
Flandres-Maçonnerie (critique de Salamandre)
La Belgique, autre terre de séries. Alors que les exports ont du mal à atteindre nos contrées, le thriller Salamandre débarque ce soir sur Paris Première, après une diffusion sur la chaîne privée Één en 2012. Est-ce un coup de fouet donné à ce genre de séries conspirationnistes et à tiroir ? Pas vraiment…
Une chose est sûre : Salamandre va prendre ses 12 épisodes pour étaler les ressorts de son intrigue. Alors que d’autres séries entreraient dans le vif du sujet en l’espace de cinq minutes, on prend une bonne dizaine de minutes pour nous présenter le cambriolage qui va tout déclencher. Celui de 66 coffres, choisis très précisément dans une banque privée de Bruxelles. Un cambriolage de professionnels jusqu’au bout des ongles, mené par un homme sans nom très méfiant et précautionneux. Peu de temps après, il se débarrasse d’un des complices, un spécialiste en systèmes de sécurité. Mais, entre-temps, un informateur paniqué a prévenu l’inspecteur Paul Gerardi (Filip Peeters, vu en second rôle au cinéma dans La Mémoire du Tueur). Gerardi est un flic solitaire mais coriace, qui très vite, va se retrouver écarté de la police… le temps que les institutions concernées étouffent toutes traces de l’affaire. Car personne n’a intérêt à porter plainte dans cette affaire : tous sont membres de Salamandre, une organisation secrète dont les objectifs seront un des fils rouges de la saison.
Un seul homme est à la plume pour les 12 épisodes de cette première saison : Ward Hulselmans. Et il va faire de l’intrusion dans la vie privée de ces notables un rouage essentiel à la série. Mais il ne réalise pas que bien des thrillers sont passés par là avec plus ou moins d’invraisemblances. Sous couvert d’égratigner une omerta institutionnelle agissant dans son trouble intérêt, il oublie que le téléspectateur habitué est à 1 ou 2 kilomètres devant lui. Et la figure de son flic bruxellois aux cheveux poivre et sel, un modèle de conservatisme réac : sa femme et sa fille, notoirement sous-écrits, lui reprochent un abandon certain pour une enquête délicate. Un monastère figure en bonne place dans les épisodes suivants, repère idéal lorsqu’on ne sait plus à quel saint se vouer. Et même si Salamandre ne cède pas aux histoires de taupe – après tout, tout le monde informe tout le monde – il a tendance à beaucoup de lenteurs et des scènes qui répètent ce que le téléspectateur sait déjà. Gerardi (et par là même Peeters) est au centre de la série, ce qui laisse à peine le temps à d’éventuels personnages secondaires d’exister. Pis encore : si ceux qui souhaitent faire chanter la Salamandre sont sans nom, les preuves du chantage et les documents compromettants sont montrés à plusieurs reprises, sans être explicités pour autant. Photos, cassettes, lettres : preuves très analogues à l’ère des mails cryptés et de WikiLeaks. Un élément qui achève de faire du thriller un policier très rétro, ne suscitant la curiosité que par intermittence. Après Matrioshki, dernière série belge à avoir été diffusée à grands renforts de com’ sur M6, Salamandre échoue à assurer sa réputation après un export réussi outre-Manche sur BBC4 et des remakes en discussion. De quoi regretter de ne pas voir les plus prometteuses Cordon, Clan ou Deadline 14/10 en lieu et place, elles qui dégagent une vraie identité dès leur incipit.
Les 3 premiers épisodes en VM ce soir à 20h50 sur Paris Première. Saison 1 disponible en DVD le 12 octobre.
Ecrit par Ward Hulselmans. Réalisé par Frank Van Mechelen. Avec Filip Peeters, Koen de Bouw, Jo de Meyere.
très intéressant, à voir absolument