
Homeworld: Deserts of Kharak : Bienvenue à Tataouine
Un an après le retour des légendaires Homeworld et Homeworld 2 dans une version remasterisée (test de votre serviteur ici), Gearbox revient à la charge avec un jeu aussi intéressant qu’inattendu. Annoncé seulement un mois avant sa sortie fin janvier 2016, Homeworld: Deserts of Kharak n’a pas fait énormément de bruit. Cette absence de promotion autour du jeu est plutôt étrange venant d’une licence aussi connue que Homeworld, comme si Gearbox essayait tant bien que mal de nous cacher un mauvais jeu. Eh bien, il n’en est rien. Bien au contraire, Homeworld: Deserts of Kharak se révèle être un très bon RTS solo, ce qui rend le tout encore plus mystérieux.
Les jeux Homeworld, véritables monuments vidéoludiques, sont des jeux de stratégie et space opéra digne de la saga Star Wars. La tête dans les étoiles, le joueur embarquait alors dans une aventure épique auprès du peuple Kushan dans son long retour d’exil vers sa planète mère Hiigara. L’histoire de Homeworld, qui n’est pas sans rappeler l’Odyssée d’Homère, commence sur la planète Kharak. Tout comme Star Wars, l’épopée des Kushans débute donc sur une planète désertique au plus loin des intrigues galactiques. Et c’est précisément cette partie de la légende que nous raconte Blackbird Interactive dans ce préquel nommé Homeworld: Deserts of Kharak, licence qui retrouve donc ses géniteurs puisque le studio est en partie composé d’anciens de chez Relic, responsable du premier opus sorti en 1999.
Le jeu se déroule donc environ un siècle avant Homeworld premier du nom sur la planète désertique répondant au doux nom de Kharak. Le peuple Kushan est alors encore loin d’être l’explorateur de l’espace que nous connaissons. Divisés entre plusieurs clans avec des identités culturelles et religieuses différentes sur une planète mourante, les Kushans se livrent une guerre constante pour les précieuses ressources naturelles et se posent comme un lointain miroir de nous pauvres terriens.
Au nord de la planète, nous retrouvons la Coalition du Nord Kiithid, une alliance qui regroupe les clans S’jet, Soban, Naabal, Manaan et Somtaaw avec pour capitale la grande ville de Tiir. La Coalition Kiithid dispose d’une technologie militaire basée sur les roues et les armures lourdes, ce qui la rend plus vulnérable dans les grandes étendues désertiques de Kharak.
Quelques années avant le début de la campagne du jeu, la Coalition a mis en place une politique spatiale avec le lancement de satellites qui détectèrent dans le Grand Désert « l’anomalie primaire ». Une expédition fut lancée pour tenter de percer les mystères de cette anomalie mais disparut des radars, probablement engloutie par l’impitoyable désert. Quatre ans plus tard, une deuxième expédition se met en route avec à sa tête la scientifique Rachel S’Jet et l’immense « porte-avion des sables » Kapisi du clan S’jet.
Si la Coalition du Nord Kiithid correspond plus au moins aux occidentaux de notre planète bleue, le principal ennemi du joueur, c’est-à-dire la faction Kiith Gaalsien, serait un subtil mélange oriental entre les Perses, les Mongols et les Arabes. Plus avancés technologiquement, les Gaalsiens – ou peuple du désert – n’en restent pas moins très religieux et suivent les préceptes du Grand Sajuuk. Les lois de Sajuuk interdisent aux Kushans de s’aventurer dans les étoiles sous peine de provoquer sa terrible colère. La peur (justifiée au vu des événements du début de Homeworld) conduit les Gaalsiens à attaquer de plein fouet Tiir (la capitale de la Coalition) et d’empêcher l’expédition S’Jet d’atteindre son but. Grâce à leur technologie avancée similaire aux hoverboard, les Gaalsiens disposent d’une flotte plus rapide et plus mobile utilisant la topographie du terrain à leur avantage.
La campagne solo est une vraie réussite et s’inscrit parfaitement dans la lignée des précédents Homeworld. Cette quête à la fois du passé et du futur vous tiendra en haleine pendant une dizaine d’heures. Les développeurs ont parfaitement su retranscrire l’ambiance si particulière de la série. Ceux qui ont déjà joué aux précédents opus ne seront pas dépaysés et trouveront même quelques réponses à leurs questions. Pour ceux qui découvrent l’univers de Homeworld avec Deserts of Kharak, il s’agit là d’une excellente introduction avant de se lancer dans les versions remastérisées.
