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INTERVIEW de Nicolas Courcier, co-fondateur et directeur éditorial de Third Editions

INTERVIEW de Nicolas Courcier, co-fondateur et directeur éditorial de Third Editions

livre-metal-gear-solid1) « Metal Gear Solid : Une œuvre culte de Hideo Kojima » revient sur toute la saga, excepté le cinquième épisode. Comment procède-t-on pour réaliser un livre de ce genre ?

La première étape, en ce qui nous concerne mon coauteur et associé Mehdi et moi-même (je ne parle donc pas pour les autres auteurs), est de refaire les jeux. Même si on peut trouver les déroulements complets sur Youtube, rien ne permet de s’immerger mieux que de refaire tous les jeux. En jouant, on prend beaucoup de notes (surtout concernant le scénario) et on discute aussi de futurs points d’analyse. Une fois fini, on reprend nos brouillons et on rédige. Il suffit enfin de bien hiérarchiser le tout et de relire, et relire encore.

2) Le livre retrace toute l’histoire de la saga de manière chronologique. A l’époque de Metal Gear Solid 1, Kojima ne pensait pas réaliser la suite du jeu. Est-ce que l’histoire forme un tout pertinent ou tombe-t-on parfois sur des incohérences pour des dates ou des personnages ?

Il est certain que Kojima ne prévoyait pas au départ de poursuivre sa saga sur plus de 20 ans. Pourtant, on remarque qu’il a pris soin de bien relier tous les morceaux entre eux, même s’il reste des justifications un peu faciles (les fameuses nanomachines de MGS 4) ou quelques incohérences (qu’il revendique lui-même pour MGS V). En tout cas, on aura rarement vu de saga proposer un « feuilleton » aussi cohérent et passionnant au final.

3) Metal Gear Solid V: Phantom Pain est sorti maintenant il y a quelques jours. Avez-vous eu l’occasion d’y jouer et peut-être même de le terminer ? Quel est votre avis sur cet ultime épisode, qui devrait être l’opus qui « boucle la boucle » ?

Oui, il est enfin terminé ! Cet épisode surprend car Kojima a, en gros, proposé le MGS parfait pour ceux qui y étaient allergiques. Je développerai évidemment davantage dans la mise à jour du livre prévue pour novembre, mais d’un point de vue technique ou en termes de gameplay, le titre est difficilement attaquable. Il m’a fallu un peu plus de 50h pour voir la fin et l’envie de jouer était encore là. Certes, les objectifs de mission sont répétitifs, mais le monde ouvert et le gameplay permettent des approches sans cesse renouvelées. Concernant le scénario, c’est assez différent de ce que l’on connaît d’habitude : un propos étiré et saucissonné, peu de moments véritablement cultes, un découpage assez étrange (notamment dans le chapitre 2), mais le tout reste tout de même assez brillant et superbement mis en scène.

3a1c57c99c760a1770c121f2ec0a7cff201506052226084) L’un des reproches fait sur Phantom Pain est son éclatement de la narration au profit de l’open world, une cassure importante pour une saga où le storytelling est important. Même Witcher 3 force le joueur à revenir sur des rails lorsqu’il veut raconter une scène clé. Est-il impossible d’avoir une histoire et un rythme fort dans un jeu open world ?

Il s’agit d’un débat très actuel et, pour être totalement honnête, je ne suis pas un grand fan des jeux à monde ouvert. Dans GTA par exemple, je trouve aberrant que le trajet pour se rendre à une mission puisse parfois être plus long que la mission elle-même. D’autant que si on ne roule pas à 50 km/h, on risque de se faire poursuivre par la police et de perdre encore plus de temps. Il existe bien sûr les déplacements rapides, mais on perd l’intérêt du monde ouvert. The Witcher 3 m’a beaucoup plus plu. On est à cheval, pas de police et le monde est enchanteur. La différence entre GTA, Witcher et MGS, c’est que dans les premiers, la quête principale ne sert que de fil rouge et est assez peu mise en avant, là où les quêtes annexes présentent autant d’intérêt. L’écriture des deux jeux permet donc d’alterner entre l’une ou l’autre des missions pour s’amuser. Dans MGS, la quête principale est le seul fil rouge, d’autant plus que la majorité des missions n’ont aucun rapport avec la trame globale. On est alors beaucoup plus axé sur l’exploration du gameplay. Je n’ai pas trouvé la narration open world si dérangeante (Peace Walker allait déjà dans ce sens), c’est juste que le 2e chapitre peut se montrer très obscur quand il s’agit de débloquer les missions suivantes. On sent en tout cas que Kojima a atteint sa plénitude en tant que créateur de jeu.

