Les séries mésestimées : Superman – The Animated Series

Les séries mésestimées : Superman – The Animated Series

Note de l'auteur

Superman, l’ange de Metropolis

Après la grandiose série animée Batman The Animated Serie (dont Dominique Montay nous vantait les mérites il y a quelques mois), et avant la grandiose série Justice League Animated, Bruce Timm et son équipe se sont attelés à la difficile tâche d’adapter en série animée les aventures de l’homme d’acier. A l’occasion de la sortie de Man of Steel, le Daily Mars revient sur cette formidable série, véritable clé de voûte de l’univers animé de DC.

 

Man of Steel débarque donc dans les salles cette semaine et qu’on l’attende comme le messie (Zack Snyder et Chistopher Nolan quoi !) ou qu’on le craigne comme la peste (Zack Snyder et Christopher Nolan quoi !), toujours est-il que ce film a le mérite de remettre Superman sur le devant de la scène. Si vous avez trouvé le film grandiose (avec Snyder et Nolan c’est normal) vous avez sans doute envie d’en découvrir plus sur le personnage, et si vous êtes sorti de la salle de cinéma en ayant eu l’impression d’avoir vu la pire merde de tous les temps (avec Snyder et Nolan c’est normal) vous avez sûrement envie de vous laver les yeux avec des oeuvres de qualité.

 

Au Daily Mars on a pensé à vous ! Outre nos précédents articles sur l’anthologie Superman et Superman – Les origines que l’on vous conseille vivement, et avant nos articles sur All Star Superman et La mort de Superman, nous avons eu envie de revenir sur Superman, The Animated Serie. Une adaptation intelligente, respectueuse et magnifique du plus grand des super-héros qui arrive à moderniser le personnage et son univers sans jamais fouler du pied ses fondamentaux.

 

Pourtant cela ne semblait pas franchement bien parti, car autant le chevalier noir de Gotham est un personnage qui inspira immédiatement Bruce Timm, autant ce dernier sécha longtemps sur l’ange de Metropolis. Ce ne sont pas tant les clichés que beaucoup de monde ont en tête (Superman est un personnage trop fort, trop bon, trop parfait donc ennuyeux) qui bloquèrent l’équipe, mais davantage la recherche de la bonne formule pour rendre le personnage crédible sans jamais être ridicule tout en conservant au maximum ses spécificités.

 

On pourrait résumer le problème de Timm en trois points : une galerie de méchants peu impressionnante en terme visuel, un personnage positif difficile à appréhender, et un environnement moins riche graphiquement que Gotham City. En un mot comme en cent, il semblait plus facile et simple de travailler sur un personnage daaaaaarrrrrrrkkkkk et vengeur que sur un être profondément bon. Pendant un temps, l’équipe envisagea même une série où Superman aurait été accompagné d’un autre héros à chaque épisode. Bref ça a tâtonné sévère et c’est tout à l’honneur de Bruce Timm et son équipe d’avoir su relever à bras le corps les difficultés de l’adaptation pour créer une oeuvre magnifique.

 

Niveau histoire, on vous la fait courte c’est du classique : alors que la planète Krypton est sur le point d’exploser, le scientifique Jor-El envoie son fils nouveau-né, Kal-El, sur la planète Terre. Recueilli par un couple de fermier, les Kent, le bébé grandit à Smallville sous l’identité de Clark Kent, et se découvre des pouvoirs extraordinaires à l’adolescence. Ayant découvert son héritage extra-terrestre, Clark Kent décide de partir à Metropolis et de devenir journaliste au Daily Planet. Il y rencontre le jeune photographe Jimmy Olsen, le bourru rédacteur en chef Perry White, et la journaliste tenace Loïs Lane. Dans le même temps Clark s’invente une seconde identité afin de mettre ses pouvoirs au service de tous, il devient alors Superman, l’ange de Metropolis.

