
GIRL : Une métamorphose
Pour son premier long-métrage, le cinéaste belge Lukas Dhont filme avec pudeur les entrechats d’une adolescente transgenre, née dans un corps de garçon.
Caméra d’or lors du dernier festival de Cannes, Girl est le premier long-métrage du réalisateur belge Lukas Dhont. Mais pourquoi le sujet de la transidentité ? « J’ai lu un article en 2009 dans un journal belge sur une jeune fille, née garçon, qui rêvait de devenir ballerine. Cette histoire m’a immédiatement frappé, je n’ai pas cessé d’y penser. J’étais tombé amoureux de cette fille. Elle était un exemple de courage et je me disais : si je réalise un premier long-métrage, je veux qu’il raconte son histoire ! »
La voici : Lara, 15 ans, déménage et entre dans l’une des meilleures écoles de danse de Bruxelles. Née garçon, elle n’a qu’un seul rêve : devenir danseuse étoile. Encadrée par son père et son petit frère qu’elle chérit tendrement, elle déploie son courage pour avoir un corps de femme, commence un traitement hormonal. Les visites chez les médecins et le psychologue rythment son quotidien.
Mais comment vivre son adolescence dans le corps d’un garçon alors que l’on se sent fille ? Le regard des autres pèse d’autant plus et il devient nécessaire de maîtriser au mieux son apparence. La danse classique, art ultra genré où une attention toute particulière est portée au corps, renforce la focalisation de Lara : il ne faut plus que l’on voie son physique de garçon…
Révélé lors du casting, l’acteur, Arthur Poster incarne Lara avec subtilité. Son jeu lui a valu un Prix d’interprétation d’Un certain regard. Acteur né, il parvient à transmettre un torrent d’émotions, avec un seul regard, seule expression. Grâce à lui, on frissonne et on partage les violentes tensions intérieures qui déchirent Lara, enfermée dans un corps qui n’est pas le sien.
La répétition, les dialogues épurés et justes, et les plans rapprochés sur les personnages principaux nous plongent au cœur de leur quotidien. On vit avec le personnage, on assiste à ses discussions mouvementées avec son père qui cherche coûte que coûte à l’aider. Sans cesse focalisée sur Lara, la caméra occulte ce qui se passe autour. On entre presque dans sa tête, grâce à l’infinie douceur et la beauté du travail de Lukas Dhont.
Un film qui fait sens et qui fait du bien dans une société où l’on a encore du mal à différencier genre, sexe biologique et orientation sexuelle. « Les jeunes transgenres que j’ai rencontrés lors de l’écriture du scénario ont été ma source principale d’inspiration, conclut Lukas Dhont. Ils sont tous des héros qui remettent en question les normes de notre société en choisissant d’être véritablement eux-mêmes. »
Girl
Réalisé par Lukas Dhont
Avec Victor Polster, Arieh Worthalter, Valentijn Dhaenens
En salles le 10 octobre 2018