
#Hommage : Chris Cornell (1964 – 2017)
À croire qu’une malédiction plane sur le mouvement musical que l’on a appelé grunge… Des enfants de Seattle, combien déjà nous ont quittés prématurément ? Après Layne Staley (Alice in Chains), Kurt Cobain (Nirvana), Andrew Wood (Mother Love Bone), une liste à laquelle on pourrait ajouter Scott Weiland (Stone Temple Pilots), c’est au tour de Chris Cornell de tirer sa révérence, comme ça, sans prévenir.
Né le 20 juillet 1964 à Seattle, Chris Cornell faisait partie des fameux mousquetaires du rock indépendant qui réussirent, bien malgré eux, à ringardiser deux décennies de musique bruyante. Le terme grunge que la presse et les fans ont collé sur leur dos ne voulait d’ailleurs pas dire grand-chose… Entre Soundgarden et Nirvana, l’auditeur moderne aurait bien du mal à trouver des similitudes.
Oui mais voilà, il faut se souvenir de cette époque, des grosses machines chevelues des années 80 boursouflées de dollars et de maquillage à la Mötley Crüe remplissant des stades et vendant des camions de t-shirts faussement provocateurs, oubliant presque après avoir descendu une bouteille de Jack Daniel’s entre les mamelles d’une accorte nymphette qu’ils étaient avant tout des musiciens !
Le grunge, tout comme le punk avant lui, fut une réaction épidermique. Assez de costumes de scène bariolés et de pantalons en spandex, vive les chemises à carreaux et les jeans crades ! Et la musique… Avec le regretté Layne Staley et Eddie Vedder, Chris Cornell partageait une qualité rare, une voix unique, d’un autre monde, couvrant plusieurs octaves et mêlant la puissance héroïque d’un Robert Plant avec la profondeur et la chaleur d’un chanteur de blues, une musique qu’il affectionnait particulièrement.
Cette voix, il l’a mise au service d’un rock difficilement définissable. Des premiers albums de Soundgarden à ceux enregistrés avec Audioslave en compagnie des anciens membres de Rage Against the Machine en passant par ses albums solo sans oublier le chef-d’œuvre Temple of the Dog (qui verra émerger des cendres de Mother Love Bone le futur Pearl Jam), il est presque impossible de se mettre d’accord sur un style précis.
Pour paraphraser Ewan Currie des Sheepdogs qui répond simplement lorsqu’on lui demande quel est le style de son groupe « de la bonne musique », Chris Cornell ne faisait pas autre chose. Empruntant autant au punk qu’au rock psychédélique en passant par le heavy metal, le blues, la country ou la folk, la musique que nous a offerte Cornell transcende les genres et met à peu près tout le monde d’accord.
Rendons donc hommage à un immense personnage, l’un des fers de lance d’une génération à la fois bénie et maudite, l’une des dernières à avoir écrit des chansons à la force du vinyle sans bénéficier d’internet pour se construire une culture musicale, en écoutant quelques unes de ses compositions majeures.
Black Hole Sun (Soundgarden)
Le hit suprême, Black Hole Sun nous apprend beaucoup sur Cornell, obsédé par les Beatles auxquels ce titre rend un hommage à peine voilé. Il sera également la locomotive qui emmènera l’album Superunknown (1994) au sommet des charts, un album qui reste à ce jour la plus grande réussite du groupe.
Rusty Cage (Soundgarden)
Croisement improbable entre le heavy metal d’un Black Sabbath première époque (le riff s’inspire sans même se cacher de Paranoïd) et une ambiance country qui poussera plusieurs années plus tard Johnny Cash à en faire une reprise imparable, Rusty Cage allumait la mèche sur l’album Badmotorfinger (1991) qui ouvra les portes du succès à Soundgarden.
Hunger Strike (Temple of the Dog)
À l’origine composée pour Soundgarden, cette chanson fut finalement utilisée pour l’album Temple of the Dog avec la complicité d’Eddie Vedder au chant. Elle en dit long sur la colère sourde qui grondait dans les tripes de Cornell, ainsi que sur sa tristesse d’avoir perdu son ami et ancien colocataire Andrew Wood, événement tragique à l’origine de cet album unique d’un groupe qui ne l’était pas moins.
Cochise (Audioslave)
Quand la voix de Soundgarden rencontre les musiciens de Rage Against the Machine et bien… ça donne ça ! Un riff à se décrocher les cervicales sur lequel Chris Cornell se la joue plus Zeppelin que jamais, une alchimie parfaite. Ce groupe avait tellement de potentiel que ça fait mal au cœur de se dire qu’ils n’auront enregistré que trois albums…
Nothing Compares 2 U
Ironiquement, l’histoire retiendra que le dernier enregistrement de Chris Cornell restera une version du Nothing Compares 2 U de Prince en hommage à ce dernier après sa disparition soudaine… Comme disait l’autre, « monde de merde ».
Say Hello 2 Heaven (Temple of the Dog)
Pas le choix, il est temps de nous dire adieu l’ami… Merci pour tout, pour cette musique qui n’en finira pas de rendre des gens heureux comme elle le fit si bien pour qui tu sais. C’est ton pote Andy qui doit être content de te revoir. Say Hello 2 Heaven Chris…
En 1990, j’ignorais tout simplement l’existence du « Grunge », de Mother Love Bone et je ne savais pas qui était Andrew Wood. En 94, j’étais encore trop jeune pour mesurer l’impact – surestimé, peut-être, avec le recul – qu’avait pu avoir la mort de Cobain. En 2002, je ne m’intéressait plus suffisamment à cette « scène » pour prêter plus d’attention que ça à la mort de Layne Staley (dont l’esprit était déjà parti en vadrouille quelques temps avant son corps, malheureusement)…
Rien à ajouter à ce très bel hommage de mon collègue, si ce n’est une poignée de titres, même si je suis conscient que, si on s’y met tous, on risque d’être là pour un moment. Il n’empêche qu’on peut quand même citer ‘Spoonman’, ‘Let Me Drown’, ‘Superunknown’, ‘Gasoline’ ou ‘Show Me How To Live’… mais, surtout, en ce qui me concerne, la chanson qui ouvre le dernier album de Soundgarden (première période) : ‘Pretty Noose’ (https://youtu.be/f8nkHrv_4Mg).