 

Le « S » est parfait

Diffusé entre 1996 et 2000, Superman The Animated Serie (Superman : l’ange de Metropolis dans son très beau titre français), est une série tout simplement remarquable. Les difficultés initiales rencontrées par Bruce Timm et son équipe furent surmontées grâce à une approche intelligente et diablement excitante. C’est en travaillant sur la galerie des vilains que l’étincelle eût lieu car sachant que Darkseid serait présent, il n’en fallût pas beaucoup pour développer l’idée d’une série qui serait un hommage au créateur du puissant et terrible seigneur d’Apokolips, des New Gods et du Fourth World : Jack Kirby.

 

En partant de cette idée, tout le reste découle. Le graphisme du roi des comics (dont nous vantions les qualités de l’anthologie qu’Urban lui consacra il y a quelques mois) fut une base de travail formidable pour les créatifs. La série fut alors conçue sur la base d’un graphisme alliant simplicité et force brute, de fait elle devint le pendant lumineux de Batman, The Animated Serie. Là où Gotham City dégageait une ambiance baroque, Metropolis serait clairement construite comme la cité de demain : des immeubles immenses, une infrastructure à la pointe du progrès servant une ville aux rues vastes, éclairées et ne paraissant jamais dangereuses. Le costume de Superman quant à lui bénéficia de petites retouches discrètes et de subtils arrangements sur la couleur afin de le rendre totalement impressionnant à l’écran.

 

Le Toyman

Dans un second temps Timm fit un gros travail sur les vilains de la série. Plus le méchant est bon, meilleure est l’histoire selon l’adage qu’on ne démentira pas. Outre un Darkseid impérial (merci Michael « Richter » Ironside pour la voix), Superman TAS nous offre également un Lex Luthor (merci Clancy « le Kurgan » Brown) imposant et un Brainiac intimement lié à Krypton et Superman. Mais là où on retrouve la patte de Timm, c’est bel et bien dans la ré-interprétation de certains vilains. Des personnages comme le Toyman ou le Parasite acquièrent une nouvelle dimension et une présence dans l’asile d’Arkham ne dépayserait personne. Enfin, on ne peut pas oublier Bizarro et M. Mxyzptlk tous deux étant à l’origine des épisodes les plus drôles de la série sous la houlette du scénariste Paul Dini.

 

Mais bien plus que Batman, Superman est une série qui tire sa force de ces personnages secondaires dont les caractères et l’honnêteté renforcent le rôle de gardien de Superman. Que ce soit Jonathan et Martha Kent, Jimmy Olsen, Angela Chen, Perry White, Bibbo Bibbowski, Lana Lang, le professeur Hamilton ou bien encore Maggie Sawyer, tous participent à rendre crédible une cité aussi vivante que peut l’être Metropolis. On gardera une attention toute particulière pour Loïs Lane dont on apprécie le traitement loin de la femme potiche attirée par Superman (le triangle amoureux typique étant mis de coté dans la série) ainsi que pour le personnage de Dan Turpin. Ce flic à la grande gouaille et à l’intégrité sans faille possède les traits de Jack Kirby dans la série. Un très bel hommage de la part des créateurs de la série devenant encore plus poignant à la suite du magnifique épisode Apokolips… Now !

 

Course entre Flash et Superman dans l’épisode Speed Demons

Et niveau super-héros alors ? On sait qu’un des impératifs que se donna Bruce Timm pour Batman TAS fut de conserver l’aspect solitaire du personnage et de ne pas le lier à d’autres super-héros de l’univers DC. Pour Superman, modèle d’héroïsme par excellence, la question ne se posa pas, il fallait le faire combattre auprès des autres grands héros de DC Comics. Flash, Green Lantern, Aquaman, Steel, Fate, Supergirl, ils sont venus, ils sont (presque) tous là y compris bien sûr Batman. La rencontre entre les deux monstres sacrés à l’occasion du triptyque World’s Finest fait partie des monuments de la série. Cette aventure servit d’ailleurs de rampe de lancement pour la série The New Batman Adventures, série faisant suite à Batman TAS mais avec un graphisme plus proche de la série Superman. En un sens, cette dernière fut la véritable pierre angulaire de l’univers DC version animée car les héros et vilains présents dans la série et la présence du Batman tel qu’il fut conçu par Bruce Timm, sont le prélude à l’autre chef d’oeuvre de l’équipe : Justice League Animated

