
#Interview Gareth Edwards : « J’ai essayé de combiner l’intimité d’un petit budget et l’amplitude d’un Star Wars » 1/2
À la tête du film le plus attendu de cette fin d’année, Gareth Edwards était à Paris le 29 novembre pour la promo de Rogue One, spin off situé entre les épisodes III et IV. Première partie de notre rencontre.
15 jours avant la sortie mondiale de Rogue One, Disney dégaine enfin l’artillerie lourde. Le réalisateur britannique Gareth Edwards est à Paris pour la promo de « son » film et enchaîne les interviews. Bien sûr, personne n’a vu Rogue One (quelle idée !), mais l’interview va cependant se révéler bien plus passionnante que prévue, Gareth Edwards, gros fanboy de Star Wars, refusant la langue de bois, fréquemment utilisée lors de ces gros événements de com-propagande.
Cinéaste de 41 ans, Gareth Edwards est l’auteur du très sympatoche Monsters, réalisé en 2010 pour le budget café de Rogue One, et le remake tout pourri de Godzilla (2014). Cet après-midi – mardi 29 novembre –, ce sont les bloggeurs et les journalistes de sites spécialisés qui soumettent Gareth Edwards à la question. Un cadre de chez Disney nous intime de ne rien publier sur le net avant le 5 décembre et semble un peu étonné quand je lui assure que les interviews de ce matin sont déjà sur le Net… Dans l’assemblée, peu de filles, look barbes fournies, pins Star Wars et T. Shirt Superman. Les bloggeurs affûtent leurs questions, mais quand Edwards déboule – veste à carreau de notaire, jeans élimés, basket, barbe mal peignée – c’est le silence absolu. Avec son mauvais esprit habituel, le journaliste du Daily Mars (c’est moi) en profite pour poser une première question un poil vacharde. C’est parti…
Vous avez tourné votre premier film, Monsters, avec seulement cinq techniciens sur le plateau, et Rogue One avec plus de 1000. Est-ce que c’est encore le même métier, est-ce encore de la mise en scène ?
GARETH EDWARDS : Cela va vous sembler étrange, mais c’est à peu près la même chose. Dans un film de cette ampleur, le réalisateur est vraiment dans une bulle, il est tout le temps protégé. Bon, je ne savais pas qui étaient ces gens sur le plateau, ce qu’ils faisaient ou quels étaient leurs noms. En fait, je parlais en direct aux comédiens, aux assistants réalisateurs et au directeur de la photo. Et c’est tout ! Je n’avais aucune idée de ce que faisaient tous les autres. C’est simplement dingue. Mon premier film, comme vous l’avez dit, était un tout petit film, indépendant. Godzilla, mon second, un gros film hollywoodien. Il y a des avantages dans chaque cas de figure. Il y a beaucoup de restrictions quand vous tournez un petit film et on vous demande parfois comment vous avez réussi à faire un aussi bon film avec aussi peu d’argent. Mais on peut aussi se demander comment faire un bon film avec AUTANT d’argent. Avec un très gros budget, vous avez beaucoup de pression, c’est dur de faire un bon film quand il y a tant de monde qui intervient. Sur celui-ci, j’ai essayé de mixer le meilleur des deux mondes. Avec le chef op’, j’ai établi un « livre de règles », pour que nous soyons un peu plus libres. On ne mettait pas de marques au sol pour les acteurs, on pouvait tourner sur un plateau à 360°… J’ai essayé de combiner l’intimité d’un petit budget, l’aspect émotionnel et vrai, avec le scope, l’amplitude d’un Star Wars.
Qu’avez-vous ressenti quand vous avez su que vous étiez choisi pour faire le film ?
G. E. : J’ai cru que c’était une erreur, que le mail ne m’était pas destiné. Après Godzilla, qui était un gros film, j’étais épuisé, j’avais besoin de vacances. J’ai reçu un mail de LucasFilm et j’ai pu dire que j’adorais cet univers. Puis j’ai reçu un nouvel email avec deux idées. La première, ce n’était vraiment pas pour moi. Et pour la seconde, je me suis dit qu’il y avait un lien avec les films que j’aime. Mais je croyais que j’étais en compétition avec une dizaine de réalisateurs. Mais à chaque réunion, il n’y avait que moi. J’étais un peu parano et je ne devais absolument pas en parler. Je me souviens qu’un Noël, toute ma famille m’offrait des cadeaux Star Wars et je ne pouvais pas dire que j’étais sur le point d’être engagé… Juste avant de signer le contrat définitif, j’ai eu dix minutes avant que la nouvelle ne se propage sur le net. J’ai appelé ma mère sur FaceTime et j’ai vu son visage stupéfait quand je lui ai avoué que son fils allait réaliser le prochain Star Wars.
Comment vous êtes-vous approprié la mythologie de Star Wars ?
G. E. : Souvent dans un film, on a une idée de départ et le problème, c’est la fin. Ici, nous avions le problème opposé et nous savions comment Rogue One se terminerait car il doit raccorder avec l’original, l’Épisode IV (Star Wars : Un nouvel espoir). Mais si on savait comment se terminerait le film, on ne savait pas comment il allait commencer. Nous sommes donc partis de la fin, en essayant des tas de choses, comme avec un mécanisme d’horlogerie qu’il faut remonter. Il fallait sélectionner les millions d’éléments des autres Star Wars, mais de façon différente. Nous avons essayé d’enlever tous les éléments de science-fiction de la ligne narrative, comme si c’était un film historique. L’Étoile de la mort est l’équivalent de l’arme suprême, de la bombe atomique pendant la Seconde Guerre mondiale. J’ai bossé à la BBC, notamment sur un doc sur Robert Oppenheimer qui fut un des pères de la bombe, qui a éprouvé beaucoup de remords après avoir enfanté ce monstre technologique. Oppenheimer a inspiré le personnage du père de Jyn Erso, Galen (joué par Mads Mikkelsen, NDLR), dans notre film. Dans les différents épisodes de Star Wars, il est beaucoup question des relations entre parents et enfants, les pêchés des parents, la rébellion des enfants, la rédemption. C’est en reprenant cette colonne vertébrale que l’on a trouvé la structure narrative de notre film.
Retrouvez-nous demain pour la suite de cette interview.
Rogue One : A Star Wars Story
Réalisé par Gareth Edwards
Sortie française le mercredi 14 décembre 2016
Bon article, à une coquille près : Godzilla est un BON film (bien sûr que c’est objectif).
Godzilla, un grand film ? La version Inoshira Honda, oui, absolument. Celle de Gareth Edwards, non, pas vraiment.