Le Top 10 des albums 2015 de Guillaume Nicolas

Le Top 10 des albums 2015 de Guillaume Nicolas

Maintenant que nous avons bien digéré les fêtes de fin d’année, il est temps d’effectuer un dernier coup d’oeil dans le rétro et dresser un bilan. La « team musique » vous en a concocté quelques-uns avec pour chacun des rédacteurs, un top des meilleurs albums de l’année 2015.

my-dying-bride-feel-the-misery-uneL’année 2015 a célébré les persévérants, les fidèles, les inconscients, les acharnés aveugles, les obstinés, les faux résignés, les optimistes, les habitués et les entêtés. Ceux qui, sous les assauts répétés d’albums médiocres qui ont fait fuir les moins endurcis (ou les moins masochistes), ont tenu bon jusqu’au bout, avec fierté, pour accueillir ces petits miracles. 2015, année phénix, et les cendres ont été fertiles. Nous pensions Marilyn Manson enterré après deux déconvenues ? Le révérend revient dans un blues écorché, industriel et semble avoir trouvé en Tyler Bates son nouveau Trent Reznor. On ne croyait plus au successeur de Quantos Possunt Ad Satanitatem Trahunt ? Gorgoroth sort les crocs dans un album bestial et sec qui conjugue black et death. Nous avions laissé Paradise Lost végéter dans les limbes d’un métal gothique sans âme ? Ils reviennent aux sources d’un doom death abyssal et suffocant. Les Anglais de Cradle of Filth avait fini par se noyer dans une représentation grand-guignolesque de leur métal extrême ? Il aura suffit de deux nouveaux guitaristes entreprenant pour reprendre les choses sérieusement. My Dying Bride alimentait les sarcasmes sur les groupes de doom death ? Ils font ravaler le sourire de leurs détracteurs et les plongent dans un abîme de désespoir. Même les thrasheux de Slayer semblent avoir repris du poil de la bête !

Des renaissances plus que des révolutions dans un mouvement commun pour reprendre la place que l’histoire du métal leur a octroyé. 2015 nous a donné le droit d’être nostalgiques sans regretter le présent.

blaze-of-perdition-near-death-revelations2015, c’est peut-être aussi l’année du black metal. On imaginait le genre un peu retranché, en panne d’évolution, à l’étroit, voire étouffé dans un modèle peu permissif. Depuis la troisième vague, l’horizon s’était refermé pour entretenir une dimension excédée où les démonstrations de force se sont confondues avec mimétisme et prostration. A l’image d’un Shining dont le neuvième chapitre (Everyone, Everything, Everywhere, Ends) flirtait avec le pilotage automatique d’une folie très calculée ou encore les Norvégiens de Vreid paralysés par l’exercice de l’hommage dans une vaine tentative de recréer musicalement Windir.

Des groupes ont voulu tordre le fil de l’évolution, coupant les trajectoires, emmêlant les styles pour retourner le black sur lui-même. De la recréation de Mürg à la métamorphose de Myrkur, de l’efficacité primale de Sacrificium Carmen à la rage progressive de Blaze of Perdition, du spleen Shoegaze de Glaciation au massif insubmersible Der Weg Einer Freiheit, du old school génial de Mgla au moderne extatique de Leviathan, le genre n’est jamais autant apparu dans toute sa complexité et sa richesse. Le black demeure cet exhausteur de sensation, d’émotion où la beauté réside dans une violence désespérée quasi maladive.

Glaciation_2015_SurLesFalaisesDeMarbre_coverDe ce bain bouillonnant aux formes archaïques ou sophistiquées, survolent trois groupes, pour trois propositions : Mgla, Blaze of Perdition et Myrkur. De la tradition, de l’évolution, de la révolution. Chacun de ses groupes incarne la face d’un genre qui n’aura jamais été autant protéiforme que cette année, tout en révélant ses surprises. Chacun incarne un point sur une ligne, comme une étape sur l’échelle de vie du black metal. La rugosité archaïque faite de motifs hypnotiques où la violence aime s’épuiser dans une forme répétitive dans Mgla ; les structures chaotiques de Blaze of Perdition dans lesquelles une folie enragée surgit pour faucher l’auditeur ; les volutes éthéréerennes de Myrkur qui aime ainsi opposer la fureur du black à la douceur d’un folk aux accents d’Heavenly Voices, où l’on ne s’étonnera pas de cette mixité, ainsi que des mentions mélodiques à Bergtatt d’Ulver quand on peut voir que Garm a produit le disque.

28445-asunder-sweet-and-other-distressDe la musique comme expérience, les Québécois de Godspeed You! Black Emperor ou les Américains de Sunn O))) se sont faits les représentants. Sans perdre leur faculté à emporter l’auditeur dans un tourbillon sonore jusqu’à perdre ses repères, les formes se sont simplifiées pour atteindre une sorte de sagesse, un sentiment de plénitude absolue. Du drone lumineux et spirituel au post-rock mélancolique, il fut bon de se laisser aller, sans chercher à se retenir. Un lâché prise nécessaire où plus rien ne semble avoir d’importance. Une escapade salvatrice face à une réalité qui aura laissé des marques.

Il est plus sein de relever les victoires, signalons Bruce Dickinson qui a battu son cancer de la langue et livré avec Iron Maiden, une prestation admirable et signé l’une des plus belles chansons de l’année : The Empire of the Clouds. The Book of Souls, seizième album de la vierge de fer prouve que les vétérans anglais sont encore capables de mettre le monde du heavy metal à ses pieds. Après quarante ans de carrière, cela relève autant du talent que du miracle.

1- MglaExercises in Futility
2- Blaze of PerditionNear Death Revelations
3- MyrkurM
4- Iron MaidenThe Book of Souls
5- Sunn O)))Kannon
6- MürgVarg & Björn
7- GlaciationSur les falaises de marbre
8- DjevelSaa Raa og Kald
9- Godspeed You! Black EmperorAsunder, Sweet and Other Distress
10- My Dying BrideFeel the Misery

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