 

Enfin, par delà ses histoires passionnantes et sa capacité à jongler entre les épisodes épiques, cosmiques, horrifiques et comiques, la série Superman perpétue la volonté de repousser les limites des tabous de l’animation américaine que la série Batman avait initiée. Là aussi c’est surtout par petites touches que le travail s’effectue (des personnages de plus en plus sexy, l’allusion discrète à l’homosexualité de Maggie Sawyer) mais la série n’hésite pas à y aller franco également. On pense notamment à l’épisode The Late M. Kent se concluant sur l’exécution capitale d’un homme mais surtout au final d’Apokolips… Now ! qui nous montre la mort d’un personnage récurrent de la série et pas des moins populaires.

 

Lex Luthor (Clancy Brown)

A l’heure où la nouvelle adaptation cinématographique de Superman s’inscrit dans un environnement et une époque quelque peu inquiétante de par son refus à croire en des héros lumineux, la vision de Superman The Animated Series est un véritable remède pour quiconque aime Superman pour ce qu’il est et ce qu’il représente. Avec un Superman véritablement imposant (et cela sans jamais écraser son alter-ego Clark Kent), charismatique et totalement bon, Bruce Timm nous offre une série positive qui nous montre que des valeurs comme la vérité, la justice et l’idéal humain ne sont certainement pas désuets.

 

On vous laisse maintenant avec une petite sélection toute personnelle des meilleurs épisodes de la série.

 

Mxyzptlk vs Superman

Mxyzptlk (2.09) écrit par Paul Dini

Un mystérieux petit monsieur apparaît à Metropolis ; disposant de puissants pouvoirs il ne désire qu’une chose : faire tourner en bourrique un Superman qui n’arrivera à se débarrasser de lui et à le renvoyer dans sa dimension que s’il arrive à lui faire prononcer son nom : Mxyzptlk

Probablement l’épisode le plus drôle de la série (bien que Little Big Head Man le colle de très près) où délire surréaliste et humour cartoonesque se côtoient avec bonheur. La manière et la simplicité avec laquelle Superman use d’intelligence et de ruse pour renvoyer à chaque fois Mxyzptlk dans sa dimension, sont totalement tordantes tout en nous montrant que l’homme d’acier a aussi un cerveau. On retrouve également l’attirance de Dini pour les filles sexy en la personne de Gsptlsnz qu’on pourrait croire être la soeur de Jessica Rabbit.

 

Le Joker et Lex Luthor

World’s Finest (2.16 a 2.18) écrit par Alan Burnett, Paul Dini, et Rich Fogel

Le Joker et Batman débarquent à Metropolis. Le premier pour vendre de la kryptonite à Luthor et le deuxième pour l’arrêter et tandis que le Chevalier noir va faire la connaissance de Superman, Bruce Wayne va quant à lui séduire Loïs Lane

On en rêvait, ils l’ont fait. La rencontre au sommet des deux plus grands super-héros de DC Comics dans un triple épisode d’anthologie qui voit également la rencontre des deux Nemesis de nos héros. Burnett, Dini et Fogel arrivent à mettre en place cette relation unique, mélange de respect et de méfiance vis à vis de leurs méthodes, entre les deux personnages au sein d’une grande aventure. Le fait que Loïs découvre le secret de Bruce Wayne apporte un plus indéniable à l’histoire et renforce les relations entre les personnages.

 

Quand tu regardes l’abîme, l’abîme regarde aussi en toi.

The Hand of Fate (2.19) écrit par Hilary J. Bader et Stan Berkowitz

Superman demande de l’aide au Docteur Fate afin de combattre une créature magique, Karkull, contre laquelle il est impuissant.

Parmi tous les épisodes où Superman fait équipe avec un autre super-héros, The Hand of Fate retient particulièrement notre attention par son ambiance cauchemardesque. Bien qu’immensément fort, Superman est très vulnérable à la magie. Cet épisode met bien en valeur cette faiblesse tout en nous offrant des visions dignes des écrits de Lovecraft.

