Horror Flashback : Ring (1998)

Horror Flashback : Ring (1998)

« Le Martien ne connait pas la peur », c’est vrai, mais « le Martien aime la contradiction », c’est vrai aussi. Alors pour cette semaine dédiée à Halloween, une partie de la rédaction du Daily Mars va vous partager ses plus grands frissons cinématographiques. Cinq trouilles sur cinq jours (nous eûmes pu faire six, pour le jeu de mots de circonstance, mais nous aimons la contradiction, je vous l’ai dit. Faut suivre, hein). C’est l’un des trois fondateurs de cet estimable web-magazine qui ouvrira le bal (du diable), Dominique Montay. En Joie.

J’ai rarement peur. Au cinéma comme à la télé. Je sais reconnaître les mécaniques de la peur, mais elles apparraissent pour ce qu’elle sont : des mécaniques. L’enfant que j’étais était facilement terrorisé, par contre. A mesure que j’ai vieilli, que je me suis intéressé à la façon dont on faisait les oeuvres de fictions plutôt que les consommer telles quelles. J’y ai perdu de mon innocence. Et dit adieu à la peur.

J’avance blasé « oui, ok le violon ça fait sursauter », « oui, d’accord, quelqu’un est derrière la porte », « ah, tiens, elle est dégueu cette image ». J’arrive à reconnaitre quand c’est bien fait, efficace, mais pour autant je n’en transpire pas. Normalement.
En 1998, j’avais 20 ans. Plus l’excuse de l’enfance pour parler de peur. Et pourtant, au moment de voir le magnifique Ring d’Hideo Nakata, je n’en menais pas large. Ce film réussit à condenser tout ce qui me fait le plus peur au monde avec tant de brio que j’ai cru à un moment que Nakata n’avait qu’un seul but dans son film : ME faire peur.

Vidéos cradingues, aux images interdites. Photos distordues, visages anormalement altérés. Enfants innocents en ligne de mire. Le silence qui se voit briser par les hurlements. La solitude dans son logis. L’image d’un écran qui prend vie.

Toutes ces choses font que Ring est un film qui, encore aujourd’hui, déclenche un sentiment de malaise chez moi. Une peur réelle, ancrée, comme si je savais le film réél. J’ai regardé la vidéo montée de toutes pièces de Ring comme s’il s’agissait réellement d’une vidéo maudite. Je crains l’irruption dans le réél de cette jeune fille aux cheveux noirs. Je ressent tout.

Et pourtant tout est si faux. Fabriqué. Tout est tellement fait de ficelles que je connais, que je pratique depuis tant de temps. Comment ce film plutôt qu’un autre arrive à mettre en sourdine mon attuitude blasée. Jusqu’à me retransformer en l’enfant terrifiée par la nuit que j’étais ? Celui qui craignait de regarder par la fenêtre, seul, de peur de voir un visage apparaître dans la pénombre ?
Nakata parle à l’enfant que j’étais et lui redonne le contrôle. Et cet enfant est terrifié par ce qu’il voit.

Je me souviens, dans la salle de cinéma, de ce moment d’intense terreur. Celle où l’héroïne, guidée par cette vision d’horreur du bourreau, se rend compte que son fils est en train de regarder la vidéo. Et de se damner.

Et je me souviens de cette blague, qu’on s’était juré de ne jamais faire avec une amie de peur d’avoir un mort sur la conscience. Aller dans une salle de cinéma. Se déguiser en bourreau. Tapoter sur l’épaule du voisin devant et montrer sans bouger un coin de la pièce.
On ne l’a jamais fait. Pas seulement par peur de tomber sur un cardiaque. Mais parce qu’on savait à quel point cette image est capable de terroriser. Et qu’on ne la supporterait pas nous-même.

Je n’ai jamais revu Ring. Juste la suite, et son remake. Mais, de peur de ne pas revivre l’expérience comme elle fut vécue, j’ai préféré m’abstenir de revoir l’original. Pour protéger le souvenir unique. Ou bien par peur d’être terrifié comme un gamin, à nouveau.

Ring de Hideo Nakata, avec Nanako Matsushima, Miki Nakatami, Hiroyuki Sanada, Yuko Takeuchi

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