
Interview de Jeff Davis (Teen Wolf) : « Une des choses qu’on adore faire dans Teen Wolf, c’est faire peur.
Jeff Davis est un jeune showrunner de 39 ans, qui n’a que deux expériences à son compteur : la création d’Esprits Criminels et la série Teen Wolf. Avant ces deux expériences, il rédigeait des manuels d’utilisation pour une entreprise de logiciels après avoir décroché une maîtrise en scénarisation à l’USC (University of South California). Fan de films de genre, fin connaisseur de la pop culture, le Daily Mars l’a rencontré pour parler de son parcours un brin atypique, de ses inspirations mais surtout du phénomène Teen Wolf.
C’est assez rare de rencontrer un showrunner qui n’a que deux expériences sur sa page IMDB et la première étant un hit comme Esprits Criminels.
C’est un grand privilège d’avoir deux séries qu’on a créé en même temps diffusées. Quand j’ai pitché Esprits Criminels à CBS, je leur ai dit que je voulais faire la version psychologique des Experts, et j’avais fait beaucoup de recherches dans les fichiers psychologiques du FBI. La plupart des autres séries font de l’Agatha Christie, du mystère, moi je voulais faire du Hitchcock, du suspense. Avec les tueurs en série, le FBI doit essayer de trouver qui va être le prochain à être tuer. Ce contexte offrait un bon canevas pour la série. Et ils étaient ouverts à une série de suspense.
Exprits Criminels est mon tout premier projet, j’en ai écrit le pilote. Puis j’ai continué à écrire d’autres pilotes, c’est Teen Wolf qui est arrivé juste après. Et ma vie entière s’est organisée autour de Teen Wolf depuis les 4 dernières années ce qui explique les deux crédits sur ma page IMDB.
Donc vous êtes passés des monstres réels à des monstres virtuels…
J’adore Teen Wolf, c’est un série proche de moi et de mon écriture. J’ai créé tellement de relations grâce à la série, nous avons fait 60 épisodes jsuqu’à maintenant, et nous allons en faire 20 de plus. Je n’aurais jamais imaginé qu’on ferait 80 épisodes de Teen Wolf. J’adore écrire sur du supernaturel, quand tu écris sur du supernaturel, ça offre tellement plus de liberté pour créer de la mythologie, pour utiliser des mythologies existantes, c’est amusant ! Et on a pu y ajouter beaucoup de sens de l’humour.
La comédie reste très présente bien que la série devienne de plus en plus noire… Comment garder cet équilibre ?
C’est difficile à faire, mais on essaye de trouver un sens du rythme. Trouver le moment pour rire, et trouver la place pour un moment plus dramatique… J’ai la chance d’avoir de nombreux acteurs comiques sur la série et de nombreux acteurs vous surprendraient avec le talent comique. Tyler Posey est aussi drôle que Dylan O’Brien par exemple. Mais Dylan O’Brien a été choisi, car on voulait ce sidekick comique et c’est aussi un incroyable acteur dramatique.
L’humour est une des choses dont je suis le plus fier dans la série, avoir des moments qui vont faire rire les gens.
Il y a aussi beaucoup de références à d’autres mythes ou shows dans la série…
Une des choses que les fans de la série préfèrent c’est les mythes, le fait qu’ils peuvent aller voir en ligne et essayer de comprendre ce qu’est un druide noir, un kanima ou les différents types de loup garous… Je crois que ce que les fans adorent le fait qu’on respecte la hierarchie d’une meute de loups avec les Alpha, Beta et Omega. Il y a beaucoup de choses qui passionnent les fans en ligne dans la série.
Je suis aussi un amoureux de pop-culture et j’adore le “genre”. J’adore la science-fiction, l’horreur, le suspense, j’écris dans plusieurs genres également. C’est une des choses que je préfère quand j’écris pour Teen Wolf, c’est qu’on croise souvent les genres. On a des épisodes plus horrifiques, d’autres d’action, d’autres plus comiques.