 

 

The Late M. Kent

The Late Mr. Kent (2.22) écrit par Stan Berkowitz

Clark Kent est obligé de se faire passer pour mort après avoir échappé à un attentat durant son enquête sur l’innocence d’un condamné à la chambre à gaz.

Une des grandes qualités de la série est de n’avoir jamais sacrifié Clark Kent au profit de Superman. Cet épisode est particulièrement intéressant du fait de la mise en avant du travail de journaliste de Clark. Paradoxalement, c’est en simulant sa mort qu’on se rend compte de l’importance capitale de l’identité de Clark Kent. Si l’épisode vaut également pour la tendre déclaration de Loïs Lane envers Clark, il restera surtout en mémoire pour sa fin implacable voyant un condamné recevoir sa sentence de manière définitive.

 

Darkseid (Michael Ironside) dans toute sa colère

Apokolips… Now ! (2.25 et 2.26) écrit par Bruce Timm et Rich Fogel

Darkseid décide de provoquer un accident nucléaire et d’attaquer la Terre. Bien qu’aidé par le puissant Orion, Superman aura bien du mal à vaincre le terrible seigneur d’Apokolips.

Cet épisode clé de la série, voit donc s’affronter deux terribles êtres, l’un représentant tout ce qu’il y de bon dans l’univers et l’autre ne cherchant qu’à faire germer le désespoir en chacun de nous. La puissance émotionnelle de cet épisode est due en grande partie à la préparation qui le précède. Darkseid et ses sbires sont présents dans la série depuis longtemps mais toujours cachés derrière un homme de paille, et si Superman a déjà affronté Kalibak, il n’a jamais eu vraiment à faire avec Darkseid (à part une brève rencontre qui se solda par une défaite pour Superman). Dans cet épisode, les forces de Darkseid se déchaînent sur une Metropolis ravagée que l’on a appris à aimer au fil des épisodes.

Cela d’autant plus que beaucoup de personnages secondairessont présents et tentent de lutter du mieux qu’ils le peuvent. Malgré l’intervention des armées de New Genesis (les ennemis puissants et héréditaires de Darkseid), la victoire a un goût amer puisque dans un acte de vengeance, Darkseid tue Dan Turpin afin d’humilier Superman. La soudaineté de la mort pour un personnage que l’on avait suivi depuis longtemps et la colère de Superman marque à jamais le téléspectateur.

 

Le monde n’a pas besoin de super-héros, juste d’un héros

 

L’enterrement de Dan Turpin qui conclue l’épisode reste l’un des plus beaux et tragiques moments de la série (et s’inscrivant sans problème dans les grands moments de la fiction télévisuelle américain) avec cette dernière image d’un Superman se recueillant sur la tombe d’un homme qu’il respectait.

« Le monde n’a pas besoin de super-héros, juste d’un héros »proclame tristement le dernier fils de Krypton. Un hommage d’autant plus poignant que l’épisode est dédié à Jack Kirby dont le personnage de Turpin était clairement l’alter ego dans la série. La présence dans l’assistance lors de l’enterrement des équipes créatives et de divers autres artistes renforce dès lors ce sentiment qu’au delà de Dan Turpin, c’est bien à l’enterrement et à l’hommage au roi des comics auquel nous assistons.

 

Hail to the King

 

 

SUPERMAN : THE ANIMATED SERIES (The WB)

Showrunné par Bruce Timm, Paul Dini et Alan Burnett

(54 épisodes entre septembre 1996 et février 2000)

Avec Tim Daly (Superman/Clark Kent), Dana Delany (Loïs Lane), David Kaufman (Jimmy Olsen), Clancy Brown (Lex Luthor), Lauren Tom (Angela Chen), Victor Brandt (le professeur Hamilton), Joseph Bologna (Dan Turpin), George Dzundza (Perry White), Joanna Cassidy (Maggie Sawyer), Mike Farrell (Jonathan Kent), Shelley Fabares (Martha Kent), Nicholle Tom (Supergirl/Kara) et Michael Ironside (Darkseid)

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