Le jeu, bien que possédant un mode multijoueur, reste avant tout une aventure solo. Le multijoueur s’avère ultra classique et au final assez décevant en termes de contenu. On aurait aimé, à cette époque du e-sport, voir un multijoueur plus complet et surtout plus compétitif. La récente arrivée de deux DLC avec deux nouvelles factions étoffe le contenu, mais ça reste à mon avis encore trop léger. À ce compte-là, j’aurais préféré une campagne solo encore plus longue plutôt qu’un mode multijoueur assez anecdotique. Le problème est que le joueur ne peut même pas vraiment s’éclater dans le mode escarmouche vu les problèmes de l’IA.
Maintenant, venons-en au gameplay. Du fait de son contexte, Deserts of Kharak abandonne les combats 3D dans l’espace pour quelque chose de plus classique mais tout aussi efficace. Blackbird a su combiner des mécanismes classiques et bien huilés du RTS avec des éléments de Homeworld comme la carte tactique. Le joueur contrôle un énorme « porte-avion » (ou croiseur mère) terrestre similaire au vaisseau mère des anciens opus depuis lequel vous pourrez produire des unités, récolter des ressources et rechercher de nouvelles technologies. Chaque faction dispose de treize type d’unités, soit terrestres soit aériennes, relativement similaires d’un point de vue technique mais surtout très différentes esthétiquement. Les unités sont classées en quatre catégories (récolte, soutien, attaque légère et attaque lourde), le but étant d’avoir une armée parfaitement équilibrée capable de contrer n’importe quelle menace adverse. Le « croiseur mère », principal véhicule du joueur, peut lui aussi recevoir des améliorations en ramassant des reliques dans les vestiges d’anciens vaisseaux spatiaux.
Les combats sont très dynamiques et demandent une bonne micro gestion des véhicules. Placer ses troupes sur les hauteurs des dunes de sable confère un bonus de dégâts importants, ce qui incite le joueur à bien étudier le terrain avant de s’engager. D’autant plus que certains véhicules disposent de compétences spéciales comme le boost de vitesse ou bien des écrans de fumée capables de renverser le cours d’une bataille qui semblait perdue d’avance. Le gros bémol de Deserts of Kharak est son IA complètement à la ramasse. C’est bien simple, en difficulté facile ou normale, l’IA est juste aux fraises. Monter la difficulté permet à l’IA de compenser sa stupidité sans nom par de la tricherie. Bref, pas terrible.
Graphiquement, le titre de Blackbird Interactive est pas mal fichu et conserve avec brio la direction artistique caractéristique à la série. Le jeu tourne sur le moteur Unity qui s’en sort très bien. Il est relativement peu gourmand en ressources, puisque j’ai réussi à jouer à Deserts of Kharak en Ultra et 60 FPS sans trop de problèmes sur une configuration moyenne. Le zoom dans le jeu est impressionnant mais pique un peu trop les yeux si on s’approche trop du sol. Deuxième bémol du jeu, la caméra fait parfois n’importe quoi, surtout entre les cut-scenes de la campagne solo. La bande-son du jeu est un pur bonheur pour nos oreilles avec le retour à la baguette du grand Paul Ruskay. Ce compositeur, déjà récompensé pour son travail sur Homeworld en 1999, revient ici avec des sonorités orientales en parfaite harmonie avec le cadre désertique du jeu. Le sound design du jeu est lui aussi particulièrement réussi, que ça soit le bruit des véhicules dans le sable chaud ou la déflagration d’une bombe, renforçant encore plus l’immersion. Les doublages, sans être excellents, sont de bonnes qualités, critère indispensable pour un jeu narratif comme Homeworld.
Homeworld: Deserts of Kharak n’est pas aussi parfait que ses aînés, mais reste un RTS très solide. Parfait pour les néophytes de jeux de stratégie, Deserts of Kharak est relativement facile d’accès et propose une campagne solo de grande qualité. Blackbird Interactive n’a pas trahi l’esprit de la série et nous propose une parfaite introduction à l’univers des Kushans en attendant un hypothétique Homeworld 3. Prions ensemble le Grand Sajuuk pour que Gearbox nous entende…
Homeworld: Deserts of Kharak
Développeur : Blackbird Interactive
Prix : 28 euros