
Interview : Hugh Sullivan, réalisateur de The Infinite Man
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Dean aime tout contrôler. Dean est névrotique. Dean est maladivement obsessionnel. Alors quand le week-end de rêve qu’il a organisé avec sa petite amie tourne en eau de boudin, il décide d’appuyer sur le bouton reset et de revenir dans le passé. De boucles temporelles en foirages spectaculaires, il va alors s’égarer dans les dédales du temps au risque de perdre sa belle à tout jamais.
Présenté en 2014 aux festivals SXSW et Fantasia, le poids plume The Infinite Man de Hugh Sullivan avait réussi malgré un très petit budget, un scénario emberlificoté et un statut de gentil outsider à charmer à peu près tout le monde, critiques et spectateurs compris (votre serviteur itou). S’il n’a malheureusement pas pu trouver la place qui lui revenait de droit dans les salles obscures hexagonales, le film est toutefois disponible depuis le 25 juin en VOD grâce à Pickup Films pour votre plus grand bonheur. L’occasion donc de poser quelques questions à son réalisateur qui a gentiment pris le temps d’y répondre par mails interposés.
Daily Mars : Dean est un personnage obsédé par une certaine idée de la perfection. Pensez-vous que cette volonté de vouloir tout rendre parfait soit une sorte de mal moderne dont nous souffrons tous ?
Hugh Sullivan : En ce qui me concerne, j’en souffre dans mon travail, j’essaie et j’échoue constamment. En ce qui concerne ma vie privée, je ne sais pas… Il y a une forme de bonheur – le fait d’atteindre un but ou de donner à sa vie un sens – auquel nombre d’entre nous souhaitons accéder. Et une fois qu’on y accède, on en veut toujours plus. Les gens imaginent souvent qu’ils peuvent ou qu’ils doivent être toujours plus heureux, plus comblés. Plus parfaits. Selon moi, tout ceci n’est qu’une forme de luxe : ceux d’entre nous qui recherchent la perfection à tout prix ont souvent trop de temps à perdre et pas assez d’excitation dans leur vie.
DM : De la même manière, le personnage de Dean semble penser que ses plus grands adversaires sont les autres alors que la vraie source de ses problèmes est lui-même. Considérez-vous que ce soit le cas en règle générale ?
HS : Je pense effectivement que c’est le cas pour certaines personnes, mais pas tout le monde. Pour certains leur relation à eux-mêmes est très compliquée et cela rend leur existence même assez compliquée. Mais encore, on ne peut pas non plus faire de telles généralités. Cependant, j’ai quand même vu assez d’actes d’autosabotage assez spectaculaires pour penser qu’il s’agit bien d’un phénomène assez courant.
DM : À un moment donné dans le film, les lignes temporelles se croisent et deviennent assez dures à suivre. Comment avez-vous fait pour vous y retrouver? Y avait-il un énorme tableau noir avec des tas de lignes partout ??
HS : Au début, j’ai fait des diagrammes mais au fur et à mesure, c’est devenu plus simple pour moi de m’y retrouver. J’ai porté cette histoire en moi depuis tellement longtemps qu’elle m’est devenue vraiment familière. Mais oui, c’était tout de même un énorme travail. Un travail qui ressemblait au final assez souvent à l’histoire du film : des révisions constantes, de l’autosabotage à n’en plus finir et du fignolage graduel. Le tout porté par un protagoniste un poil instable.
DM : Le décor, un hôtel séparé en deux parties distinctes, ressemble pour moi à un cerveau ou Dean semble toujours être dans l’hémisphère gauche, la où dit-on se situe la raison, la logique et le côté analytique de l’être humain. Ai-je tort ?
HS : Pour moi, ce bâtiment représente de manière assez claire l’idée d’une conscience divisée et des travaux répétitifs d’un esprit instable. Pourtant, nous n’avons pas eu à le construire. Nous avons été chanceux de trouver cet endroit (un lieu où s’installent généralement des campings cars) dans le village de Woomera. Depuis des années, il sert au Département de la Défense pour des tests de missiles et est à ce qu’on m’a dit le lieu de nombreuses activités extraterrestres…
DM : Le rôle de Dean semble avoir été écrit pour l’acteur Josh McConville. Est-ce le cas ? Comment vous êtes-vous rencontrés ?
