Introduction à la fan-fiction (Community, Bilan de la saison 4)

Introduction à la fan-fiction (Community, Bilan de la saison 4)

Note de l'auteur

Six saisons et un film. En a-t-on encore envie après cette saison 4 ? Aussi heureux étions-nous de voir revenir la bande de Greendale, autant apprendre le départ de Dan Harmon nous avait plongé dans une profonde perplexité. Voir tristesse. Dan Harmon n’avait pas tout réussi sur la série pendant trois saisons, certes, mais rarement une comédie avait possédée la voix de son showrunner. Comment s’en sont sortis Dave Guarascio et Moses Port ? (en même temps, le titre de l’article donne un sacré indice, non ?)

Community saison 4, une déception quasi-totale

Lors de leur arrivée sur la série, les deux nouveaux showrunners, histoire de rassurer les fans de la première heure, ont annoncé qu’ils adoraient Community, et qu’ils étaient particulièrement fans des parodies. Contre-sens pour certain, opinion superficielle pour d’autres, l’axe était pourtant affiché : le paint-ball, la parodie de Goodfellas… Des épisodes certes mémorables pour leur folie, mais qui peuvent être difficilement pris comme base de travail.

Ils ont au moins eu de la suite dans les idées, et quelque part ont mis en œuvre ce qu’ils avaient annoncé. On peut leur accorder ça. Le problème, c’est qu’ils ont traité la série et ses personnages en surface. Jeff Winger est un égoïste en phase de transformation, Troy est immature, Annie est obsessionnelle, Shirley est bien élevée, Britta est une activiste et une demi-psy de bazar, Abed est bizarre et Pierce ne sert à rien. Tous évoluent dans un univers quasi-conscient qu’il est fictionnel, le tout étant verbalisé par Abed Nadir et sa propension à tout ramener à des références cinématographiques ou télévisuelles.

« Regardez ce qu’ils disent de nous dans le Daily Mars. Pas cool, pas cool, pas cool. »

C’est la surface de Community, la partie visible de son iceberg. Si lors de la saison, Troy s’en sortira avec les honneurs, d’autres seront bien moins traités. Annie et Shirley n’ont quasiment servi à rien de la saison. Britta et Jeff auront soufflé le chaud et le froid. Britta avec sa volonté d’analyser Winger était assez intéressante, mais son couple avec Troy n’a quasiment rien amené (si ce n’est un bon épisode). Avec Abed, on a une grosse impression de foirage constant, d’être face à un sosie conforme mais ne réagissant pas comme il le faudrait, pantin désincarné.

C’est quelque part logique, tant Dan Harmon possédait un lien fusionnel avec Abed. Il avait commencé la série en se servant de Jeff comme étant sa « voix » dans le show, avant de se rendre compte qu’il s’exprimait plus via Abed. Harmon était le seul à comprendre la logique d’Abed, son mode de fonctionnement et sa façon d’interagir avec les autres. Il était aussi très certainement le seul à pouvoir l’écrire convenablement. Et Pierce n’a servi à rien. Encore plus que les saisons précédentes.

La saison possède deux épisodes de valeur, le 8e, « Herstory of Dance » montre un Abed un peu plus étoffé, qui débute une relation romantique avec une jeune femme adorable… qu’on ne reverra jamais. Le 11e, certainement le plus réussi, montre le destin du couple Britta/Troy, alors qu’Abed et Troy ont « échangé » leur personnalité. A ranger dans le correct, le 5e « Cooperative Escapism in Familial Relations », réussit à montrer Jeff faire face à son père, mais échoue lamentablement sur sa seconde intrigue, une parodie de Shawshank Redemption.

« Troy and Abed in a bad show ! »

Dans le même ordre, le 9e « Intro to Felt Surrogacy », vaut pour sa spécificité technique (les acteurs sont remplacés par des marionnettes type Muppet Show, et le 12e, « Heroic Origins », vaut par sa construction en flashbacks. Pour le reste, c’est le désert total, rien à sauver, ou presque, si ce n’est deux trois lignes de dialogue, par ci, par là.

Le plus cruel dans tout ça, c’est que Guarascio et Port n’ont pas réussi à faire leur série. Ils ont copié le modèle érigé par Harmon sans réellement comprendre son fonctionnement. Ils n’ont pas produit une série, mais une fan-fiction. Une fan-fiction bien écrite, certes, copiant les gimmicks de l’originale, mettant en avant ce qui plaît, faisant des clin d’oeils… Mais une fan-fiction, et rien de plus. La série échoue à être plus drôle que pendant les saisons antérieures. Ça aurait pu être une modification intéressante, mais ça n’arrive pas. Community peine à arracher quelques sourires.

Les références tombent à plat, sortent de nulle part. Rien n’est organique dans le processus, tout semble forcé, hormis les moments de grâce pré-cités. Ajoutez à cela que les pré-génériques sont parmi les plus faibles jamais vus à la télévision, et vous avez un panorama de la déception que représente cette saison de Community.

Chang, un personnage changissime

La série va revenir, et pourtant on aurait envie qu’elle soit euthanasiée. Les américains adorent les secondes chances, et, qui sait, Guarascio et Port auront peut-être appris de leurs erreurs. Ils auront peut-être compris que Chang est un personnage raté, et que ça ne date pas d’aujourd’hui. Que le Dean peut être drôle. Que balancer une intrigue forte dans une saison (la Changnésia de Chang et son implication) réclame qu’elle ait un climax. Qu’on doit éviter à tout prix le « mais en fait c’était un rêve », surtout dans un final.

Si on est optimiste, on peut se dire qu’ils ne peuvent pas faire pire. Pessimiste, on a envie de dire qu’ils n’ont rien compris: au suivant !

COMMUNITY, Saison 4 (NBC)

Créée par Dan Harmon

Showrunnée par David Guarascio et Moses Port

Avec : Joel McHale (Jeff Winger), Danny Pudi (Abed Nadir), Gillian Jacobs (Britta Perry), Alison Brie (Annie Edison), Yvette Nicole Brown (Shirley Bennett), Donald Glover (Troy Barnes), Chevy Chase (Pierce Hawthorne), Ken Jeong (Ben Chang), Jim Rash (Dean Pelton)

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