
Fuyez L’Aube Rouge 2012, préférez L’Aube Rouge 1984 !
En même temps que notre glorieuse série en quinze épisodes sur la thématique du remake, que nous démarrons ce mercredi à l’occasion de la sortie de L’Aube Rouge de Dan Bradley, il nous paraissait approprié de revenir sur l’original : L’Aube rouge de John Milius, disponible en import blu-ray (MGM), sorti en salles voici déjà presque trente ans, à une époque où la Guerre Froide battait encore son plein entre les deux blocs. Verdict à la revoyure : toujours aussi faf, mais autrement mieux torché que la purgeasse clonée version 2012.
Comme beaucoup de films des eighties conspués par des années 90 grunge et chiantes comme le botin, L’Aube Rouge retrouve enfin depuis peu un semblant de considération. L’effet nostalgie aidant, celle d’un temps où le cinéma d’action n’était pas coincé entre les conneries abyssales de Michael Bay et les films de super héros, L’Aube Rouge peut enfin être apprécié à sa juste valeur. A savoir : un excellent film d’action, certes réac et anti-coco primaire, mais tout de même écrit et mis en scène avec une incontestable patte. Un peu comme Rambo 2, tiens ! La ressortie du film en blu-ray l’an passé impose en tout cas l’incomparable supériorité de l’original au pathétique remake que Metropolitan nous inflige en salles cette semaine.

De gauche à droite : feu Patrick Swayze, C. Thomas Howell et Charlie Sheen, les jeunes héros patriotes de L’Aube Rouge.
Alors certes, L’Aube rouge, de John Milius, c’est pas le genre de marote qu’on va aller revendiquer fièrement à la fête de l’Huma ou sur le plateau du Grand Journal. On ne va pas vous la faire à l’envers : quoi qu’en dise ses avocats les plus radicaux, L’Aube Rouge est un film bien droitier, fleurant bon le label NRA aproved au détour de quelques plans militant sans complexe pour la sacro-sainte libre circulation des armes aux Etats-Unis. L’Aube Rouge est toujours cette uchronie improbable dans laquelle l’URSS, Cuba et le Nicaragua se sont allié pour envahir les Etats-Unis via le Mexique, sur fond de 3e guerre mondiale et d’Otan kaput. L’Aube Rouge, c’est enfin cette célébration parfois embarrassante du patriotisme de la belle jeunesse boutonneuse américaine, assez rebelle et entraînée pour dire “fuck” à l’envahisseur et mettre minables les troupes d’élites de l’internationale communiste. On notera au passage que le scénario de cette fresque belliqueuse est co-signé des mains de John Milius et Kevin Reynolds, futur réalisateur de Fandango, La Bête de guerre et Robin des bois prince des voleurs. La rumeur veut que l’histoire originale imaginée par Reynolds, davantage centrée sur les luttes fratricides entre les ados du groupe Wolverine, fut largement détournée par Milius au profit d’un propos beaucoup plus reaganien.

Non mais boutez-moi hors des States cette internationale communiste qui souille nos drive-in McDonald’s, God Dammit !
Ne partez pas, ne partez pas ! L’Aube Rouge c’est aussi un casting de feu avec les jeunes loups talentueux de l’époque qu’étaient Patrick Swayze, Charlie Sheen, C. Thomas Howell, Lea Thompson et Jennifer Grey ! Bon, en 2013, ils sont soit morts, soit fous, soit has been, soit défigurés (oui je parle de toi Jennifer…), mais quand même quelle distribution ! Et je ne ne parle même pas de la bonne vieille brochette de chéris de ces geeks de derrière les fagots recrutée pour encadrer ces jeunes pousses : Powers Boothe, Harry Dean Stanton, Ron O’Neal et même William Smith…. ouiiii, le papa de Conan le barbare (du même Milius) en personne ! L’Aube Rouge, c’est aussi une mise en scène qui envoie toujours une bonne patate, avec un ratio généreux de scènes d’action à la fois nerveuses, lisibles et classiques.

Les Wolverines : quand des lycéens se transforment en groupe paramilitaire surarmé pour repousser une invasion rouge. Ou la thématique du passage à l’âge adulte version John Milius. Sacré casting de jeunes espoirs aux carrières plus ou moins pérennes…
Et aussi, mine de rien, sous le clairon et la banière étoilée, perce un semblant de recul et un portrait pas si glorieux des résistants du Colorado : on notera l’humanisation progressive du personnage d’officier cubain joué par Ron O’Neal, tandis que les Wolverines se déchirent entre eux, notamment lorsque le grand frère Jed bute froidement un membre du groupe pour trahison. Bref, L’Aube Rouge vaut mieux que son statut de nanar facho, au moins pour ses incontestables qualités formelles, même si on ne peut décemment toujours pas lui refiler la médaille du pamphlet pacifiste. En tout cas, vous saurez quoi offrir à Jean-Luc Mélenchon pour son anniversaire (rires).
L’Aube Rouge, de John Milius (Red Dawn, 1984). Scénario : Kevin Reynolds, John Milius. 1h54. Fiche du blu-ray MGM à lire sur le site bluray.com (sous-titres français disponibles).
Hmmm… Intéressant 😉
Entièrement d’accord! Malgré, en effet, un propos qui ne respire pas toujours la subtilité, je ne peux m’empêcher d’éprouver une grosse sympathie pour ce film de John Milius! Déjà, parce que John Milius et son côté grande gueule, j’aime beaucoup et ensuite parce que « L’Aube Rouge » version 84 vaudra toujours mieux que ce remake insipide où les acteurs n’ont aucun charisme et où jamais, mais vraiment jamais, la sensation de danger et de passage douloureux vers l’âge adulte ne se font ressentir… Après, niveau action, ok ça pète dans tous les coins mais c’est d’un générique…
Après visionnage du Nanar de 2012, je l’ai revu. Le côté négatif du film découle du contexte des années Reagan où l’évocation de l’URSS se fait sans finesse et donne ce côté gentiment réac au film. Ce qui manque aussi c’est un développement de cette uchronie, univers fascinant d’une Amérique occupée. Pour le reste Milius est un très bon, cadrage, photo, scènes d’actions, mise en scène et gestion des acteurs « next generation » et mention spéciale pour l’officier cubain qui atténue le côté patriote de l’ensemble. Pas le Meilleur Milius (Conan, le Lion et le vent, c’est du lourd) mais à des années lumières du remake à ne pas faire et à ne pas voir.