Les films d’horreur me terrifiait quand j’étais enfant, je ne sais pas trop quand j’ai commencé à les apprécier. Les dents de la mer et The shining sont les deux films qui m’ont le plus traumatisé etant enfant mais j’ai appris à aimer les films d’horreur au fur et à mesure à cause du rush d’adrenaline qu’on ressent. Ils sont excitants et vous font sentir vivant, c’est une des choses qu’on adore faire dans Teen Wolf, c’est faire peur.
Généralement la mythologie est une métaphore surtout dans le film de genre, quelle est la métaphore de Teen Wolf ?
On a commencé avec la métaphore du film, celle de la sexualité adolescente. Mais au fur et à mesure, nous sommes allés davantage vers une mythologie de comics. Joss Whedon a fait quelque chose de très intelligent en mettant en scène un lycée comme un film d’horreur. Les peurs du lycée sont devenues des films d’horreur.
Chez nous, ce qui est formidable, c’est qu’on a une sorte d’histoire de comics avec un héros. Un des sujets principaux de la série, c’est l’amitié. Et si nous devions être la métaphore de quoique ce soit, ce serait la métaphore des familles non-conventionnelles. Ces ados sont pour beaucoup issus de familles mono-parentales et ensemble, ils forment une sorte de meute. Dans notre série, c’est plusieurs meutes, comme des groupes d’amis. Vous ne voyez pas de bandes dans notre lycée ou de lycées populaires.
Les femmes de la série sont très puissantes, même si elles sont des adolescentes.
Voir ma mère élevée seule 3 garçons a forcément été une inspiration, mais des personnages comme Buffy, Ripley dans Alien m’ont aussi influencé. Mais je cherche aussi à rendre tous les personnages égaux entre eux et si ça peut permettre à des jeunes femmes de s’identifier positivement, tant mieux.
Teen Wolf est aussi connu pour ces scènes où les hommes apparaissent sans T-shirt….
Pendant des années, on a capitalisé sur l’image des femmes dans les films, il est peut être temps que ce soit au tour des hommes. Je dis ça en riant en partie, mais particulièrement en télévision, les femmes ont été excessivement sexualisées, c’est intéressant de voir enfin des hommes sexualisés à la télévision et ailleurs. Même si on ne fait plus autant de scènes torse nu qu’on le faisait avant…
Pourquoi avoir inclus des figures parentales si fortes aux côtés des ados dans la série ?
Mes deux frères et moi avons grandi dans une famille monoparentale. Ma mère nous a élevé seule pendant longtemps, puis nous avons eu un beau-père à l’adolescence. Et cette structure a été une grande influence pour nous, je voulais montrer des adultes réalistes. Je ne voulais pas d’adulte qui ne croyait pas leurs enfants.
Les adolescents d’aujourd’hui parlent à leurs parents de différentes manières, en tout cas aux Etats Unis. Ce sont des relations différentes et je voulais montrer une relation plus proche entre les parents et leurs enfants dans la série. j’aime l’idée que les parents puissent être des alliés au lieu d’antagonistes.
C’est quelque chose qu’Harry Potter m’a inspiré. Les professeurs deviennent les alliés des étudiants et ils ne sont pas juste des figures d’autorité qu’on voit dans la plupart des séries adolescentes. Et je pense que c’est inhabituel et que ça créé des histoires intéressantes.
Vous êtes un showrunner ouvertement homosexuel comme Ryan Murphy, Kevin Williamson ou John Logan qui se sont également mis à faire des séries de genre, y a-t-il un mouvement vers le genre de la communauté gay ?
Le “genre” est la source d’évasion ultime. Beaucoup d’entre nous ont vécu des adolescences compliquées voire difficiles. Je sais que mes années d’adolescence ont été passées le nez dans un livre ou à regarder des films. Et les films de genre nous permettent de nous évader totalement, de créer un monde totalement différent, un monde de pouvoir et de peur. Peut être que ça touche notre psyché d’un certaine manière… mais c’est une tendance intéressante, quelqu’un devrait écrire un papier dessus (rires)
La saison 4 de Teen Wolf est diffusée le vendredi soir à 22h sur MTV France.