HS : Non, le rôle n’a pas été écrit pour Josh. Toutefois, à la fin du processus d’écriture quand je commençais à penser au casting, Josh m’est venu à l’esprit comme un excellent candidat pour le rôle. Nous ne nous étions jamais rencontrés mais j’avais déjà vu son travail sur Internet et il avait déjà acquis une certaine réputation au théâtre. C’est un excellent acteur dramatique avec un impressionnant timing comique. Il était parfait pour le rôle.
DM : Quand on voit le film une deuxième fois, on remarque de nombreux détails qui nous avaient échappé. Avez-vous construit le film dans ce but ?
HS : Oui, je souhaitais vraiment que le film puisse subir sans problème plusieurs visionnages et qu’il s’améliore pour le spectateur au fil du temps.
DM : J’ai vraiment hâte de voir votre prochain film. Avez-vous d’autres projets en vue, d’autres thèmes que vous souhaitez aborder ?
HS : Merci et oui, je suis en ce moment en train de travailler sur un nouveau projet. J’ai toutefois peur de ne pas pouvoir en révéler d’avantage à l’heure actuelle. Peut-être que cette fois, j’essaierai de faire un film un peu moins compliqué. Une chose est sûre, il y aura surement moins de voyages temporels.
Retrouvez ici la critique de The Infinite Man réalisée à l’occasion du festival Fantasia 2014.
Pour le film en VOD c’est par là…
The Infinite Man écrit et réalisé par avec Josh McConville, Hannah Marshall et Alex Dimitriades. Sortie en VOD le 25 juin
Daily Mars: Do you think that Dean’s obsession with perfection is something that many of us are suffering from and if you do, why?
Hugh Sullivan: Certainly with my work, I try, and fail. As for perfection in life, I don’t know… If it’s just some kind of happiness – a feeling of fulfillment and meaning in one’s life – then it’s true that many are obsessed with the attainment of it. And then with the attainment of more of it. People will always feel they could – or should – be happier, more fulfilled. More perfect. Of course, this is all somewhat of a luxury: those of us seeking perfection probably have too much time on our hands, and not enough danger in our lives.
DM: Dean seems to think that his worst ennemies are the others, when the real problem is himself. Do you think that in most cases it’s the same for us? That we are our worst ennemies in life?
HS: I think it’s the case for some people, though certainly not all. Some people just have a more complicated relationship with themselves, which can make for a more complicated existence. Again, it’s difficult to generalize when circumstances differ so greatly. But I’ve seen enough acts of spectacular self-sabotage to believe it’s quite commonplace.
DM: How did you manage to keep all the timelines in order? I imagine a very big black board without a lot of lines everywhere!! It seems like a lot of work no?
HS:In the beginning there were diagrams, but as the project progressed it became easier to keep track of things. I found I’d been living with it long enough that there was a certain familiarity with it all. But, yes, it was a fair amount of work – work that often resembled the story itself with its endless revision, constant self-sabotage and gradual refinement. All carried out by an increasingly unstable protagonist.
DM:The set seems to be designed to look like a brain where Dean is trapped on the left side where all the logic, the reflexion and the analytic side of the human being happens. Am I wrong?
HS: To me, the buildings seemed like quite a striking manifestation of a divided self, and of the recursive workings of an unstable mind. There was, however, very little designing on my part. We were lucky enough to stumble upon the location (part of an operational caravan park) in Woomera Village, which is run by the Department of Defence, and has over the years been the site of missile and rocket tests, and (it is believed) much UFO activity.
DM: The role of Dean seems to be written for Josh. Has it? How did you two meet?
HS: No, the role wasn’t written for Josh. Towards the end of the writing, however, when I started to think more about casting, Josh certainly came to mind as a potentially great Dean. We had never met before, but I had seen bits and pieces he’d done online, and he had already made quite a name for himself in theatre. He’s an incredibly strong dramatic actor with equally impressive comic timing. He was perfect for the role.
DM:When you see the movie a 2nd time like I did, you notice a lot of details that you can’t see in the first place. Have you designed the movie for this purpose?
HS:Yes, my hope is that it stands up to multiple viewings, and perhaps even improves with each one.
DM:I’m really looking forward for your next movie, do you have plans, projects, themes you want to tackle?
HS:Thank you, yes I am working on something at the moment but I’m afraid it’s a little too early to say much about it. Perhaps it’ll be a little less complicated than the last one. It will certainly have less time travel.