
Etrange Festival : Asphalt Watches
Expérimental. Cru. Barré. Alternatif. Autant d’adjectifs associés à bien des projets d’animation indépendante ces dernières années. Et cela peut s’appliquer à « Asphalt Watches », projet qui est (croyez-le ou non, moi je me pince pour y croire) le fruit de 8 longues années de labeur de ses créateurs, Shayne Ehman et Seth Scriver. Mais ce qui commençait comme une expérience gonzo, forcément minimaliste a vite muté en une des séances les plus horripilantes de cet Etrange Festival, dans une salle 500 qui était assez clairsemée, ce qui ne s’est pas arrangé au cours des 90 minutes suivantes.
Asphalt Watches donc, cela parle vaguement d’un road trip à travers le Canada de deux protagonistes patibulaires, Bucktooth Hat (casquette marron) et Skeleton Cloud (quasiment spectral et flottant), et basé sur le propre roadtrip allumé par les réalisateurs. Le tout dessiné sous Paint et animé sous Flash. Lorsque le film démarre on est moyennement amusés par le look quasiment de croquis, tant que les rebondissements viennent. Et le public pour lequel est conçu ce film est clairement un public de stoners, à travers des scènes d’hallucination qui débarquent n’importe comment, des pauses inopinées, et des moments destinés à nous interroger sur ce qu’on voit à l’écran. Au départ, on s’amuse d’une conductrice à la bouche en forme de burger, et des Indiens vaguement extraterrestres. Puis on se demande si le film est intentionnellement mauvais. Puis…. les questions s’arrêtent et laissent place à un profond ennui.
Ehman et Scriver, deux Canadiens sans aucune expérience préalable dans l’animation, n’ont également aucune science de la composition des chansons, le doublage de voix (un agent de la circulation Teuton est accompagné d’un panneau sur « les accents horribles », pour mieux nous signifier l’autodérision avec laquelle ils s’appliquent à être nuls), ou encore aucune conscience apparente des limites du mauvais goût. Les tableaux se suivent et se ressemblent de moins en moins, les gags les moins drôles (et il faut du nivellement par le bas avec Asphalt Watches) durent une éternité. Et on se prend à imaginer ce que donnerait le même film sous substance hallucinogène : probablement quelque chose de plus intéressant.
La référence la plus proche de Asphalt Watches, c’est la série de [adult swim] Aqua Teen Hunger Force. A ceci près qu’outre une animation plus professionnelle, ils trouvent également une vraie histoire à raconter et ne caressent pas le spectateur (et sa rétine) à rebrousse-poil. Lors des interviews, les deux compères réalisateurs affirment que les mauvaises réactions ne les dérangent pas, et ce « film de niche » n’excuse pas l’amateurisme dans lequel baigne le film (par ailleurs vendu en VOD par leurs soins). A oublier très vite, d’autant plus qu’il donne aux « stoner cartoons » une mauvaise réputation, ce qui est assez intolérable.