera pas comme une de ses apparitions les plus mémorables, tant elle semble être à la limite du cabotinage. Quelques réserves qui n’entament pas la solidité de The Voices, dont le casting peut lui permettre de toucher un public au-delà des friands d’horreur lors de sa sortie prévue pour 2015.

img-Smart_Monkey-300dpi-1Un mot de l’avant-programme, une adaptation de la BD Smart Monkey signée Winshluss et Nicolas Pawlowski. Des habitués de l’Etrange Festival, qui proposent une relecture slapstick de l’évolution et de la préhistoire avec le titulaire Smart Monkey, qui souhaite défier le viril gorille. Mal va lui en prendre, et l’enchaînement de péripéties en noir et blanc 2D est extrêmement fluide, avec quelques séquences laissant court à des décors de jungle plus fouillés. Si on pense à L’Age de Glace dans le déroulement, notamment dans la mise en scène d’un tigre aux dents de sabre qui se met à pourchasser le Smart Monkey, la rupture de ton et son passage en couleur et au XIXe siècle offrent un dénouement plus que savoureux. Ce qui peut déstabiliser ou être perçu comme un prolongement de gags est en fait une construction élaborée vers un final brillant. Un court-métrage à guetter sur une des chaînes du groupe Canal +.

The Voices, de Marjane Satrapi, avec Ryan Reynolds, Gemma Arterton, Anna Kendrick, Jackie Weaver. Etats-Unis/Allemagne. 

Smart Monkey, de Winshluss et Nicolas Pawloski. France. Court-métrage. 

 

Partager