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Music Mini Review : Gorgoroth – Instinctus Bestialis ( Soulseller Records)

Music Mini Review : Gorgoroth – Instinctus Bestialis ( Soulseller Records)

Note de l'auteur

gorgoroth-instictus-bestialisLorsque l’on attend un invité pendant six longues années, on ne s’attend pas forcément à ce qu’il rentre chez vous en défonçant la porte. Infernus ne s’encombre d’aucune politesse. Les gonds rompent sous l’assaut tellurique d’un Radix Malorum et votre salon est ravagé en une poignée de secondes. Il revient, et il n’est pas content. Six ans, c’est long pour ruminer sa rage, et le guitariste (et tête légale) de Gorgoroth n’a pas son pareil pour l’exprimer. L’art de mettre tout le monde d’accord avec une démonstration de force. Si on n’espérait plus vraiment un retour, Infernus remet les têtes de moutons sur leurs pieux et (r)assure.

Pour les néophytes (ou les néo-amnésiques) après l’uppercut introductif, durant les six années qui séparent Instinctus Bestialis d’un Quantos Possunt ad Satanitatem Trahunt (QPaST) décrié (injustement), Gorgoroth a brillé au rayon des nouvelles sardoniques : un remake inaudible du culte Under the Sign of Hell et l’éviction d’un Pest déserteur. Puis l’Arlésienne Instinctus Bestialis. Jusqu’à se demander si l’instinct animal mentionné n’aurait pas conduit le groupe à se terrer. Non, la bête organisait son retour. Une bête que les années n’ont pas engraissée si l’on observe aussi bien la longueur de l’album (8 titres ; 32 minutes) que son habillage sonore.

Instinctus Bestialis, c’est à la fois un raw black metal décharné et réduit à sa plus simple expression et une ouverture vers un autre genre voisin : le death. Au milieu, des structures simples, un son massif où la mention de rouleau compresseur n’aura jamais été autant utile. Au diable la délicatesse, Infernus et ses sbires assomment l’assemblée avec la violence d’un Ad Majorem Sathanas Gloriam pour son côté trapu et bien dans ses bottes. Un dépouillement qui rappellera un peu l’underplaying. Cette façon bien particulière de (non) jouer, avec retenue. Gorgoroth ne retient pas sa violence, il la comprime autant pour la maîtriser que pour la concentrer. Le résultat prend les airs d’une chape de plomb en deuxième effet Kiss Cool (après la baffe, donc) pour finir l’homme à terre. Aucun membre du groupe ne vous viendra en aide, surtout pas Atterigner (le nouveau growler serbe du groupe Triumfall), donc le chant rocailleux aux sons étranglés s’accorde parfaitement avec la direction artistique.

Gorgoroth ne rejoue pas pour autant le Panzer Division de Marduk, Infernus étant aussi connu pour ses inspirations belliqueuses que sa science du riff heavy. Histoire d’apporter quelques grammes de finesse dans ce monde de brutes, les chansons savent parfois ménager l’auditeur en ralentissant le tempo et offrir quelques lignes mélodiques. Un cadeau empoisonné puisqu’il sera moins question d’apaiser l’atmosphère que de se réserver des apartés sermonnaires à la gloire de qui-vous-savez (spoiler : Satan). Et d’injecter un peu de prêche dans un ensemble qui a plus souvent tendance à libérer sa rage. Des psalmodies enivrantes de Ad Omnipotens Aeterne Diabolus (inspirées du Black Book of Satan de Conrad Robury) aux supplications de Kala Brahman emprunt d’un parfum d’un démiurge cosmologie hindou, Atterigner et Infernus invoquent l’ambiance singulière et chère au métal noir et entendent retourner les croix comme les auditeurs.

Instinctus Bestialis ne triche pas. Une note d’intention que l’on retrouvait déjà dans QPaST (les textes de Rebirth) et dévoilée ici, tout naturellement, par cette volonté de ne pas proposer plus que le nécessaire. Le (plus tout à fait Trve) Black Metal de Gorgoroth s’apprécie sans supplément mais aride, osseux et famélique. De cette économie de moyens, se dégage une violence basse. Une façon de tirer l’auditeur vers le bas et l’attaquer à coup de masse. L’attitude pourra manquer d’innovation mais la déclaration possède le mérite de la clarté : l’instinct de survie, raison fondamentale de notre cerveau reptilien, passe par la défense de son territoire, de sa propre existence. Un titre parfait pour résumer, aujourd’hui, Gorgoroth.

Gorgoroth – Instinctus Bestialis (Soulseller Records), sorti le 6 juin.

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