5) On sent dans Phantom Pain une structure « série » grâce aux génériques qui ponctuent chaque mission principale, un procédé original et qui paraît logique quand on voit que la série TV prend de plus en plus le pas sur le cinéma. Mais est-ce que cette logique est pertinente dans un jeu qui, de base, est déjà découpé en missions ?

Pour le coup, ce sur-découpage n’est pas vraiment utile ou justifié et il est même assez contraignant et répétitif. Je pense qu’il s’agissait davantage d’un effet de style de la part de Kojima que d’autre chose.

6) Le clash Kojima/Konami a fait grand bruit il y a quelques mois. On sent que c’est la résultante de la confrontation entre l’ego de Kojima et la situation économique de Konami. Quel est votre avis sur la situation ?

Je pense que clash avec Konami ou pas, ce MGS V aurait été le dernier de Kojima, quoi qu’il arrive. C’est peut-être là le problème. Il ne faut pas nier non plus que Kojima Prod devait coûter une fortune à Konami, pour un rendement bien moindre. En tout cas, je suis assez curieux de voir ce que va pouvoir faire Kojima une fois « livré à lui-même »…

metal-gear-solid-ground-50f7cecc59f3e7) Maintenant que Kojima n’est plus lié à la série Metal Gear, pensez-vous qu’il continuera à faire des jeux ou que son implication sur la saga est tellement forte qu’il n’arrivera pas à retrouver la même énergie ?

C’est surtout une question d’argent ! Kojima est habitué à travailler dans un environnement où il ne manquait de rien. En indé, ce ne sera pas là même chose. Après, je ne doute pas qu’il puisse trouver de grosses sources de financement pour son prochain projet, mais s’il n’est pas encadré, j’ai très peur qu’il parte dans tous les sens ou explose les budgets.

8) Konami de son côté, possède toujours la licence. Mis à part créer des pachinkos avec le thème de Metal Gear, quelles seraient leurs possibilités maintenant que l’histoire « Solid » est terminée ?

Ils sont dans une posture idéale : ils possèdent une IP adorée des joueurs et un moteur de jeu excellent et facile d’utilisation ! Plusieurs pistes maintenant : poursuivre l’aventure (pourquoi pas le MGS mettant en scène The Boss dans la Seconde Guerre mondiale) ou faire des remakes de MG 1 et 2.

9) Quel est pour vous l’épisode qui vous aura le plus marqué ? Et la meilleure séquence de toute la saga à vos yeux ?

C’est très difficile pour moi de répondre. Je sais seulement que MGS 4 est l’épisode que j’apprécie le moins (si on exclue MG Portable OPS du canon). Après, le premier contact avec la série dans MGS 1 reste inoubliable. Mais j’adore aussi MGS 2 et 3. Je n’ai pas encore assez de recul concernant MGS V, mais depuis sa sortie, il hante mes pensées.

10) Quels sont vos projets futurs en ce qui concerne la saga Metal Gear ? Ou peut-être d’autres sagas du jeu vidéo ?

Nous allons mettre à jour notre précédent livre, sorti il y a 3 ans chez Pix’n Love. Du coup, ça nous permettra de boucler la boucle concernant le travail de Kojima sur la saga. Concernant d’autres sagas, nous sortons aussi un bouquin Pokémon en décembre.

 

« Metal Gear Solid: Une oeuvre culte de Hideo Kojima »
Chez Third Editions

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